Fizi-Uvira-Mwenga : la communauté babembe salue la tenue du dialogue intercommunautaire mais interpelle les autorités sur les désertions des officiers banyamulenge

La carte du territoire de Fizi

Le dialogue intercommunautaire sur la situation sécuritaire dans les hauts et moyens plateaux de Fizi, Uvira et Mwenga (Itombwe) s’est clôturé mercredi 31 mars à Kinshasa. Les participants qui représentaient les différentes communautés de la région ont donné leurs avis. Le professeur Sadiki Byombuka, un des délégués de la communauté bembe a salué la tenue de ces assises qui d'après lui, ont permis d'échanger sur les problèmes qui rongent la région.

Il est revenu sur l’épineuse question de la commune de Minembwe qu’il souhaite voir être supprimée.

« Globalement, je suis satisfait du fait que le dialogue nous a permis d'échanger avec les autres communautés paisiblement, calmement sans pression et nous avons échangé mais comme vous avez remarqué le dialogue est un processus, la paix est un processus. Il y a toujours des points de divergences qui sont restés mais les points de convergences nous encouragent déjà. Par exemple, entre nous et les Banyamulenge nous pouvons toujours continuer à accélérer le processus de cohésion mais nous avons une grande divergence, par exemple pour notre communauté, la création frauduleuse de la commune de Minembwe qui avait été longtemps débattu au niveau national à l'assemblée nationale. Nous attendons que l'on supprime cette commune parce que c'est le début de la balkanisation. Pour les amis, eux qui trouvent un intérêt dans ce début de balkanisation veulent que ça reste. Donc des points des divergences comme cela nous attendons que l'État s'implique pour éviter de créer des entités problématiques qui empiète le pouvoir local mais aussi qui ouvre les voies à des infiltrations en provenance du Rwanda et du Burundi », a-t-il expliqué à ACTUALITÉ.CD à l'issue des assises de trois jours.

Et d'ajouter : « Pour les autres questions internes, par exemple le désenclavement, la cohabitation, nous sommes vraiment contents du fait que ça avance mais l'État a encore son travail à faire, nous attendons encore beaucoup ».

La communauté babembe exprime cependant sa crainte face aux désertions des officiers de l’armée membre de la communauté banyamulenge qui ont rejoint le maquis dans les hauts et moyens plateaux.

« Les tensions persistent, et les tensions vont toujours persister. Pourquoi ? Parce que des grands officiers de l'armée congolaise sont en train de déserter. On n'a pas parlé ici de rébellion. Le colonel Makanika de la communauté des Banyamulenges, le colonel commandant régiment Charles Sematama qui a déserté il y a un mois avec armes et munitions. Il y a des choses qu'on ne se dit pas ici clairement, nous disons des choses intercommunautaires. Quand les officiers d'une tribu ou d'une communauté qui a des origines rwandaises quittent l'armée nationale et rejoignent un mouvement rebelle, vous pensez que les tensions vont baisser ? », s'est-il interrogé.

Et de poursuivre : « Ça on n’a pas dit, il y a un langage diplomatique officiel où on privilégie les communautés mais on oublie de dire qu'il y a un mouvement de rébellion qui se fait et quand ça sera devenu une grande rébellion qui va marcher sur Kinshasa, c'est alors qu'on va se réveiller ? La désertion continue des officiers banyamulenge, c'est un danger national et donc ça va encore alimenter les tensions ».

Le professeur Sadiki Byombuka conclut que les banyamulenge ne sont pas sincères.

« La communauté banyamulenge n'est pas sincère, vous avez vu l'actuel ministre de la décentralisation, il était allé installer anarchiquement et frauduleusement Minembwe, vous avez suivi tous les débats au niveau de l'assemblée nationale. Pourquoi les gens se sont réveillés, il n'y a pas de sincérité, les tireurs des ficelles, nous disons à l'État comment il faut mettre dans les institutions les gens qui alimentent de telles choses, voilà le nœud du problème mais ça publiquement on en parle pas, on passe au-dessus, on dit que les communautés se sont entendues, ça c'est juste pour amuser mais le fond du problème est là, c'est le mouvement de désertion des officiers Banyamulenge en connivence avec le Rwanda et le Burundi, c'est du feu et ça se trouve encore là », a-t-il lancé sous forme d'interpellation aux autorités compétentes.

Au lancement du dialogue de Kinshasa lundi, les facilitateurs tout comme les délégués ont reconnu que plusieurs assises ont été organisées dans le passé mais n’ont jamais apporté des solutions aux conflits persistants dans cette partie du pays. Bahati Lukwebo, président du Sénat a déploré le manque de sincérité entre les communautés locales.  

Ce dialogue est censé aplanir les divergences entre les communautés des hauts et moyens plateaux de Fizi, Uvira et Mwenga (Itombwe) qui sont déchirées par les violences suite à l’activisme des groupes armés à caractère tribal. Ces forces négatives communautaires défendent également des villages et des terres. Malgré plusieurs opérations menées par l’armée dans la région, les violences persistent. Plusieurs sources ont signalé ces dernières semaines, des mouvements d’hommes armés en provenance de la plaine de la Ruzizi vers les hauts et les moyens plateaux. L’armée et le gouvernement provincial du Sud-Kivu disent être au courant de ces mouvements. Plusieurs sources citent des hommes provenant de pays étrangers.

Clément Muamba