Alors que la République Démocratique du Congo se prépare à la rentrée scolaire, la société civile martele sur la remise en question de 63 années du projet éducatif colonial et néo-colonial encore en application au pays. Elle dresse un bref diagnostic du système éducatif congolais et propose quelques grandes réformes indispensables et des mesures immédiates à prendre pour redresser ce secteur.
En effet, dans le cadre des préparatifs de la Conférence nationale sur la reconstruction et l'emergence de la RDC, l'Observatoire de la dépense publique (ODEP) et l'Association africaine de défense des droits de l'Homme (ASADHO) ont publié un document commun axé sur la réflexion à entreprendre pour construire un projet éducatif de décolonisation mentale et culturelle afin de créer les conditions du développement "indépendant, autocentré et autodéterminé" de la RDC.
Pour l'ODEP et l'ASADHO les politiques publiques de l'éducation menées en RDC depuis 63 ans ont fait faillite.
"Le contexte dans le secteur de l’éducation depuis plusieurs années est caractérisé par les violentes crises des étudiants, les mesures sur la gratuité de l’enseignement de base qui ont créé aussi une série des débats et crises chez certains groupes d’enseignants, bref, le problème fondamental semble se situer au niveau des politiques publiques de l’éducation menées depuis 63 années qui ont fait faillite", écrivent ces deux ONG dans leur document conjoint intitulé "Projet éducatif de décolonisation mentale et culturelle pour les congolais : Un grand débat prioritaire pour la Conférence Nationale sur la Reconstruction et l’émergence de la RDC.
Ces structures citoyennes estime qu'il aurait été très important que le président de la République convoqué dès les premiers mois de l’année 2019 les états généraux de l’éducation.
Les origines de l’école congolaise : le projet éducatif colonial
L'ODEP et l'ASADHO rappellent les fondamentaux des origines de l'école congolaise.
"L’école européenne a été instaurée en RDC, en 1890. Elle marquera le début du processus d’acculturation qui est une composante essentielle du projet colonial : il faut intégrer progressivement l’indigène aux valeurs de la « civilisation ». Dès 1906, la convention établie entre le Saint-Siège et l’Etat indépendant du Congo confie à tout établissement de mission catholique la charge de créer une école où les indigènes recevront l’instruction. Il faut former, pour le nouvel Etat colonial, des agents subalternes efficaces et dévoués, chez qui il faut inculquer l’amour de la métropole et la sympathie pour l’entreprise coloniale. Le projet éducatif se caractérise par la mise en vedette de traits culturels à favoriser, à imposer aux colonisés et à intégrer progressivement dans leurs coutumes comme dans leurs comportements : une éthique de l’autorité avec comme référence pertinente le pouvoir de Dieu, celui du colon, celui du chef reconnu par les colons, une réorganisation de l’espace mental du Congolais", renseigne leur document.
Bilan catastrophique
Selon ces deux ONG, après 63 années, le système éducatif congolais dégage un bilan catastrophique caractérisé par :
- Le manque d’un véritable projet national d’éducation pour le développement, corolaire d’un projet global d’un développement endogène ; - Un accroissement des effectifs des élèves sous la pression de la demande et de la poussée démographique ; - Une augmentation parallèle du nombre des enseignants ; - Une infrastructure qui se dégrade de plus en plus, de moins en moins suffisante par rapport à la demande, une pénurie quasi permanente de moyens financiers et de matériels pédagogiques ; - La baisse de la qualité de l’enseignement due aux causes ci-dessus, mais aussi à l’inadaptation des programmes et l’insuffisance de qualifications, la démobilisation et la démotivation des enseignants.
Notons que l'Observatoire de la dépense publique (ODEP) et l'Association africaine de défense des droits de l'Homme (ASADHO) préparent l'organisation de la Conférence sur la reconstruction et l'émergence de la RDC qui va aboutir à la production d'un livre blanc contenant les réformes à mener pour propulser le développement du pays.
Jordan MAYENIKINI