Sylvain Ekenge mobilise ses collègues au front : « Nous devons tous nous mobiliser et laver l’opprobre qui nous a été infligé par ce petit pays, le Rwanda. Nous devons le combattre jusqu’à libérer les territoires occupés »

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Général Major Sylvain Ekenge, Porte-parole des FARDC

Depuis la résurgence de la rébellion de l’AFC/M23, soutenue par le Rwanda, les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) subissent des revers significatifs face au mouvement rebelle, qui occupe désormais de vastes zones du territoire national, notamment dans les provinces du Nord et du Sud-Kivu, à l’est du pays.

Conscient que cette situation n’est pas une fatalité, le porte-parole des FARDC, le général-major Sylvain Ekenge, a exhorté ses collègues à ne pas baisser les bras face au Rwanda, rappelant leur serment de servir le pays jusqu’au prix du sang. Selon lui, il est temps de laver l’opprobre infligé à l’armée congolaise par le régime de Kigali.

« Je sais que vous êtes vaillants et forts. Les circonstances occasionnelles, la trahison et certaines erreurs expliquent ce que nous avons perdu. Mais en rejoignant l’armée, nous avons pris l’engagement de servir la patrie jusqu’au sacrifice suprême et de protéger la population, même au prix de notre sang. Nous devons combattre cet ennemi. Il a des armes, vous aussi. Il est composé d’hommes, et vous êtes des hommes vaillants. Ils ont été formés, vous aussi. Il n’y a plus de place dans notre armée pour les peureux et les fuyards. Nous devons tous nous mobiliser et laver cet opprobre qui nous a été infligé par ce petit pays, le Rwanda. Nous devons le combattre, et le combattre jusqu’à libérer tous les territoires occupés aujourd’hui. C’est notre devoir, un devoir patriotique », a lancé Sylvain Ekenge, porte-parole des FARDC, lors de son passage samedi 27 décembre 2025 sur la chaîne nationale RTNC.

Aux militaires des FARDC encore capturés ou enrôlés de force au sein de la rébellion de l’AFC/M23, le général-major Sylvain Ekenge rappelle qu’ils ont toujours une place au sein de l’armée loyaliste. Il en profite pour les encourager à déserter la rébellion et à regagner le camp de la patrie.

« Je pense aussi aux militaires pris en otage et envoyés comme chair à canon. Parmi les combattants du M23 que nous arrêtons, beaucoup sont d’anciens membres des FARDC capturés à Goma, puis envoyés mourir au front pendant que d’autres restent en arrière. Je l’ai déjà dit dans mes messages : votre place est toujours au sein des Forces armées de la République démocratique du Congo. On vous a demandé de déserter ce mouvement et de regagner le camp de la patrie, et vous devez tout faire pour y parvenir. Si on vous envoie au front, saisissez l’occasion : amenez votre arme ou abandonnez-la et rendez-vous à l’armée nationale. Fuyez ce mouvement terroriste qui vous vend des illusions et des promesses irréalisables. Vous avez vu les atrocités de Rumangabo et dans leurs camps d’instruction, qui sont de véritables camps de concentration. Beaucoup y sont morts, et l’on continue de vous envoyer mourir. Si l’occasion se présente, faites défection et rendez-vous du côté de l’armée nationale », a recommandé le général-major Sylvain Ekenge, porte-parole des FARDC.

Au peuple de l’espace du Grand Kivu, le porte-parole des FARDC, qui a indiqué avoir passé une grande partie de sa carrière dans cette région, a salué la résilience des populations. Il les a encouragées à ne pas se décourager et à continuer de tenir bon face à l’adversité rwandaise.

« Je leur demande de continuer dans cette voie. Les Rwandais tentent de les embrigader et de gagner leur confiance, mais les Congolais du Kivu refusent. Ils savent ce que les Rwandais ont fait aux femmes, aux enfants et aux jeunes. Ils recrutent les jeunes de force pour les envoyer comme chair à canon aux combats. Récemment encore, ils ont tenté de mobiliser la population par des marches forcées, mais les Congolais du Kivu ont refusé. Ils ne se soumettront pas au diktat du Rwanda, je le sais. Habitants du Grand Kivu, vous êtes un peuple vaillant. Sachez que, quelle que soit la longueur de la nuit, comme le disait un sage, le jour finit toujours par se lever. La liberté et la dignité reviendront à la population aujourd’hui sous occupation », a affirmé le général-major Sylvain Ekenge, porte-parole des FARDC.

Depuis près de quatre ans, la République démocratique du Congo fait face à une agression rwandaise, liée au soutien de Kigali au groupe politico-militaire AFC/M23 opérant dans l’est du pays. Kinshasa dénonce une ingérence rwandaise dans ses affaires intérieures ainsi qu’une exploitation de ses ressources naturelles. De son côté, malgré les multiples rapports des Nations unies, le Rwanda continue de nier ces accusations, affirmant ne faire que se défendre contre la menace des FDLR.

La prise de Goma et de Bukavu au début de l’année 2025 a suscité une mobilisation accrue de la communauté internationale. Deux processus majeurs ont été engagés pour tenter d’endiguer l’escalade : les accords de Washington, signés entre Kinshasa et Kigali sous l’égide des États-Unis, et le processus de Doha, conduit par l’État du Qatar et impliquant le gouvernement congolais et la rébellion de l’AFC/M23.

Si le processus de Washington semble avoir connu une accélération formelle avec l’entérinement des accords par les présidents Félix Tshisekedi et Paul Kagame, en présence du président américain, les discussions de Doha peinent à enregistrer des avancées concrètes. Ces négociations, censées compléter les accords de Washington en abordant les causes profondes du conflit, notamment la restauration de l’autorité de l’État et la réintégration des groupes armés, restent pour l’instant largement au point mort.

Cette inertie a favorisé la reprise de violents affrontements entre l’AFC/M23, appuyée par le Rwanda, et les forces gouvernementales, entraînant l’occupation de la ville d’Uvira, dans la province du Sud-Kivu. Cette prise de contrôle a suscité de vives condamnations internationales, visant principalement Kigali, et en particulier les États-Unis.

Sous la pression internationale, la rébellion de l’AFC/M23 a annoncé son retrait d’Uvira, affirmant vouloir donner une chance aux processus de paix. Toutefois, quelques jours plus tard, la représentante américaine au Conseil de sécurité des Nations unies a rappelé la nécessité d’un retrait effectif et vérifiable, à une distance d’au moins 75 kilomètres de la ville.

Clément MUAMBA