Peine de mort contre Kabila : la CENCO "horrifiée" par le verdict de la Haute Cour Militaire et rappelle l'urgence de la convocation d'un dialogue national inclusif

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L'arrêt de la Haute Cour Militaire de la République Démocratique du Congo condamnant à mort l'ancien Chef de l'État et autorité morale du Front Commun pour le Congo (FCC) Joseph Kabila Kabange continue de susciter des réactions dans l'environnement sociopolitique congolais. Le quatrième Président de l'histoire de la RDC a été reconnu coupable de crimes de guerre, de meurtre, d’agression sexuelle, de torture, de participation à un mouvement insurrectionnel, de complot et de soutien au terrorisme et autres crimes.

Dans une déclaration parvenue à ACTUALITE.CD, archevêques et évêques membres de la Conférence Épiscopale Nationale du Congo (CENCO) rappellent que la Constitution de la RDC consacre la sacralité de la vie humaine et la compte parmi les droits fondamentaux auxquels il ne peut être porté atteinte en aucun cas. Pour les évêques de l'église catholique, l'exécution de la peine de mort est une violation du droit à la vie défendue par l'Eglise.

"Conscients que la peine de mort et sa logique de rétribution ne sont pas compatibles avec l'Evangile, soucieux de chercher à tout prix les voies et moyens de ramener la paix, la cohésion nationale et de garantir l'intégrité du territoire national, nous sommes horrifiés par le verdict de la Haute Cour Militaire de Kinshasa, à l'issue du procès pénal expéditif engagé contre le Président Honoraire Joseph Kabila, le condamnant à la peine de mort. Fidèles à la mission de l'Eglise catholique « qui, en raison de sa charge et de sa compétence, ne se confond d'aucune manière avec la communauté politique et n'est liée à aucun système politique, est à la fois le signe et la sauvegarde du caractère transcendant de la personne humaine; considérant l'inquiétude suscitée par l'arrêt de la Haute Cour Militaire et l'impérieuse nécessité de renforcer la cohésion nationale, nous réitérons notre appel aux Acteurs, épris d'amour et de paix pour la RD Congo et impliqués dans la résolution de ses multiples crises, à chercher des solutions politiques", dit le communiqué signé par Fulgence Muteba, président de la CENCO.

Dans le contexte de guerre et d'insécurité que connaît la RDC,les évêques disent être convaincus qu'un dialogue inclusif reste la voie la mieux indiquée tant pour affronter les causes profondes de ces crises que pour retrouver l'unité, la paix, le bien-vivre ensemble et l'intégrité territoriale de la République Démocratique du Congo. Ce dialogue inclusif devient plus qu'urgent au regard de l'enlisement de la crise et de ses conséquences sur la population congolaise.

"Face aux conflits qui infligent de profondes souffrances aux populations innocentes, il est impératif de se donner comme priorité la promotion des solutions durables pour ramener la paix et la sécurité dans les zones sinistrées par le fait de guerre et des groupes armés étrangers et locaux.Nous saluons, à juste titre, les efforts déployés par les belligérants, les Institutions et les partenaires internationaux pour endiguer la crise sécuritaire qui sévit dans notre pays. Cependant, nous sommes persuadés que ces efforts seront infructueux tant que les acteurs politiques congolais ne s'engageront pas résolument et concrètement dans un dialogue inclusif, et ne respecteront pas, au préalable, les Accords déjà signés, ne fût-ce que pour accroître la confiance des uns et des autres", ajoute le communiqué de la CENCO.

Et de poursuivre :

"Nous considérons suicidaire et irresponsable «l'illusion qu'une paix juste peut être obtenue par la force des armes. Aussi nous réitérons notre exhortation aux Gouvernants de notre pays, à l'Opposition armée et non armée, aux membres de la société civile et à tout le Peuple congolais, à s'engager fermement, dans la lutte contre les différents facteurs qui alimentent les conflits et qui font le lit de la culture de la mort et du grand risque de balkanisation de notre pays".

En plus de la peine capitale, la Haute Cour Militaire a ordonné l'arrestation immédiate de Joseph Kabila Kabange. Ce dernier a été condamné à verser 29 milliards de dollars de dommages et intérêts à l’État congolais, ainsi que 2 milliards à chacune des deux provinces de l’Est qui s’étaient constituées parties civiles à savoir les provinces du Nord-Kivu et le Sud-Kivu. Toutefois, précise l'arrêt, la Haute Cour a souligné que les biens du condamné ne seraient pas saisis, rappelant que les infractions retenues ne prévoyaient pas la peine complémentaire de confiscation.

Cette condamnation intervient alors que la rébellion de l'AFC/M23 soutenue par le Rwanda s’est emparée depuis janvier de deux grandes villes de l’Est congolais et contrôle plusieurs territoires stratégiques dans les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu. Les juges de la Haute Cour Militaire estiment que l’ancien président Joseph Kabila Kabange aurait entretenu des liens directs avec ce mouvement rebelle.

Le parti de l’ancien président le PPRD a dénoncé un « procès bidon » visant à éliminer un adversaire politique. Jugé et condamné par défaut, le procès, ouvert en juillet, avait été boycotté par M. Kabila qui n’a ni comparu ni mandaté d’avocat pour plaider sa cause.

Clément MUAMBA