Le Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) a poursuivi ce jeudi 22 mai, l’opération de rapatriement volontaire des réfugiés rwandais installés en République démocratique du Congo (RDC). En cette seule journée, 610 personnes ont été ramenées au Rwanda, portant le total à 1 710 réfugiés rapatriés depuis samedi dernier.
Selon Eijun Byun, porte-parole du HCR basée à Genève, ces rapatriements concernent en majorité des femmes, des enfants, des personnes âgées et des personnes vivant avec handicap. La plupart d’entre elles sont originaires de Karhenga, dans le territoire congolais de Masisi, qu’elles avaient rejoint après avoir fui le génocide rwandais de 1994.
« 795 personnes ont déjà été rapatriées samedi et 610 autres aujourd’hui. Donc, à la fin de la journée ce jeudi, ça doit être un total de 1710. Cela, après que nos collègues qui sont à Goma ont vérifié leurs profils, donc, un screening par nos collègues de la RDC pour bien identifier les personnes à rapatrier mais aussi voir si les droits et lois internationaux et le principe du non-refoulement ont été respectés. Tous ceux qui sont rapatriés de la ville de Goma vers le Rwanda, leur profil a été vérifié et confirmé qu’il s’agit des réfugiés rwandais », a expliqué Eijun Byun.
Depuis la prise de Goma fin janvier par les rebelles de l’AFC/M23, ces familles vivaient dans des conditions précaires, notamment dans un centre pour déplacés à Sake, à une vingtaine de kilomètres de Goma. D’après des sources sécuritaires et humanitaires, leur retour au Rwanda aurait été précipité par l’impossibilité de regagner leurs villages d’accueil congolais, désormais contrôlés par l’AFC/M23. Ces derniers les auraient contraints à quitter Karhenga (Masisi) et Kanyarushinya (Nyiragongo), en direction de la frontière rwandaise.
À la grande barrière, poste-frontière entre Goma et Gisenyi, les scènes étaient chargées d’émotion. Vêtus de vêtements déchirés, le regard grave, ce sont principalement des femmes et des enfants qui sont descendus des bus affrétés par le HCR. Certains réfugiés, comme Jean-Baptiste Nsengiyunva, 43 ans, affirment avoir quitté le Rwanda il y a plusieurs décennies dans l’espoir de trouver des terres arables en RDC.
« Je suis venu ici en 2006, en quittant le Rwanda. J’habitais à Gisenyi. Je suis venu à la recherche de travail. La première fois, je me suis installé à Kanyaruchinya, dans le territoire de Nyiragongo. Je cultivais des pommes de terre à Kibumba. Une réunion a eu lieu ce dimanche matin. Les autorités du M23 nous ont dit que chaque Rwandais devrait envisager comment rentrer chez lui. C’est ainsi qu’ils nous ont embarqués dans leurs véhicules pour nous conduire dans les locaux du HCR. À ceux qui nous demandent de rentrer au Rwanda, nous disons merci. C’est toujours important de pouvoir retourner chez soi. Ils ont payé notre transport, ce qui est déjà très important, car nous n’avons pas eu à dépenser d’argent pour cela. Au Rwanda, je vais habiter à Mudugudu », a-t-il témoigné.
Jeannette Imanyishimwe Nyirarukundo, mère de quatre enfants, a raconté avoir quitté le Rwanda en 2006 pour chercher du travail.
« Je viens de Kibati, dans le territoire de Nyiragongo, et je rentre aujourd’hui au Rwanda. Je suis venue au Congo à la recherche de travail, et cela fait maintenant huit ans que j’y vivais. Je cultivais les champs à Kibati. Un jour, les militaires du M23 sont venus et nous ont demandé de monter dans leurs véhicules pour nous conduire dans les locaux du HCR. Une fois sur place, ils nous ont expliqué qu’ils voulaient nous aider à retourner au Rwanda. J’étais en difficulté pour rentrer chez moi, faute de moyens, mais Dieu nous a aidés. Aujourd’hui, je retourne au pays. Mon mari a été rapatrié dans le premier groupe samedi, et je suis restée avec nos quatre enfants. Je suis heureuse de rentrer chez moi. Je n’avais pas pu le faire plus tôt, simplement parce que je n’en avais pas les moyens », a-t-elle confié.
À leur arrivée, les autorités rwandaises les ont accueillis. Pacifique Ishimwe, maire adjointe du district de Rubavu, a déclaré :
« Ce sont des Rwandais originaires de la RDC. Ils avaient été pris en otage par les FDLR. Nous venons de les accueillir, afin qu’ils puissent enfin retrouver leurs familles et contribuer au développement de leur pays. Le message que nous souhaitons adresser aux autres citoyens rwandais qui hésitent encore à rentrer est clair : n’ayez pas peur. Rentrez au pays. Vous serez en sécurité. Nous ferons tout pour vous réintégrer dans la société et vous garantir les mêmes droits et responsabilités que tous les autres Rwandais », a-t-elle déclaré.
Début mars, l’AFC/M23 avait déjà remis au Rwanda vingt présumés combattants des FDLR (Forces démocratiques pour la libération du Rwanda), arrêtés en uniforme des FARDC, accentuant les inquiétudes sur la coopération entre les rebelles congolais et Kigali.
Josué Mutanava, à Goma