Le récent rapport de l’Organisation des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) en partenariat avec la Cellule d’Analyse en Sciences Sociales (CASS) révèle un accroissement du nombre des filles qui se sont engagées dans des relations sexuelles transactionnelles entre avril et décembre 2020 , période impactée par la Covid-19.
Le 24 mars 2020, le Chef de l’Etat, Félix Tshisekedi avait décrété l’état d’urgence sanitaire. En conséquence, toutes les écoles et universités ont fermé leurs portes. Au cours de cette période, indique le rapport, les adolescent.e.s qui ne disposaient pas de structure et d’espace de sécurité qu'offre l'école, sont devenus plus susceptibles de se livrer à des activités sexuelles, notamment des rapports sexuels transactionnels et relevant de l’exploitation.
Selon le Guide de Terminologie pour la Protection des Enfants contre l’Exploitation et l’Abus Sexuels, la relation sexuelle transactionnelle ou le « sexe transactionnel » est décrit comme une relation marchande au cours de laquelle des actes sexuels sont échangés contre des biens, de l’argent ou des avantages liés notamment à la survie économique.
Le rapport CASS précise que les familles avaient une capacité réduite à soutenir leurs filles financièrement. Il indique aussi que certain.e.s enseignant.e.s du secondaire ont déclaré que le nombre de filles de 12 à 17 ans fréquentant l'école avait diminué, Rapport REACH (Sud-Kivu). La principale raison évoquée par les filles âgées de 12 à 17 ans est qu'elles ont été mariées pendant la période de fermeture des écoles.
Ainsi, la CASS dresse quelques recommandations à l’égard des autorités congolaises ainsi que des Associations et ONG traitant des questions de droits de l’Homme en général, des femmes et enfants en particulier.
Au sujet de la fermeture des écoles, il faudrait mettre en place des structures de soutien alternatives pour les adolescentes qui n'ont pas accès à l'école, des centres conviviaux pour les adolescent.e. s (sur le modèle Espace Amis des Enfants) qui donnent accès à des informations sur la santé sexuelle et reproductive, à des services de planning familial en lien avec des associations de la société civile.
Plaider en faveur d'un enseignement secondaire gratuit ou fortement subventionné, en veillant à ce que les enseignant.e. s et les écoles soient financés de manière appropriée pour garantir le maintien de la qualité (la gratuité de l’enseignement primaire dans certaines écoles publiques décrétée en septembre 2019).
Inciter les familles pauvres à renvoyer leurs filles à l'école, en mettant en avant les bénéfices pour la santé des filles, de leurs futurs enfants et pour le développement économique du ménage.
Soutenir la fourniture des repas scolaires gratuits pour les enfants qui retournent à l'école afin de soulager les familles d'un certain nombre de contraintes financières.
Renforcer les programmes d’apprentissage technique (menuiserie, mécanique, etc.), pour les jeunes, en intégrant fortement les filles et jeunes femmes.
En ce qui concerne la violence sexuelle et sexiste, il faudra établir et renforcer les stratégies d'engagement communautaire pour promouvoir et faciliter l'accès rapide aux soins pour les survivants de la violence sexuelle (<72 heures).
Mettre en place des mécanismes de signalement des cas de VSS (Violence sexuelle sexiste) adaptés au contexte, en tenant compte des méthodes de communication préférées et accessibles aux différents groupes cibles.
Soutenir les programmes locaux de la société civile qui s'adressent aux communautés autour du thème de VSS afin d'établir et de renforcer les mécanismes de surveillance communautaire.
Faciliter l'accès au soutien médical pour les survivant.e.s de VSS, en garantissant des soins confidentiels, dispensés par un personnel spécialement formé à la prestation de soins dans le cadre des VSS.
Renforcer la formation du personnel de santé sur la détection, la prise en charge, le référencement des violences sexuelles et sexistes et sur leur rôle de sensibilisation auprès de leurs patients (hommes et femmes).
Pour rappel, l’objectif de cette étude est de fournir des preuves pour soutenir la prise de décision pour les stratégies de réponse à l’épidémie, afin de garantir que la santé et la sécurité des femmes et des filles soient prioritaires.
Le rapport de cette étude a été présenté le 27 janvier au siège de Afia Mama, une association sans but lucratif qui fait la promotion et la protection des droits humains y compris les Droits en Santé Sexuelle et Reproductive. Elle est dirigée par Madame Anny Modi.
Prisca Lokale