La tension était visible à l'Assemblée nationale lors de la plénière de ce mercredi 21 mai à la suite de l'arrêt de la Cour constitutionnelle, condamnant l'ancien premier ministre et député national Matata Ponyo dans l'affaire relative au parc agro-industriel Bukanga-Lonzo. Alors que les députés nationaux exprimaient leur colère, le président de l'Assemblée nationale Vital Kamerhe a préféré jouer la carte de l'apaisement.
Intervenant à ce sujet à la suite des interventions de ses collègues, Vital Kamerhe a indiqué que la Cour constitutionnelle n'a pas encore notifié l'Assemblée nationale de son arrêt. Il promet de relancer le sujet dès que l'arrêt parviendra à l'Assemblée nationale.
« Je n'ai pas l'intention d'ouvrir le débat sur cette question d'autant plus que la Cour constitutionnelle a rendu son arrêt. L'arrêt nous sera signifié. Je comprends bien votre position, le message que vous véhiculez. La Cour constitutionnelle a rendu son arrêt. Une nouvelle étape est ouverte mais nous n'avons pas encore été saisi, signifié et donc je vais inviter tout le monde d'abord au calme », a déclaré Vital Kamerhe.
L'élu de Bukavu ville promet de réagir au moment opportun conformément aux prérogatives reconnues à l'Assemblée nationale.
« Nous resterons dans le cadre de nos attributions en tant qu'Assemblée nationale. J'arrête le débat à ce stade, sinon nous risquons nous-mêmes de glisser dans l’inconstitutionnalité, si nous commençons à commenter les arrêts de la Cour constitutionnelle. Attendons d'abord d'être saisis et nous poursuivrons la question », a-t-il recommandé.
L’ancien premier ministre Augustin Matata Ponyo a été condamné par la Cour constitutionnelle à « dix ans de travaux forcés » pour détournements de fonds publics dans le cadre du projet du parc agro-industriel Bukanga-Lonzo. Actuellement député national et président du parti politique de l'opposition Leadership et gouvernance pour le développement (LGD), M. Matata Ponyo était premier ministre de 2012 à 2016 sous le régime du président Joseph Kabila.
Dans le cadre de cette affaire l’ancien premier ministre Augustin Matata Ponyo était poursuivi aux côtés de Deogratias Mutombo, ancien gouverneur de la Banque centrale du Congo au moment des faits, et de Grobler Christo, gérant de la société sud-africaine Africom. Deogratias Mutombo et Grobler Christo ont été condamnés chacun à « cinq ans de travaux forcés ». La Cour constitutionnelle a, par ailleurs, décidé de « l’expulsion définitive » de Grobler Christo du territoire de la RDC après l’exécution de sa peine.
Cette décision dans l’affaire Bukanga Lonzo est l’aboutissement d’un long feuilleton judiciaire. Tout est parti en 2021 lorsque saisi pour la première fois, la Cour constitutionnelle s’est déclarée incompétente pour juger un ancien Premier ministre. Le dossier a été transféré à la Cour de cassation. Face aux exceptions des avocats de l’ancien premier ministre, cette juridiction a saisi à nouveau la Cour constitutionnelle sur une question relative à l’interprétation des dispositions constitutionnelles sur sa compétence en matière pénale. Cette dernière va alors faire un revirement de jurisprudence en se déclarant cette fois-ci compétente à juger un ancien premier ministre. C’est alors qu’elle a été à nouveau saisie par le Procureur général pour cette seconde affaire.
Clément MUAMBA