Florimond Muteba, président du conseil d’administration de l'Observatoire de la Dépense Publique (ODEP), une organisation de la société civile congolaise, va comparaitre devant le tribunal de paix de Kinshasa/Pont Matete le 04 novembre prochain. Il lui est reproché l’affaire d'« imputation dommageable », portée contre lui par Lydie Omanga, membre du conseil d’administration de l'Autorité de régulation de télécommunications du Congo (ARPTC).
En effet, la partie civile accuse le président de l’ODEP d’avoir, pendant la période du 05 au 07 août dernier, mis au compte de la citante des « faits factices », selon lesquels la concernée « pillerait les ressources publiques de l’ARPTC ».
Ainsi, selon la citation directe RP 16209/ I de ce mercredi 23 octobre, l’ODEP aurait affirmé que cette institution toucherait « prétendument les sommes de 341324 USD l’an ; de 2 815 036 USD entre 2021 et 2023 ; de 429 000 USD en janvier 2024, alors qu’il n’en est pas le cas », estime la partie civile.
« La citante, en sa qualité du membre du collège de l’autorité de régulation de la poste et des télécommunications du Congo, est rémunérée conformément aux dispositions de la loi n°14 /2002 du 16 octobre 2022 », peut-on lire dans le document.
Par conséquent, le même document précise que la citante « n’a jamais touchée des sommes en dehors de celles officiellement prévues en rétribution de sa fonction, comme peuvent en témoigner les différents relevés bancaires authentiques et vérifiables auprès des institutions bancaires concernées (Raw Bank et Equity Bcdc) ».
D’où, la démarche de trainer en justice le président de l’ODEP, pour notamment le faire condamner pour « imputation dommageable » et lui faire payer à la citante l’équivalent en Francs congolais une somme de 100 mille USD.
Intimidations et tentative de musèlement de la société civile
Contacté par ACTUALITE.CD, le président de l'ODEP dit voir dans cette affaire une tentative d'intimidation.
«Ils veulent me faire taire, ils veulent faire taire la voix de la société civile, une voix sans complaisance. Disons que c’est peut-être le début », a-t-il fait savoir.
Selon lui, cette accusation vise à le museler et à dissuader les autres membres de la société civile de poursuivre leurs actions de contrôle citoyen.
« Ça ressemble à une intimidation pour pousser les activistes de lutte pour l’amélioration de la transparence à se taire tout simplement, face à la corruption, au détournement, et au blanchiment des capitaux », précise-t-il.
Il maintient sa position et estime qu’il est impensable qu’une classe s’accapare des ressources du pays, pendant qu’une autre croupisse dans la misère.
« On ne peut imaginer que quelqu’un ait plus de 60 000 $ par mois, et qu’après cela, elle a toute une série des primes de toutes sortes, y compris les frais d’installation, qui peuvent avoisiner 200 000 $ dans une année, si ils sont payés. Pendant ce temps, là, un policier a moins de 100 $, et que gagne militaire au front ? », s’interroge-t-il.
Malgré cette situation, l'ODEP se dit déterminé à poursuivre son combat. Il appelle les autres structures engagées dans la même lutte à la solidarité ; à ne pas se laisser intimider et à redoubler d'efforts pour défendre l'intérêt général.
« Faisons plus d’efforts, soyons unis, et je pense que le peuple unis, ne sera jamais vaincu. Ne baissons pas les bras. Sinon, c’est fini, ils vont triompher », a-t-il encouragé.
Comprendre le du dossier
L’ODEP avait dénoncé lundi 5 août dernier les rémunérations astronomiques à l’ARPTC. Certains du corps dirigeant de cette entreprise publique bénéficieraient d’un salaire mensuel moyen de 340 000 USD par mois par dirigeant, avec des écarts allant de 319 321 à 439 471 dollars.
Selon l’ODEP, ce collège dirigeant se serait octroyé des rémunérations atteignant collectivement 2,3 millions de dollars américains par an.
Cette structure indiquait par ailleurs que ces dirigeants ont touché 18,6 millions de dollars entre 2021 et 2023, sans compter une « prime de janvier » de l’année en cours, de 3 millions USD versée en début de l’année.
Pour l’ODEP, cette situation est en total déphasage avec la situation dramatique des millions de Congolais déplacés dans l’Est du pays, qui vivent une crise permanente. « Le budget de 19 millions de dollars consommé en 3 ans par ces 7 dirigeants est celui donné en 4 ans pour aider 7.000.000 des réfugiés intérieurs. Avec 150 FC chacun par année d’aide publique », renseignait le communiqué de l’ODEP.
Bruno Nsaka