Près de deux ans après l'éclatement du conflit communautaire entre Mbole et Lengola dans la province de la Tshopo, le Bureau conjoint des Nations unies aux droits de l’homme (BCNUDH) a dressé un bilan lourd en termes des pertes en vies humaines et des violations graves des droits humains dans cette partie de la République Démocratique du Congo.
Des missions de monitoring et d’enquêtes du Bureau conjoint des Nations Unies aux droits de l’homme (BCNUDH) dans la province de la Tshopo, ont permis d’établir que des graves violations et atteintes aux droits de l’homme, telles que des exécutions sommaires, des traitements cruels, inhumains et dégradants, des violences sexuelles, des enlèvements et des pillages et destructions systématiques des biens et des villages ont été commises par toutes les parties en conflit.
"Au moins 97% des cas documentés par le BCNUDH concernent des victimes d’atteintes commises par des assaillants Mbole ou Lengola et 3% par des acteurs étatiques, en particulier, la Légion Nationale d’Intervention, une unité spéciale de la Police nationale congolaise déployée dans la zone depuis août 2023", renseigne le Bureau conjoint des Nations Unies aux droits de l’homme (BCNUDH) dans sa note du jeudi 16 janvier 2025 destinée à la presse.
Au cours d’une mission d’enquête en août 2024, le BCNUDH dit avoir réalisé des entretiens confidentiels avec 100 personnes et a recensé un total de 228 victimes d’atteintes des droits de l'homme commises par des assaillants civils armés appartenant aux communautés Mbole ou Lengola ainsi que leurs alliés.
"Parmi ces victimes, 149 personnes ont été tuées et 39 ont été blessées ou soumises à des traitements inhumains et dégradants entraînant des handicaps permanents, tels que la cécité et l'amputation des bras, y compris à l'encontre d'une fillette âgée de huit ans, ainsi que des rituels comprenant l'enlèvement et le traitement inhumain et dégradant d’un bébé de six mois. En outre, des maisons et, parfois des villages entiers, ont été systématiquement pillées et incendiés", ajoute le document.
L'équipe du Bureau conjoint des Nations Unies aux droits de l’homme (BCNUDH) dit avoir également documenté des cas de violence sexuelle particulièrement violents à l'encontre de quatre femmes, dont des viols collectifs, des viols précédés,accompagnés ou suivis de traitements inhumains et dégradants (d’un meurtre par décapitation, de mariage forcé ou d'esclavage sexuel.
"Les suspects des atteintes ont été unanimement identifiés comme étant de jeunes parlant dans la majorité des cas le Mbole/Lingala ou le Swahili/Lengola. Ils détenaient des armes à feu, des machettes, des couteaux et des flèches empoisonnées. Les groupes Mbole en particulier ont atteint un certain niveau d'organisation interne et de chaîne de commandement", précise le Bureau conjoint des Nations Unies aux droits de l’homme (BCNUDH).
Depuis le début du conflit, le BCNUDH rapporte qu'au moins 303 civils ont été victimes des graves violations et atteintes aux droits de l’homme dans le cadre du conflit intercommunautaire opposant les Mbole et Lengola et leurs alliés respectifs depuis février 2023. Selon les sources gouvernementales et humanitaires, au moins 107,000 personnes ont été déplacées à cause du conflit et vivent dans des conditions très précaires dans trois sites des déplacés dans la ville de Kisangani et dans la commune de Lubunga.
Le conflit intercommunautaire a pour origine un litige foncier portant sur un désaccord sur la propriété de 4.000 hectares cédés par les autorités provinciales à la société agro-pastorale CAP-Congo dans la commune de Lubunga, ainsi que l’installation d’une administration parallèle dans la commune de Lubuya Beda et des tensions ethniques sous-jacentes.
Clément MUAMBA