Le 23 mai, des organisations pro droits des femmes, des personnes vivant avec handicap, des actrices et acteurs politiques et autres composantes de la société civile, ont pris part à des échanges organisés par la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) à Kinshasa. Il a été question d’analyser la prise en compte de la parité dans les réformes en cours, faire un état des lieux et fixer des nouvelles stratégies.
Joséphine Ngalula, membre de la plénière, a représenté le président de la CENI. Prenant la parole, elle a circonscrit le cadre de cette rencontre avant de lancer les débats.
« La CENI a pour mission d’organiser les élections en RDC. Elle joue également le rôle de conseillère de la République en matières électorales. La promulgation de la Constitution de la RDC en 2006, caractérise une nouvelle ère sur la promotion de l'égalité des sexes, à différents niveaux de sphères décisionnelles. En son article 14, le législateur consacre la parité homme-femme et en prévoit la démarche pour son effectivité. (…) Le plus grand obstacle pour atteindre cette parité demeure l'article 13 de la Loi électorale qui reste ambigu surtout au niveau de son alinéa 3 qui ne rend pas contraignantes les listes électorales non paritaires (homme/femme). La loi électorale est un des outils essentiels pour le travail de la CENI (…) C'est ainsi que, dans le cadre de la mise en œuvre de sa feuille de route (cycle électoral 2021-2027), précisément la tenue des Cadres de concertation Genre et Diversité, la CENI organise cet atelier », a-t-elle fait savoir.
En tant qu’experte et partenaire, Catherine Odimba, chargée des programmes au sein de l’ONU Femmes RDC a exposé sur les leçons apprises des plaidoyers déjà menés dans le pays de 2006 à 2022, en matière de la prise en compte du genre dans les réformes électorales.
Elle a notamment parlé du ciblage, «il est important d’adapter son plaidoyer au type de cible à laquelle il est destiné », de l’identité de ceux qui portent le plaidoyer « la plupart des fois le plaidoyer pour la représentation des femmes dans les réformes électorales sont portées par les femmes elles-mêmes et moins par les hommes qui détiennent le pouvoir politique. Il sera important d’intégrer également les hommes dans ces démarches pour atteindre les résultats escomptés ».
Agir en tant que mouvement féminin, « nous nous sommes rendus compte que dès lors que les femmes agissent ensemble, il y a plus de résultats plutôt que quand elles décident d’agir en tant qu’organisation. Il faut que ce combat soit collectif », a-t-elle martelé.
En trois différents panels, avec d’autres experts et organisations des femmes, notamment IFES à travers Pacifique Nkunzi, CAFCO à travers Félicité Kanku, Rien Sans les Femmes, FODJEC, DYNAFEC et autres, les participants ont eu des moments intenses d’échanges. A l’issue de la journée, ils sont parvenus à élaborer des nouvelles stratégies pour les réformes électorales visant la représentation paritaire des femmes dans les listes électorales. Ils ont également planifié des actions communes pour les prochains jours.
« Nous sommes arrivés au moment de l’action »
Parmi les participants, Manya Riche, coordonnatrice de Congo Peace Center et seule membre femme du groupe de 13 personnalités (le G13). « C’était très pertinent. Nous sommes arrivés au moment de l’action. La loi que le G13 a initiée était une loi qui se voulait consensuelle. Nous avons fait beaucoup de rencontres, notamment avec la société civile, les regroupements politiques, (…) la plupart des personnes rencontrées étaient positives par rapport à cette réforme de la loi électorale. Nous constatons malheureusement lors des débats au parlement, qu’il y a un retour de statu quo, c’est très inquiétant. Il est grand temps que les femmes constituent un caucus malgré les tendances et les statuts, pour rechercher des stratégies d’actions afin que nos objectifs communs et nos intérêts soient atteints » a-t-elle dit au sortir de l’atelier.
Merry Kathutu, coordonnatrice de ADIFES (une coalition d'associations dirigées par les femmes) estime qu’à travers cet atelier, la CENI s’est révélée un allié de taille dans le plaidoyer de la société civile pour la prise en compte du genre dans les réformes électorales. « Il nous reste à traduire nos objectifs en actions adaptées à nos cibles », a-t-elle ajouté.
Barthélemy Kyalondagwa, membre de l’ONG Handicap is Right s’est également exprimé, « nous sommes heureux de savoir que l’on a tenu compte de l’inclusion du handicap au sein de l’action plaidoyer. Nous allons mutualiser les efforts en sorte que les députés puissent également intégrer la question du handicap et que la personne à mobilité réduite se retrouve dans la loi sous-examen au niveau du parlement. Le suivi des engagements pris en ce lieu est l’étape qui va garantir l’atteinte de nos objectifs ».
Pour rappel, certaines organisations et réseaux pro-droits des femmes sont actuellement au sixième jour de sit-in au palais du peuple pour exiger la modification de la loi électorale en intégrant une mesure contraignante au sujet de la représentativité des femmes sur les listes des partis.
Prisca Lokale