Les réactions se multiplient après la publication du contenu d’un rapport d’experts des Nations Unies prouvant l’implication du Rwanda dans les conflits armés à l’Est et dans l’appui aux rebelles du M23. Contactées par le Desk Femme, des activistes congolaises insistent sur une reconnaissance de la part du Conseil de sécurité et sur la poursuite du plan de retrait des troupes onusiennes en RDC.
"Cela va faire deux décennies que des conflits sont en cours dans la partie Est du pays. Ces révélations des experts des Nations Unies sont connues et ont été données à maintes reprises par plusieurs organisations" fait savoir Anny Modi, Directrice exécutive de l’ONG Afia Mama.
A Carine Kanku, coordonnatrice nationale de la Dynamique des femmes candidates de la RDC (DYNAFEC), de renchérir, "nous saluons les conclusions du rapport des Nations Unies. La population du grand Kivu l'a toujours dénoncé depuis plusieurs années et récemment notre gouvernement s’est exprimé clairement au sujet du Rwanda. Nous saluons les efforts diplomatiques fournis par le Chef de l'Etat, notre gouvernement, le Ministre des affaires étrangères et aussi une bonne communication par le biais du porte-parole. Il n’y a pas eu d'ambiguïté dans la communication et les ennemis de la RDC sont pointés du doigt dans la sous-région, plus particulièrement le Rwanda".
Des réactions attendues de la part du Conseil de sécurité et de l’EAC
Basée à l’Est du pays, Justine Masika, fondatrice de la Synergie pour les femmes victimes de violences sexuelles (SFVS) estime qu’il est temps pour les Nations Unies, et le Conseil de sécurité des Nations Unies en particulier, de reconnaitre et citer nommément l’implication du Rwanda dans les tueries à l’Est de la RDC.
« Les experts l’ont prouvé à travers leur rapport, il appartient maintenant au Conseil de sécurité de se prononcer. C’est uniquement de cette façon que la population congolaise sera apaisée. Nous avons également des attentes par rapport à la Communauté des Etats d’Afrique de l’Est (EAC) », a-t-elle soutenu.
Ne point entacher au processus du retrait des troupes onusiennes
Ces révélations du groupe d’experts arrivent dans une période marquée par les manifestations à l’Est de la RDC, pour réclamer le départ des troupes de la Monusco du sol congolais. Au cours de la semaine, la RDC a officiellement demandé au porte-parole de cette mission de quitter son territoire. Pour les activistes, le processus de désengagement doit suivre son cours normal.
"La Monusco pendant 20 ans n’a pas su travailler efficacement dans la protection des civils. Il y a eu une passivité du côté de cette mission Onusienne et du côté du gouvernement congolais. Ce qui dénote qu’il n’y avait presque pas de suivi des actions de la Monusco. Les organisations de la société civile ont plusieurs fois dénoncé cette passivité de la Monusco. Des délégations de femmes ont discuté avec les autorités à Kinshasa, sur cette question. Mais qu’est-ce qui a été fait ?", s’interroge Annie Matundu, présidente régionale de Wilpf (la Ligue internationale des femmes pour la paix et la liberté), avant d’ajouter, "la RDC est un pays souverain. Après ce rapport, elle devra revoir ses stratégies pour assurer l’intégrité de son territoire. Il y a des accords militaires conclus avec les Nations Unies. Il faudra les revoir. Poursuivre le plan de départ des troupes de la Monusco".
"Le processus de retrait des troupes onusiennes a déjà été lancé, il ne faudrait pas que ce rapport retarde les actions du gouvernement allant dans ce sens," a dit Justine Masika.
A Carine Kanku de surenchérir, exigeant plus de communication autour du processus de désengagement en cours. "Nous demandons à la Monusco de renforcer la communication à ce niveau à chaque étape de ce retrait. La Monusco a quitté la province du Kasaï, elle vient de quitter en juin dernier la province du Tanganyika. Le gros de leurs efforts sont actuellement concentrés dans le grand Kivu. Elle travaille avec la RDC qui a mis en place un programme dénommé le DDRC-S pour les forces locales et encore la Monusco gère un autre programme de rapatriement des étrangers impliqués dans cette déstabilisation à l'est de notre pays, une démarche pas aussi facile parce que certains ont des femmes congolaises et des enfants issus de ces mariages (…) nous comprenons le souhait ardent que nous avons tous de retrouver vite la paix à l'est. Les deux parties prenantes (Etat congolais et Monusco ndlr) doivent de nouveau s'asseoir autour de la question tout en impliquant toutes les couches de la population du grand Kivu dans l'évolution de ce retrait que nous voulons responsable car la Monusco doit partir de manière responsable pour ne pas partir et revenir de nouveau en urgence".
Par ailleurs, les activistes ont insisté sur le fait qu’il est temps pour l'Etat Congolais d’assurer la sécurité de son peuple sur toute l'étendue du territoire.
Prisca Lokale