Du nouvel accord de cessez le feu à Luanda au lancement des 16 jours d’activisme contre les violences basées sur le genre, en passant par le conflit communautaire au Kasaï ou les promesses de rendre public le contenu de l’accord signé avec Dan Gertler ainsi que les salaires des hommes publics congolais, la semaine qui s’achève a été riche au niveau de l’actualité. Rebecca Kabuo passe en revue chacun de ces faits marquants.
Bonjour Madame Rebecca Kabuo. Pouvez-vous nous parler de vos activités ?
Rebecca Kabuo : Je suis une militante, membre du mouvement citoyen « Lutte pour le changement » LUCHA mais aussi membre de Goma Actif. Depuis 25 jours, Goma Actif (un collectif des jeunes de la ville de Goma), apporte une assistance alimentaire et sanitaire aux déplacés de guerre dans le camp de Kayembe. Nous envisageons de continuer à le faire jusqu'à ce que les organismes humanitaires et le gouvernement congolais puissent leur apporter une assistance significative. Dans le cas échéant, lorsque les déplacés pourront regagner leurs maisons.
Un nouvel accord de cessez-le-feu a été trouvé à l’issue d’un mini-sommet à Luanda. Le M23 est sommé de se retirer des zones occupées au risque que les chefs d'Etat de l’EAC instruisent la force régionale à faire usage de la force. Quelle est votre analyse de cette décision ?
Rebecca Kabuo : c'est vraiment bon que les pays de l’Afrique de l’Est s'impliquent dans la question de pacification de la RDC. Mais ces accords ne font que légitimer les rébellions qui ont été à la base des graves violations des droits de l’homme et qui ont occasionné d'importants déplacements pour les populations civiles. Le cessez-le-feu n'apporte qu'une paix éphémère. À mon sens, le gouvernement congolais devrait mettre tous les moyens en œuvre, y compris la réforme de l'armée, l'équipement et un très bon encadrement des militaires pour que nos forces armées soient en mesure d’en découdre définitivement avec l’activisme des groupes armés dont le M23, le CODECO et les ADF qui ne cessent d'endeuiller les populations.
Dans le cadre de la Force régionale en RDC, l'Ouganda a annoncé que près de 1.000 soldats vont être déployés à l’Est. Quelle est votre réaction à ce sujet ?
Rebecca Kabuo : je trouve cela très paradoxal, que l'Ouganda joue en même temps les rôles de pyromane et de pompier. L'Ouganda qui a joué un rôle prépondérant en faveur du M23 pour qu'il prenne Bunagana ne devrait plus faire partie de cette Force régionale autant que le Rwanda. Le Congo devrait être vigilant quant aux relations qu'il noue avec ses pays partenaires.
En économie, la RDC compte publier le contrat signé avec Dan Gertler qui a permis notamment l’abandon des poursuites contre l’homme d'affaires. Que représente cette annonce pour vous ?
Rebecca Kabuo : Publier le contrat est une chose. Mettre en lumière toutes les affaires liées à la corruption et au clientélisme en est une autre. Très peu de partenaires peuvent nous respecter avec un mode de gestion flou et non transparent.
En outre, à l'issue de l'adoption du budget, le ministère des finances va publier le salaire de l’huissier jusqu'au président de la République, « de manière à opter pour plus de clarté et de transparence ». Quel est votre avis ?
Rebecca Kabuo : publier ces salaires pour permettre la transparence est un acte louable. Cependant, le gouvernement ferait mieux de résoudre les injustices salariales. Nous devons aller au-delà de cette publication des salaires. Rendre également public les frais de fonctionnement des institutions, les revoir à la baisse et ce au profit de l'armée.
Dans la province du Kwilu, des assaillants empêchent le trafic commercial entre Kinshasa, Bukanga Lonzo et le territoire de Bagata. Votre lecture de cette situation ?
Rebecca Kabuo : l'Etat ayant le rôle de protéger les civils et leurs biens devrait tout mettre en œuvre pour restaurer l'autorité dans ce lieu, anéantissant ces assaillants pour rendre fluide la circulation entre Kinshasa, Bukanga Lonzo et Bagata.
En santé, à la suite de l’augmentation des cas de la Covid-19, le Chef de l’Etat attend un nouveau rapport pour d' éventuelles décisions. Comment avez-vous vécu le confinement en 2020 et pensez-vous que cela peut se répéter cette année ?
Rebecca Kabuo : je pense que l'équipe de riposte devrait redémarrer avec la sensibilisation et le gouvernement devrait tout faire pour que les cas d'abus commis par le passé ne se répètent pas. Le confinement de 2020 n'était vraiment pas une belle expérience humaine mais cette période a prouvé qu'à un moment, si l'Etat s'impose on peut toujours atteindre les résultats escomptés.
En ce moment, la Chine a communiqué le nombre de nouveaux cas de Covid-19 enregistrés dans le pays. 31 444 infections qui constituent “le record de cas depuis le début de la pandémie". Face à cette réalité, quelles recommandations feriez-vous au sujet des gestes barrières ?
Rebecca Kabuo : le combat contre la Covid 19 semble renaître et avoir de l'ampleur ces derniers temps. Plus le temps évolue, plus on se rend compte que Covid est en train de devenir une réalité et qu'il va falloir réintégrer les mesures barrières dans notre quotidien.
Dans une interview, la secrétaire générale de la Francophonie a soutenu que des forces seraient massées le long de la frontière congolaise et représentent un danger pour la sécurité du Rwanda. Quelle analyse avez-vous faite de ses propos ?
Rebecca Kabuo : la rhétorique du Rwanda justifiant le soutien au M23 par son inquiétude d'être menacé est dépassée. Il nous faut avoir le courage de voir la vérité en face et demander au Rwanda de retirer ses soldats des territoires de la RDC.
La campagne mondiale 16 jours d’activisme contre les violences sexuelles et basées sur le genre a débuté le 25 novembre avec pour thème : « TOUS UNIS ! L’activisme pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes et des filles ». Quelles sont, selon vous, les mesures à prendre en RDC particulièrement pour mettre fin à ces violences ?
Rebecca Kabuo : la communauté internationale devrait avoir le courage de lier les violences auxquelles les Congolaises font face à la situation sécuritaire, prendre une position tranchante de pacification afin de pallier à cette situation du viol utilisé comme une arme de guerre. On devrait tous s'impliquer pour mobiliser et conscientiser nos paires à mettre fin à toute forme des violences et l'appareil judiciaire devrait se réactiver pour sanctionner sévèrement les auteurs des violences sexuelle et sexiste.
Propos recueillis par Prisca Lokale