Dans sa communication ce 28 février, la Commission Électorale Nationale Indépendante (CENI) dit avoir atteint en moyenne 98% de ses prévisions sur les opérations d’enrôlement dans les deux premières aires opérationnelles. Précédemment, le monitoring avait révélé que sur les 19 provinces concernées, seule Kinshasa avait enrôlé un grand nombre des femmes. Comment comprendre cet écart et combler pour le reste du processus ? Theophilus Dowetin répond aux questions du desk Femme d'Actualité.cd
Bonjour Monsieur Theophilus Dowetin et merci de nous accorder de votre temps. Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?
Theophilus Dowetin : Je suis le représentant-pays de la Fondation internationale pour les systèmes électoraux (IFES). L'IFES met actuellement en œuvre l'activité d'intégrité électorale financée par l'USAID/RDC (DEIA). Ce projet du Consortium pour le renforcement des élections et du processus politique (CEPPS) est mis en œuvre en coordination avec l'Institut républicain international (IRI). Suite au renouvellement de la direction de la CENI en 2022, l'IFES a aidé la CENI à élaborer et à adopter un plan stratégique 2022-2026 qui est ancré sur l'amélioration de la crédibilité et de la qualité de service de la CENI, la reconstruction de la confiance des acteurs électoraux dans l'institution et une plus grande inclusion des populations auparavant marginalisées.
Les femmes constituent au moins 52 % de la population congolaise. Cependant, les résultats du récent monitoring de l'aire opérationnelle 1 et 2 présentés par la CENI démontrent que le taux de participation des femmes est faible par rapport à celui des hommes sur 18 des 19 provinces concernées. Qu’est-ce qui peut expliquer ce contraste ?
Theophilus Dowetin : ce n’est pas toujours automatique, que le pourcentage des femmes dans la société soit identique au taux de participation des femmes en politique, surtout en matières électorales. En République Démocratique du Congo, l’enrôlement n’est pas obligatoire. Ce qui explique que certaines femmes puissent choisir librement de ne pas s’enrôler. Il en est de même pour le vote. La citoyenne est encouragée à voter mais pas obligée.
Pensez-vous que la CENI aurait pu prévenir cela ?
Theophilus Dowetin : cette charge au niveau de la CENI, relève des attributions du point focal pour le genre et l’inclusion. Ce que la CENI devait faire après ce constat, c’est d’y apporter une réponse adéquate, notamment par des séances spécifiques de sensibilisation destinées aux femmes. Lorsqu’on mène une campagne stratégique, on sait cibler les endroits à forte concentration des femmes, on détermine les canaux de diffusion les plus accessibles pour les femmes, et des messages qui peuvent être véhiculés plus rapidement. Si cette technique était déjà mise en œuvre, il va être important de la revoir, comparer les résultats obtenus du terrain et relancer autrement.
15 jours supplémentaires ont été accordés à la deuxième aire opérationnelle. L’enrôlement se poursuit également au niveau des centres qui ont connu des problèmes. Quelles recommandations feriez-vous pour augmenter le taux de participation des femmes ?
Theophilus Dowetin : il faut vraiment utiliser une approche inclusive pour toutes les opérations électorales. Je propose de lancer des campagnes stratégiques. C’est-à-dire que tous les acteurs sociaux et politiques devraient participer à cette finalité. Les églises, les chefs des partis politiques, les chefs coutumiers, les chefs des quartiers et autres devraient s’activer pour que les femmes qui font partie de leurs communautés aillent se faire enrôler et s’impliquent dans le processus électoral.
Au niveau de l’IFES, comment contribuez-vous à cette finalité ?
Theophilus Dowetin : IFES a aidé la nouvelle direction de la CENI à relancer des forums de dialogue plus larges avec les parties prenantes. Parallèlement, l'IFES aide les organisations de la société civile (OSC), y compris les organisations de jeunes, de femmes et des personnes handicapées à défendre efficacement les priorités des citoyens dans les réformes juridiques pour des élections opportunes, crédibles et inclusives. Avec l'aide de l'IFES, les OSC ont formé le réseau iRÊVE représentatif au niveau national, qui vise à plaider pour des élections transparentes et inclusives en 2023 et au-delà. Nous avons également un point focal genre et inclusion qui élabore des stratégies pour une plus grande implication de la femme congolaise.
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