Égalité des genres dans les églises : entre tradition et évolution

Le Desk Femme d'Actualité.cd a rencontré différents acteurs religieux pour faire le point sur les pratiques en cours concernant la mise en œuvre de l'éducation à l'égalité des genres au sein des églises et les défis rencontrés. Si la plupart des responsables interrogés affirment adhérer au principe de l'égalité fondamentale de tous devant Dieu, les modalités de sa mise en œuvre varient considérablement d'une église à l'autre.

Pour promouvoir l’égalité des genres, Jonas Ngalamulume, responsable du Ministère évangélique et prophétique du nom de Jésus-Christ (MEPROJEC) situé dans la commune de Mont Ngafula, met en avant des initiatives concrètes comme la décentralisation du pouvoir au sein de l'église, la lutte contre les messages discriminatoires et la promotion des femmes à des postes de responsabilité. Il souligne toutefois que les possibilités pour les femmes de prêcher restent limitées.

" Notre ministère se base sur la pensée de Paul qui dit qu’il est vrai que la femme peut prêcher, mais cela doit se faire dans un cadre restreint où il n’y a que des femmes. Cependant, elle peut prophétiser lors de cultes mixtes et faire tout ce que l’homme peut faire, en dehors du fait de prêcher."

De son côté, Christian Mfuri, président de la jeunesse de l'Église Assemblée du Christ située dans la commune de Matete, reconnaît l'absence d'un programme structuré sur l'égalité des genres au sein de leur église. Il justifie cette situation par une interprétation littérale de la Bible qui assigne des rôles différents à l'homme et à la femme. Néanmoins, il souligne l'importance qu'ils accordent à l'autonomisation des femmes.

"Notre base, c’est la Bible qui dit que la femme doit rester sous la direction de l’homme. Donc, l’homme est le chef et la femme est dirigée par lui. Nous n’avons aucun programme clairement défini pour promouvoir l'égalité des genres au sein de l’église, néanmoins nous avons des programmes de formation pour sensibiliser les femmes à la nécessité d’étudier et d’entreprendre pour s’autonomiser. Nous encourageons donc les femmes à chercher l’excellence dans ce qu’elles font."

Richard Moke, un des responsables de l’Armée de petits anges (APA) de la paroisse Nodasa, souligne que l'éducation à l'égalité des genres au sein de ce groupe qui réunit des enfants de 3 à 9 ans se fait de manière plus subtile, en inculquant aux enfants des valeurs de respect, de partage et de considération mutuelle.

"Nous proposons des formations doctrinales basées sur la foi catholique et des enseignements de culture générale. Dans l’ensemble, nous apprenons aux enfants l’égalité des genres non pas en organisant des enseignements spécifiques, mais en intégrant cette dimension dans chaque leçon. Nous leur apprenons à vivre dans la société, à respecter les droits des autres et à considérer les autres comme des égaux, qu'ils soient filles ou garçons."

Ben Kipulu, séminariste en théologie, aborde la question du sacerdoce réservé aux hommes, un point central des débats sur l'égalité des genres au sein de l'Église catholique, souligne-t-il.  Il rappelle que si l'Église affirme l'égalité fondamentale de tous, elle maintient une distinction entre les rôles des hommes et des femmes, fondée sur une interprétation spécifique des Écritures.

"L'Église justifie cette pratique par une interprétation des Écritures et de la tradition apostolique. Elle affirme que le sacerdoce ministériel est un signe sacramentel du Christ, qui s'est incarné en homme. Les femmes jouent un rôle essentiel dans l'Église en tant que baptisées, confirmées et membres du Peuple de Dieu. Elles sont appelées à vivre leur foi et à servir l'Église de diverses manières, notamment dans les mouvements laïcs, les associations caritatives et les communautés religieuses."

Bien que des efforts soient en cours pour répondre à ce besoin d’égalité au sein des églises, les interviewés reconnaissent néanmoins qu’il reste encore beaucoup à faire pour que les femmes puissent exercer pleinement leurs droits et leurs responsabilités au sein de leurs communautés religieuses. Il s'agit notamment de :

- Réconcilier tradition et modernité : comment interpréter les textes sacrés à la lumière des enjeux actuels ?
- ⁠Lutter contre les stéréotypes, les représentations genrées profondément ancrées dans les sociétés traditionnelles qui influencent les pratiques religieuses.
- ⁠Former les acteurs religieux (pasteurs, prêtres et laïcs) aux questions de genre.
- ⁠Favoriser un dialogue ouvert entre les différentes confessions religieuses pour enrichir les réflexions et trouver des solutions communes.

Les interprétations divergentes des textes sacrés, les résistances culturelles et les structures hiérarchiques des églises constituent autant d'obstacles à surmonter.

Nancy Clémence Tshimueneka