Hypertension en RDC : se faire dépister, utiliser des huiles sans cholestérols, respecter son traitement, les conseils du Dr Félix Tshikangu

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Médecin interniste aux Cliniques Universitaires de Kinshasa, Félix Tshikangu exerce depuis près de 5 ans dans différents hôpitaux de Kinshasa dans le cadre du partenariat avec le CUK. Dans un entretien accordé au Desk Femme, il revient sur les principales causes ainsi que la prise en charge médicale de l’hypertension artérielle.

Bonjour Docteur et merci de nous accorder de votre temps. Qu’appelle-t-on hypertension artérielle ?

Dr Félix Tshikangu : l'hypertension est une élévation des chiffres tensionnels. L'organisme humain est constitué des vaisseaux qui transportent le sang de la périphérie vers le cœur (veines). Il est également constitué d'autres vaisseaux(artères) qui transportent le sang nettoyé, enrichi par l'oxygène, du cœur vers les autres organes tels que le cerveau, les reins, le foie et autres. Lorsqu'il y a augmentation de la pression du sang dans les artères, c'est à ce moment-là que l'on parle de l'hypertension artérielle. En bref, c'est la pression qu'exerce le sang sur la paroi des vaisseaux ou une élévation des chiffres tensionnels au-delà des valeurs normales.

Combien de types d’hypertension existe-t-il et quelles en sont les causes ?

Dr Félix Tshikangu :  il existe deux types d'hypertension artérielle. L'hypertension artérielle essentielle, qui est généralement sans causes et c'est la forme la plus fréquente dans le monde et en République Démocratique du Congo. Il existe ensuite l'hypertension artérielle secondaire qui dérive d’une autre pathologie. C’est-à-dire qu’elle peut dériver des causes rénales (concerne les vaisseaux rénaux), des causes endocriniennes (phéochromocytome), plusieurs tumeurs font en sorte que certaines hormones qui favorisent l’hypertension artérielle soient sécrétées à l’excès. En dehors de cela, l’hypertension peut être dûe à la prise de certains médicaments tels que les neuroleptiques ou à l’atteinte des certains organes du corps humain tels que la tyroïde.

Quand peut-on déterminer qu’une personne est hypertendue ?

Dr Félix Tshikangu : de manière générale, l’hypertension est asymptomatique. Il n’y a pas de signes. On découvre cette maladie à la suite des complications. Il peut s’agir d’un accident vasculaire cérébral (AVC), de l’insuffisance rénale, de la perte de vue, et autres maladies ou après un check-up. Il y a aussi des personnes qui ressentent des vertiges, des flous visuels, des céphalées et se rendent à l’hôpital pour un diagnostic. Sur base d’une classification chimique, on peut déterminer qu’il s’agit de l’hypertension artérielle sévère, une augmentation des chiffres tensionnels, mais il n’y a pas l’atteinte d’un organe, au contraire, une urgence hypertensive. Pour poser le diagnostic, le malade peut faire l’automesure de la tension artérielle à la maison. Certains malades peuvent subir une augmentation à cause d’un rendez-vous médical. Cela est dû au stress. Nous recommandons aux personnes de se reposer au moins 10 minutes avant le prélèvement de la tension. On peut utiliser le tensiomètre ou la MAPA (mesure ambulatoire de la pression artérielle) qui est placée sur le malade pendant son sommeil ou pendant 24 heures.

Comment et combien de temps dure le traitement de l’hypertension artérielle ?

Félix Tshikangu : le traitement de l’hypertension artérielle se fait sous trois volets selon le type auquel on est confronté. Le premier, c’est dans la prise en compte des mesures hygiéno-diététiques (restriction ou diminution de sel dans les repas. Les exercices physiques tels que la nage, rouler à vélo, éviter des aliments gras et l’huile à base de cholestérol, évitez le tabac, l’alcool…). Étant une maladie chronique, le traitement peut se faire à vie. L’hypertendue va être orientée vers les médicaments. Pour d’autres causes secondaires, il va falloir passer par une chirurgie pour enlever par exemple la tumeur au niveau des reins.

Pourquoi associe-t-on souvent l’hypertension au diabète ?

Félix Tshikangu : pour soigner l’hypertension artérielle essentielle, on recherche les facteurs de risque. Il y a notamment le fait que les lipides soient déposés au niveau des artères et diminuent les calibres par lesquels passe le sang. Ce qui pousse l’organisme à augmenter la tension artérielle pour permettre au sang de passer par la force.  Cette réaction s’appelle « Athérosclérose ». Et le diabète favorise la survenue de cette réaction. Mais il n’y a pas de lien direct entre l’hypertension et le diabète.

Quelles sont ces habitudes à adopter pour prévenir l’hypertension ?

Félix Tshikangu : généralement, les huiles sans cholestérols coûtent chères. Et les gens préfèrent acheter celles qui coûtent moins chères ne sachant pas que cela augmente la graisse dans l'organisme et créent un environnement propice à l’hypertension. Certains malades soumis aux médicaments, arrêtent de les prendre après une stabilisation éphémère de la tension. C’est une erreur. Privilégier les huiles sans cholestérols, continuez le traitement, car une séance de dialyse coûte 190 $ à Kinshasa. Manger aussi des légumes. 

Peut-on guérir de cette maladie à l’aide des plantes naturelles ?

Félix Tshikangu : il y a une migration du point de vue alimentaire en RDC. C’est l’une des raisons qui favorisent l’hypertension. Mais il faut aussi savoir que les plantes médicinales sont par moment des couteaux à double tranchants. C’est-à-dire que les plantes qui nous sont vendues ne passent pas souvent par des essais pour déterminer le type d’organisme humain qui lui est adapté. On ne détermine pas de doses également. Les reins et le foie sont des organes très capricieux. Une consommation non sécurisée peut entraîner des insuffisances rénales, qui à leur tour favorisent l’hypertension artérielle. Nous recommandons de manger ou d'utiliser des légumes reconnus. 

Vos recommandations à la population congolaise ?

Félix Tshikangu : le dépistage de l’hypertension artérielle peut se faire plus tôt que l’âge reconnu, 40 ans. Nous avons aujourd’hui des jeunes qui souffrent de l’hypertension artérielle qui est souvent de cause secondaire. Nous recevons en moyenne 30 % de jeunes de 20 à 26 ans sous urgence hypertensive. Aux femmes enceintes de suivre régulièrement leurs consultations prénatales (CPN), aux personnes en surpoids et aux personnes hypertendues de faire le check-up de façon régulière. Aux personnes avancées de le faire aussi. Il faut également faire de l'exercice physique.

Propos recueillis par Prisca Lokale