L’ultimatum lancé par le gouvernement britannique à trois pays africains, dont la République démocratique du Congo, est inédit. Londres menace de restreindre l’octroi de visas, estimant que la coopération avec ces États dans le rapatriement de leurs ressortissants en situation irrégulière demeure insuffisante.
La ministre de l’Intérieur, Shabana Mahmood, citée par RFI et l’AFP, a donné un délai d’un mois à l’Angola, à la Namibie et à la RDC pour "améliorer substantiellement" leur collaboration en matière d’expulsions. Dans un communiqué au ton particulièrement ferme, elle avertit : "Acceptez le retour de vos ressortissants ou vous perdrez le privilège de pouvoir entrer dans notre pays." Cette mise en garde intervient à la veille de la présentation au Parlement d’une vaste réforme migratoire portée par le gouvernement travailliste.
À Kinshasa, l’on se veut rassurant malgré cette menace. Lors d’un briefing presse lundi, le porte-parole du gouvernement congolais, Patrick Muyaya, a indiqué que le dossier est déjà pris en charge par les ministres des Affaires étrangères et de l’Intérieur afin de trouver un terrain d’entente.
"Sur cette question spécifique, il y a moins de deux semaines ou un peu plus de deux semaines, nous étions à Londres avec la première ministre Judith Suminwa, cheffe du gouvernement dans le cadre de sa participation à un grand débat sur CNN par rapport au développement de l'Afrique, nous avons eu l'occasion de rencontrer David Lammy Vice-Premier ministre du Royaume-Uni, de secrétaire d'État à la Justice et de lord chancelier. Il a auparavant été ministre des Affaires étrangères, ensuite nous avons eu une réunion justement avec les responsables du ministre de l'Intérieur pour parler de cette question. Je pense qu'avec la première ministre, cheffe du gouvernement on est assez sensibilisé, j'ai échangé avec ma collègue Ministre d'État, ministre des Affaires Étrangères Thérèse Kayikwamba à ce sujet qui y travaille déjà avec le VPM, ministre de l'Intérieur, sécurité Jacquemain Shabani pour s'assurer de voir à travers les différents outils qui existent comment nous pouvons continuer justement le travail", a déclaré Patrick Muyaya.
En cas d’éventuels rapatriement, le gouvernement insiste sur le respect des droits humains tout en assurant que toutes les dispositions seront prises pour garantir une prise en charge adéquate des ressortissants concernés.
"Il y a un point sur lequel la première ministre avait insisté, c'est-à-dire que s'il y a des retours qui doivent être faits de nos compatriotes qui sont là-bas et qui sont en situation difficile par rapport à leurs documents, ça doit se faire dans le respect des droits humains. Ce qu'il faut retenir de l'essentiel ce que la discussion a déjà commencé entre notre gouvernement et le gouvernement Britannique au niveau des Affaires Étrangères et de l'Intérieur, il y a des mesures qui sont prises et le moment venu on pourra évidemment les communiquer avec le gouvernement Britannique et nous assurer que la République Démocratique du Congo et ses ressortissants ne soient pas concernées par cette mesure", a ajouté Muyaya.
Selon RFI, le Home Office affirme que « des milliers de migrants en situation illégale originaires de ces pays se trouvent actuellement au Royaume-Uni ». Les restrictions annoncées viseraient notamment les visas de tourisme et les visas VIP, mais pourraient s’étendre à d’autres pays affichant « des taux élevés de demandes d’asile », précise le ministère britannique.
Les demandes d’asile en hausse de 18 % en 2024 au Royaume-Uni
Parmi les mesures prévues dans la nouvelle politique migratoire britannique figurent la réduction de la protection accordée aux réfugiés qui seraient « forcés de retourner dans leur pays d’origine dès qu’il sera jugé sûr » ainsi que la suppression de l’accès automatique aux aides sociales pour les demandeurs d’asile. Le gouvernement souhaite également accélérer les expulsions, notamment en restreignant les recours fondés sur la Convention européenne des droits de l’homme.
Toujours selon RFI, depuis le 1er janvier, 39 292 personnes sont arrivées au Royaume-Uni à bord de petites embarcations, dépassant les 36 816 enregistrées en 2024. Les demandes d’asile ont, quant à elles, augmenté de 18 % en 2024, alors qu’elles reculaient de 13 % dans l’Union européenne sur la même période, selon les chiffres officiels. Plus de 400 000 demandes ont été déposées depuis 2021, contre 150 000 entre 2011 et 2015.
La Belgique également confrontée à un afflux de demandeurs d’asile congolais
Parallèlement, la Belgique continue d’enregistrer un nombre important de demandeurs d’asile originaires de RDC. Pour les dix premiers mois de l’année 2025, plus de 2 000 Congolais ont introduit une demande de protection internationale, plaçant la RDC au quatrième rang des pays d’origine. Ces données ont été présentées jeudi 13 novembre à la presse à Kinshasa par le directeur général de l’Office des étrangers, Freddy Roosemont, accompagné de Joris Salden, directeur général des affaires consulaires au SPF Affaires étrangères de Belgique.
Clément MUAMBA