RDC : « l’exploitation minière a affaibli la femme», Patricia Kasala 

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Le gouvernement Sama Lukonde a été investi ce 26 avril. Alors que les cérémonies de remise et reprise se tiennent en ce moment dans la capitale, des femmes évoluant dans le secteur minier dans la province du Haut Katanga dressent quelques recommandations à l’égard de la nouvelle ministre Antoinette N’samba. Patricia Kashala Tshikomb, membre de Premi Congo, une ONG locale propose des pistes de solution pour améliorer les conditions de ces femmes.

« Le secteur artisanal est le secteur le plus dangereux pour la femme, » souligne Mme Kashala Tshikomb. Cela va faire quatre ans qu'elle travaille dans ce milieu. 

« Lors de mes descentes sur terrain à Kambove, j’ai réalisé que ces femmes travaillent sans équipements. Elles entrent, par exemple, pieds et mains nus dans les eaux usées (utilisées par les entreprises, contenant des acides et d'autres produits toxiques) pour nettoyer les minerais parce qu’elles s’occupent essentiellement du lavage. Les femmes sont exposées à ces matériaux à longueur de journée. Sur le plan gynécologique, nous avons constaté que les mines sont à la base des malformations congénitales, de la perturbation des périodes menstruelles, des douleurs abdominales (...) Nous avons établi une longue liste des plaintes. Sur le plan économique, la femme qui ramasse les minerais et les nettoie ne gagne pas assez par rapport aux négociants. Les minerais sont vendus à un cout très réduit sur le site et plus cher en dehors du site (par ceux qui vont les revendre). Elle fait un travail très pénible mais n’en tire pas de grands bénéfices. Ce qui oblige parfois ces femmes à y amener les enfants,» confie Mme Kashala Tshikomb.

La question de représentativité des femmes dans les entreprises minières

Si la sécurité, la protection et la rémunération des femmes dans le domaine artisanal peinent à être garanties, dans les entreprises par contre, la réalité est différente, fait savoir Patricia Kashala Tshikomb. Cependant elle ajoute que ces femmes rencontrent un nouveau défi: celui d'occuper des postes de prise des décisions.

« Il y a un problème de représentativité. Le concept de la parité est loin d’être vraiment appliqué dans ce secteur. Les femmes sont très souvent reléguées à des fonctions de rôle inférieur (nettoyage, secrétariat etc). Elles ne sont pas très présentes dans ces postes qui garantissent la prise des décisions et un revenu assez acceptable ». 

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« L’exploitation minière a affaiblit la femme sous divers aspects » 

En outre, les femmes qui habitent dans les communautés environnantes des zones minières se plaignent de la pollution de l'air, du sol et de l'eau. Ces femmes dont la plupart pratiquent des activités champêtres, sont souvent obligées d’abandonner leurs champs  lorsque des tiers viennent acheter des lopins  de terre. « Il faut dire que l’exploitation minière a affaiblit la femme sous divers aspects », souligne-t-elle. 

Patricia Kashala a par ailleurs adressé des recommandations, notamment sur la redevance minière. « Nous voulons que dans les communautés, les femmes puissent bénéficier des revenus de l’exploitation minière parce qu’elles en subissent les impacts. La nouvelle loi de 2018 est venue améliorer beaucoup de choses notamment, la redevance minière qui reconnait clairement que les grandes compagnies doivent verser des dotations aux collectivités locales, afin d'aider les régions où elles opèrent à se développer. Malheureusement, les autorités et autres institutions se disputent régulièrement cette enveloppe, enfin des comptes, les communautés n’en bénéficient pas. Nous attendons de Madame Antoinette N’samba, qu’elle puisse inculquer le bon fonctionnement des institutions » a-t-elle conclu.

Prisca Lokale