Sanctions du Trésor américain sur l'exploitation de Rubaya : "Nous voulons tenir responsable tous les acteurs du secteur et avoir des sociétés légitimes avec des activités qui vont profiter aux congolais" (Lucy Tamlyn, ambassadrice des USA en RDC)

Foto
Lucy Tamlyn, ambassadrice des États-Unis en RDC

Le Bureau du contrôle des avoirs étrangers (OFAC) du Département du Trésor américain vient d'imposer des sanctions à des entités liées à la violence des groupes armés et au commerce de minéraux critiques en République démocratique du Congo (RDC). L'est de la RDC a connu des milliers de morts parmi la population civile et une crise de déplacements massifs de population en raison de l'instabilité persistante, récemment exacerbée par le contrôle territorial du Mouvement du 23 mars (M23), soutenu par le Rwanda, et par les attaques de représailles des milices pro-RDC. 

Selon le communiqué du Bureau du contrôle des avoirs étrangers (OFAC) du Département du Trésor américain, ces sanctions visent spécifiquement l'un de ces groupes armés impliqués dans des opérations minières illégales et des stratagèmes fiscaux à Rubaya, une vaste zone minière riche en minéraux essentiels utilisés dans l'électronique moderne. De plus, les sanctions d'aujourd'hui visent des entreprises de RDC et de Chine qui commercialisent des minerais liés au conflit en provenance de RDC sur les marchés internationaux, souvent via le Rwanda.

Répondant aux questions de la presse au sujet de ces nouvelles sanctions, l'ambassadrice des États-Unis en République démocratique du Congo Lucy Tamlyn précise que l'objectif poursuivi par son pays est de responsabiliser tous les acteurs évoluant dans ce secteur. Elle a rassuré que ces sanctions auront également un impact sur terrain et cadre dans la logique d'assainir la chaîne d'approvisionnement en minerais au niveau de la région des Grands Lacs.

"Nous voulons tenir responsable tous les acteurs qui agissent dans le secteur, vous savez que le M23 est déjà sous les sanctions américaines depuis 2013 et nous avons déjà exprimé très clairement nos inquiétudes par rapport à toute la chaîne d'approvisionnement qui passe par le Rwanda dans une note que nous avons publiée en 2024. Pourquoi aujourd'hui ? Parce que nous voulons soutenir le processus de paix et nous pensons que tenir responsables tous les groupes armés, toutes les sociétés c'est quelque chose qui va envoyer ce message clairement", a déclaré devant la presse, l'ambassadrice des États-Unis en RDC Lucy Tamlyn.

Et d'ajouter :

"Tous les biens sont gelés par cette action, tous les biens qui sont aux États-Unis et tous les biens qui sont liés avec des acteurs américains,Il y aussi des sanctions secondaires même s'il s'agit d'une zone de conflit je vous assure que ces sanctions ciblées impactent les acteurs qui agissent dans la criminalité. Toutes sociétés qui travaillent avec ces entités sanctionnées qui ont des comptes bancaires aux États-Unis d'Amérique ou des connexions avec le système bancaire américain sont sujets à des sanctions civiles donc ce n'est pas juste une question de geler les comptes, c'est aussi des poursuites judiciaires contre les personnes qui sont impliquées".

Réagissant à la menace des sanctions brandit par John K. Hurley, sous-secrétaire au Trésor chargé de la lutte contre le terrorisme et du renseignement financier contre les groupes armés qui bloquent l’accès aux minerais, la représentante de Trump en RDC rassure que sa déclaration s'inscrit dans la logique d'aider la RDC à avoir les sociétés minières légitimes au profit du bien-être de la population congolaise.

"Nous travaillons très étroitement avec le gouvernement de la République Démocratique du Congo pour faciliter une paix durable entre la République Démocratique du Congo et le Rwanda voilà la raison pour laquelle nous avons facilité les discussions à Washington qui ont abouti à un accord de paix signé le 27 juin 2025 donc on va continuer dans ce sens et nous pensons qu'ouvrir le chemin pour les sociétés responsables qui vont travailler dans la légitimité, qui vont respecter l'environnement, qui vont respecter les travailleurs, ça va donner un nouvel élan à l'économie et ça représente l'intérêt américain soit les sociétés américaines soit les autres sociétés nous voulons avoir les sociétés légitimes dans l'espace minière, ainsi les activités vont profiter aux peuples congolais parce que maintenant toutes ces activités, les recettes, les profits échappent à l'État congolais et ils ne sont pas utilisés pour le bien-être du peuple congolais", a expliqué la diplomate américaine accréditée en République Démocratique du Congo.

À la question de savoir pourquoi pas des sanctions directement contre le Rwanda alors qu'il est également cité une nouvelle fois dans ce processus de trafic illicite des minerais? La diplomate américaine répond:"Nous pensons que le message est clair et nous avons toujours dit qu'on va utiliser tous les outils diplomatiques pour encourager tous les acteurs donc ce ne sont pas les dernières mesures de sanctions, nous commençons avec les acteurs dont nous avons cette information" a indiqué brièvement la diplomate américaine accréditée en RDC.

Dans sa décision, le Bureau du contrôle des avoirs étrangers (OFAC) a ciblé notamment la Coalition des Patriotes Résistants Congolais-Force de Frappe (PARECO-FF), active dans la zone minière de Rubaya (Nord-Kivu), ainsi que la Coopérative des Artisanaux Miniers du Congo (CDMC) et deux sociétés basées à Hong Kong, East Rise Corporation Limited et Star Dragon Corporation Limited. Selon le Trésor américain, le M23, soutenu par le Rwanda et déjà sanctionné par les États-Unis et l’ONU, a étendu son contrôle territorial dans l’est de la RDC, contribuant à l’instabilité et aux violations des droits humains. PARECO-FF, apparu en 2022, est accusé d’avoir supervisé des opérations minières illégales, imposé des taxes et recouru au travail forcé.

La CDMC aurait vendu des minerais issus de zones contrôlées par PARECO-FF aux sociétés East Rise et Star Dragon, alimentant un commerce de « minerais de conflit » transitant souvent par le Rwanda vers les marchés internationaux, notamment la Chine. Les sanctions entraînent le gel de tous les avoirs des entités désignées aux États-Unis et interdisent aux personnes américaines toute transaction avec elles. Le Trésor précise que ces mesures visent à « induire un changement positif de comportement » et s’inscrivent dans les efforts américains pour stabiliser l’est de la RDC et sécuriser les chaînes d’approvisionnement en minéraux critiques

Clément MUAMBA