RDC : pour l’écrivain et chercheur Didier Sangara, il y a lieu de faire partir la Monusco sans casse ni violence

Un casque bleu à Bunia/Ph ACTUALITE.CD

Les récentes manifestations dans la province du Nord-Kivu en vue d’exiger le départ de la Monusco à cause de son « inaction » face aux tueries des civils notamment à Beni (Nord-Kivu) et Irumu (Ituri) ne sont pas passées inaperçues. Plusieurs observateurs dans la région ont également vécu ces manifestations qui ont fait au moins trois morts à Beni et une dizaine près de Goma, dans le territoire de Nyiragongo. Le chercheur et écrivain Didier Amani Sangara a, dans une nouvelle opinion, estimé que le départ peut être obtenu sans violence ni casse. Ci-dessous sa réflexion :

 

Fred Neumann, un psychanalyste allemand avait dit que lorsque le peuple est privé de son droit qui lui est légitimement échu en partage, il est évident que ce peuple agisse en aversion. Un fermier anglais du début du 19ème siècle, du nom de Charles Boycott, avait privé ses travailleurs de leur salaire. Lorsqu’ils avaient été affamés, eux, et leurs familles ; ils se concertèrent et conclurent unanimement à faire sentir à leur patron la douleur de la faim.

Et quand Charles Boycott était venu voir comment ils travaillaient, ses travailleurs le lièrent lui et son cheval sur un arbre du matin jusqu’au soir. Et quand la faim l’avait secoué jusqu’à la moelle osseuse, il signa un pacte de paix avec ses travailleurs pour lequel il n'allait plus violer la date de paiement de leur salaire. Les journalistes écrivirent sur cet événement malheureux survenu à Charles Boycott au point qu’ils avaient ironisé cela en disant : [Boycott a été boycotté !]  Il a fallu que Boycott soit boycotté par un agissement en aversion de ses travailleurs, pour que leur droit soit acquis définitivement. Voilà donc en effet comment le vocabulaire [Boycotter] a vu le jour !

La nécessité de la discipline à adopter pour atteindre l’objectif escompté

Si le peuple congolais est déterminé à faire partir la Monusco définitivement ; qu’il évite alors dans ce cas-là, de faire sortir ses gonds et de s’exposer devant la Monusco à son risque péril, pour devenir la chair à canon ! Car, lorsque l’être humain est tellement opprimé par ceux qui sont censés le protéger, il perd le plus souvent ses pédales et se livre dans des agissements brusques de [hors-piste] qui finissent par mettre sa propre vie en danger !

Et comme la mission de maintien de la paix en RDC (MONUSCO) n’est plus synonyme de protection civile de Beni, Ituri, et dans d’autres provinces ; le peuple congolais doit apprendre à pratiquer [la discipline de faire certains sacrifices au profit de la liberté durable].

Les Nations Unies n’ont pas de compassion ni de souci pour les africains qui meurent comme des sauterelles. Si les dirigeants européens acceptent sans peine ni sentiment d’aversion que leurs citoyens manifestent pour revendiquer le rabattement du prix du pain, ne pourront-ils pas alors dans ce cas-ci, si lugubre et funeste, soutenir le peuple Congolais lorsqu’il revendique le départ de la Monusco à cause de son impuissance notoire face au génocide qui se perpètre et se perpétue toujours dans le grand-nord (Béni et environs !) malgré leur arsenal de dernier cri ?

Départ sans casse ni violence

Que tous les mouvements impliqués dans les droits humains : Lucha, Filimbi, sociétés civiles, et autres ; fassent une sensibilisation auprès des couches de la population afin de refuser totalement tout service aux expatriés de la Monusco ;

  • Ne pas les servir dans leurs maisons ;
  • Sensibiliser les élèves et étudiants à les huer lorsqu’ils passent dans leur convoi ;
  • Sensibiliser les vendeurs et vendeuses à les huer quand ils passent ;

Ceci exige l’implication de tout un chacun. Un adage dit que : [Celui qui fait un choix, a aussi un tourment ou la douleur]. Mieux vaut vivre sans être décimé au lieu de se focaliser et de miser sur des avantages éphémères.

Mandela a accepté une douleur momentanée afin de léguer à son peuple une liberté stable et durable... Martin Luther King a même accepté la mort pour que les noirs américains soient reconnus comme véritables citoyens du pays.

L’ex-président Barack Obama, ne l’avait pas bien compris, car il a servi une mouvance obscurantiste au lieu de promouvoir les intérêts des noirs.

Pourquoi Patrice Emery Lumumba, Thomas Sankara, Laurent-Désiré Kabila et le colonel Mouammar Kadhafi sont-ils morts ? Ils voulaient servir tout d’abord leur peuple au lieu de servir les intérêts très plafonnés des occidentaux [...] Ainsi, devinrent-ils alors des bêtes noires à abattre !

Si vous ne comprenez pas votre rôle dans la société, vous ne pourrez jamais apporter de contribution significative. Comme Gandhi l’avait compris et démontré, le principal pouvoir positif dont nous disposons dans un monde de relations est peut-être celui d’interrompre notre coopération avec l’autre s’il refuse de respecter nos intérêts légitimes. Il y a sur le sujet une célèbre histoire grecque que raconte une comédie d’Aristophane, celle de LYSISTRATA. Lassées des guerres constantes que se font les hommes, de la mort et des souffrances qu’elles apportent, les femmes d’Athènes et de Sparte décidèrent de cesser de faire l’amour jusqu’au jour où les hommes arrêtèrent de se battre. Ce qui l’oblige à penser que si vous appliquez la stratégie de celle des femmes de Sparte ou d'Athènes, vous ne pouvez pas aboutir à une solution durable au profit du peuple Congolais. Quels que soient les arguments, l’argent et les supplications des agents de la MONUSCO, nous vous recommandons de ne pas céder à la manipulation de ces derniers.

Didier Amani SANGARA NTALE

Auteur notamment des ouvrages « L’obligation de la bonne gouvernance en République démocratique du Congo »; « Les Guerres en région des Grands Lacs africains : comment prévenir les répercussions d’une histoire tragique ? »