Comme partout ailleurs, une fois les études secondaires achevées, les jeunes diplômés sont confrontés à la complexité de l'orientation pour la filière à suivre à l'université. Le desk femme d'Actualité.cd s'est intéressé aux cas des jeunes filles et s'est entretenu avec Madeleine Mwadi, préfet de l’institut Nkamu de Lemba/ Kinshasa et spécialiste en orientation scolaire.
Madame Mwadi, quels sont les principaux défis auxquels sont confrontées les jeunes filles lorsqu'elles doivent choisir leur orientation après le baccalauréat ?
Madeleine Mwadi: Les jeunes filles congolaises sont confrontées à plusieurs défis, notamment :
- Le manque d'information: souvent, elles ne connaissent pas les différents métiers existants, les formations disponibles et les débouchés possibles.
- Les stéréotypes de genre: les métiers traditionnellement féminins sont souvent valorisés au détriment des autres secteurs, limitant ainsi leurs choix.
- Les pressions familiales: les familles peuvent avoir des attentes spécifiques quant au choix d'orientation de leurs filles, ce qui peut influencer leur décision.
- Les difficultés économiques: le coût des études supérieures et l'accès limité aux bourses peuvent constituer un obstacle majeur.
Pourquoi est-il important d'aider les jeunes filles à bien s'orienter dès la sortie du secondaire ?
Madeleine Mwadi: Une bonne orientation est essentielle pour plusieurs raisons. Elle permet aux jeunes filles de :
- Développer un projet professionnel réaliste en fonction de leurs aspirations et de leurs compétences.
- Augmenter leurs chances de réussite scolaire et professionnelle en choisissant une filière adaptée.
- Favoriser leur émancipation en leur donnant les moyens de construire leur propre avenir.
- Lutter contre les inégalités de genre en encourageant les jeunes filles à s'orienter vers des filières traditionnellement masculines.
Quel rôle peut jouer l'orientation scolaire dans l'autonomisation des jeunes filles ?
Madeleine Mwadi: L'orientation scolaire est un outil essentiel pour l'autonomisation des jeunes filles. Elle leur permet de :
- Mieux se connaître : identifier leurs centres d'intérêt, leurs compétences et leurs valeurs.
- Explorer les différentes options : découvrir les métiers qui correspondent à leur profil.
- Faire des choix éclairés : prendre des décisions en fonction de leurs aspirations et leurs contraintes.
- Développer leur confiance en elles : croire en leurs capacités et oser se lancer dans de nouveaux projets.
Quels sont les outils et les méthodes que vous utilisez pour accompagner les jeunes filles dans leur orientation ?
Madeleine Mwadi: j’utilise généralement:
- Des tests d'orientation pour aider les jeunes à identifier leurs centres d'intérêt, leurs compétences, leurs aptitudes et leurs valeurs.
- Des entretiens individuels pour approfondir leurs motivations et leurs projets.
- Des ateliers thématiques pour aborder des sujets comme la gestion de carrière, la recherche d'emploi, etc afin de favoriser les échanges et la réflexion sur les différents métiers.
- Des visites d'entreprises pour découvrir les réalités du monde professionnel.
- La mise en réseau pour faciliter les contacts avec des professionnels et des anciens élèves.
Quels sont les conseils que vous donneriez à une jeune fille qui souhaite s'orienter vers des études scientifiques ou techniques, traditionnellement considérées comme des domaines masculins ?
Madeleine Mwadi: Je lui dirais qu'elle a tout à fait sa place dans ces domaines. Il est important de montrer aux filles que les stéréotypes de genre sont dépassés et qu'elles peuvent réussir si elles en ont la volonté. Elles doivent être soutenues par leur entourage et avoir accès à des modèles féminins réussissant dans ces domaines. Les programmes de mentorat peuvent être particulièrement bénéfiques.
Comment peut-on lutter contre les stéréotypes de genre qui limitent ces choix des jeunes filles ?
Madeleine Mwadi: Il faut agir à plusieurs niveaux :
- Sensibiliser les parents et les enseignants pour qu'ils encouragent les filles à explorer toutes les voies possibles.
- Mettre en avant des modèles féminins réussis dans différents domaines professionnels.
- Proposer des activités mixtes pour montrer que les filles peuvent exceller dans tous les domaines.
- Déconstruire les stéréotypes dans les médias et la publicité pour promouvoir une image positive des femmes.
Comment les établissements scolaires peuvent-ils mieux préparer les élèves dans leur orientation ?
Madeleine Mwadi: Les établissements scolaires peuvent mettre en place différentes actions :
- Des ateliers d'orientation pour informer les élèves sur les différents métiers et les formations existantes.
- Des rencontres avec des professionnels pour permettre aux élèves de découvrir différents métiers et de poser leurs questions.
- Des tests d'orientation pour aider les élèves à identifier leurs intérêts et leurs aptitudes.
- Des partenariats avec les universités et les entreprises pour faciliter l'insertion professionnelle des étudiants.
Quels sont les défis à relever pour améliorer l'orientation scolaire des jeunes filles en RDC ?
Madeleine Mwadi: Parmi les défis, on peut citer:
- Le manque de moyens: les établissements scolaires ne disposent pas toujours des ressources nécessaires pour mettre en place des programmes d'orientation efficaces.
- Le manque de personnel qualifié: Il y a un besoin de former des professionnels de l'orientation.
- Les inégalités régionales: L'accès à l'orientation est plus difficile dans certaines régions du pays.
Il est donc nécessaire d'investir dans la formation des enseignants, de créer des centres d'orientation et de sensibiliser les familles à l'importance de l'orientation scolaire. Mais aussi développer des programmes d'orientation scolaire dans les écoles, former des conseillers d'orientation, et mettre en place des plateformes en ligne pour faciliter l'accès à l'information.
Propos recueillis par Nancy Clémence Tshimueneka