L’année scolaire 2024-2025 s’est clôturée dans un climat de crise aiguë dans plusieurs localités du territoire de Masisi, province du Nord-Kivu. En raison de l’intensification des combats entre les rebelles de l’AFC/M23, soutenus par le Rwanda, et l’armée congolaise appuyée par des groupes armés locaux, des milliers d’élèves n’ont pas pu achever leur année scolaire. Des défenseurs des droits humains évoquent une "année presque blanche" pour de nombreuses zones touchées par les violences.
Dans le groupement de Buabo, la situation est particulièrement dramatique. Une vingtaine d’écoles sont restées totalement fermées durant tout le deuxième semestre. Dans les chefferies des Bahunde et du secteur Osso Banyungu, au moins vingt établissements n’ont pas fonctionné pendant des mois. De timides tentatives de reprise ont eu lieu en mai 2025, sous forte pression des autorités scolaires, dans l’objectif de sauver les classes terminales.
Les écoles secondaires de Buabo, Buzihe, Butsiro, Mukubangabo, Lutangahwa, Kirotche et Masika, ainsi qu’une quinzaine d’écoles primaires de la région, sont restées désertes. À Bushuhi, Shoa et Mbitsi, le groupement Banyungu subit également une crise critique. La majorité des élèves ont été déplacés avec leurs familles, fuyant l'insécurité vers des camps ou des localités jugés plus sécurisés.
D'après un enseignant syndicaliste joint par ACTUALITÉ.CD 250 écoles, dont 152 primaires et 98 secondaires, ont été fermées dans le territoire de Masisi, avec un nombre indéterminé d’élèves et d’enseignants déplacés. Certaines écoles ont tenté de fonctionner dans les camps de déplacés, mais dans des conditions extrêmement précaires.
Dans le territoire voisin de Rutshuru, le programme scolaire a été paralysé depuis mars 2025. En plus des conflits, les enseignants de plusieurs sous-divisions sont allés en grève depuis sept mois, en raison de l'absence de leurs salaires. Dans la sous division de Rutshuru 4, seules les classes terminales ont tenté de suivre les cours de manière sporadique, en préparation de l’ENAFEP qui avait eu lieu le mardi 1er juillet dernier.
À Walikale, six écoles du groupement Kisimba ont fermé après un regain d'activité de la rébellion du M23 en juin. Ces établissements, qui venaient tout juste de réouvrir, n’ont pas résisté à la reprise des hostilités. L’ensemble du territoire de Walikale fait état de 309 écoles primaires et 172 secondaires à l'arrêt, privant plus de 128 000 élèves d’éducation.
Dans la sous-division de Njiapanda, à Lubero, environ 60 % des écoles sont restées fermées en raison de l’insécurité causée par les rebelles ougandais de l’ADF. Une enseignante a confié à ACTUALITÉ.CD que même lorsque les cours étaient maintenus, les élèves avaient du mal à assimiler les matières enseignées. Cela s'explique par les déplacements incessants et la peur constante, alimentée par les affrontements entre les rebelles de l’AFC-M23 et les FARDC, appuyés par leurs alliés, ainsi que par la présence persistante des rebelles ougandais de l’ADF.
À Oicha, dans le territoire de Beni, une quarantaine d’écoles ont réussi à clore l’année scolaire de manière difficile. Les ADF y ont multiplié les attaques, entraînant l’abandon ou la délocalisation de nombreux établissements. Le 12 juillet dernier, le chef de la sous-division locale a rapporté que plusieurs enseignants, élèves et parents avaient été tués ou kidnappés.
Les écoles de Mayimoya, Mangina et Baswagha-Madiwe ont été parmi les plus affectées, avec des perturbations majeures jusqu’aux derniers jours de l’année scolaire.
Selon la ministre de l'Éducation nationale, Raïssa Malu, 2 594 écoles ont été fermées dans l’Est du pays à cause du conflit, dont 1 483 au Nord-Kivu et 1 111 au Sud-Kivu, privant plus d’un million d’enfants privés d’éducation. Certaines écoles ont été bombardées, d’autres transformées en bases militaires par des groupes armés.
Dans les zones contrôlées par le M23, une reprise partielle des cours est organisée, souvent dans des conditions ne respectant pas les standards éducatifs nationaux. Dans son rapport, l’UNICEF estime à 1,6 million le nombre d’enfants déscolarisés dans les provinces de l’Ituri, du Nord-Kivu et du Sud-Kivu. Ce chiffre inclut 795 000 enfants affectés uniquement depuis le début de 2025, la majorité d'entre eux étant des déplacés internes.
Josué Mutanava, à Goma