Selon un rapport de l’UNESCO, seuls 35% d'étudiantes dans le monde évoluent dans les domaines liés aux STEM (Sciences, Technologie, Ingénierie et Mathématiques). En RDC particulièrement, les jeunes filles sont moins nombreuses à s’orienter vers ces options. Qu’est-ce qui justifie cette sous-représentation ? De quoi ont-elles peur ? Des Kinoises ont avancé quelques raisons.
« Pour choisir une option liée aux STEM, il faut être assez fort en Mathématiques, maitriser le dessin scientifique, et surtout, beaucoup réfléchir. Ce sont à la limite, des compétences obligatoires avant de s’engager. Quand une fille reconnait qu’elle n’a pas ces compétences, pourquoi se compliquerait-elle la vie ? » s’interroge Chancelvie Kuediatuka, actuellement en sixième année sociale au Lycée Tobongisa dans la commune de Ngaliema. Didiane Nguma, sa condisciple, soutient la même hypothèse en précisant que selon elle, « les autres domaines tels que la littéraire, les sciences sociales, la pédagogie n’exigent pas des nombreuses heures de pratique comme dans les sciences. »
Soraya Ndelela, est actuellement pré-finaliste en Math-Physique à l’Institut Bukama à Lingwala. Elle par contre, estime que son choix vers cette option a été motivé par ses compétences en mathématiques.
« En quatrième année, nous étions 40 élèves en classe. 19 étaient des filles. Je suis forte en calcul, je me débrouille assez bien en dessin scientifique. Et si j’ai choisi de faire la Math-physique, c’est parce que je voudrais devenir médecin. J’irais m’inscrire dans une faculté de médecine pour pouvoir réaliser mon rêve après le diplôme d’Etat» explique la jeune femme.
Préjugés, absence des rôles modèles et d’un environnement adapté
Plus jeune, Christelle Iboto, avait appris que les options scientifiques n’étaient pas destinées aux filles. « Et comme régulièrement ma côte la plus élevée était plus ou moins 19/50 dans les cours liés aux Maths,» précise-t-elle, «je me suis décidée de faire la coupe et couture. J’ai obtenu mon diplôme d’Etat il y a deux ans et je m’en sors très bien. » La jeune femme a étudié à l’institut Iyembe en territoire d’Oshwe dans la province de Mai-Ndombe.
« La jeune fille congolaise a constamment besoin de repère », souligne L’or Mubera, vendeuse des légumes. En effet, explique-t-elle, « voir une jeune femme évoluer dans le secteur des STEM relève de l’exception. La plupart des professeurs dispensant les cours comme la physique, les Maths sont des hommes. Les grands techniciens, les ministres occupant des postes d’économie ou de finance sont également des hommes. Rares seront les filles qui voudront recopier ces modèles.»
En dehors des raisons soulevées par les précédentes jeunes femmes, Agnès Mbuyi, pense que le plus grand défi pour les femmes est de trouver un environnement favorable à leur apprentissage dans les STEM.
« Il n’y a pas suffisamment des métiers liés aux STEM en RDC. Quand on choisit une option dans son cursus scolaire, l’objectif est, au-delà de se rendre utile à la société, de trouver un emploi qui soit rentable. On peut s’engager dans les nouvelles technologies de l’information et de la communication, mais quand on sait que les laboratoires de nos écoles et universités ne sont pas suffisamment équipés, quand on sait que la connexion internet n’est pas assez bonne, quand on sait que l’on ne pourra pas se développer au même niveau que les autres étudiants du monde et que le secteur de l’emploi est encore pénible, à quoi bon poursuivre ses études ? On abandonne » a-t-elle soutenu.
Pour rappel, en avril dernier, lors de la célébration de la Journée internationale des jeunes filles dans le secteur des TIC, ONU Femmes avait souligné dans une déclaration, que la prochaine génération aura besoin des compétences en STEAM (sciences, technologie, ingénierie, arts et mathématiques) pour être mieux préparée à utiliser l'intelligence artificielle, la robotique avancée et l'impression 3D et à cultiver les compétences essentielles du 21ème siècle.
Prisca Lokale