RDC : Ces comportements qui risquent de provoquer une nouvelle flambée d’Ebola à Butembo

Vue aérienne de Butembo, en République démocratique du Congo. Le 19 avril 2019

Depuis trois semaines maintenant, la ville de Butembo (Nord-Kivu) connait la résurgence de la maladie à virus Ebola, près de 56 jours après qu’aucun cas n’a été notifié.   Jusque samedi 4 janvier, la coordination stratégique de la riposte contre la maladie à virus Ebola disait avoir enregistré 10 cas positifs d’Ebola à Butembo, notamment dans les zones de santé de Katwa et de Butembo.

Dimanche 5 janvier, au cours d’une conférence de presse de la coordination de la riposte de Butembo, le représentant de  l’Organisation mondiale de la santé (OMS), le docteur Aboubacar Diallo, a révélé que ces nouveaux cas notifiés sont liés à une personne venue de Mabalako, où il avait été identifié comme contact d’un cas confirmé, mais qui n’avait pas été assidu au suivi pendant 21 jours exigés. Malgré que des cas viennent d’autres zones, Butembo demeure vulnérable aussi bien suite aux comportements déconseillés de certains de ses habitants et prestataires de soins.

Après plus de 42 jours sans cas, les habitants se sont risqués avec les vieilles habitudes.

Butembo et Katwa avaient déjà dépassé le nombre de jours pour déclarer la fin de l’épidémie dans chacune de ces zones de santé, mais comme dans les environs, la maladie y sévissait encore, les autorités sanitaires avaient décidé de maintenir ces deux zones sous surveillance. Si ces deux zones de Butembo ne connaissaient plus des nouveaux cas, c’est aussi bien grâce à l’engagement des communautés.

D’ailleurs, en visite à Butembo, l’archevêque de Kinshasa, le cardinal Fridolin Ambongo, a félicité les habitants du diocèse de Butembo-Beni d’avoir respecté les mesures d’hygiènes et de précautions recommandées, telles que se laver les mains, dans le cadre de se prévenir contre Ebola.

« On peut avoir tous les médicaments qu’on veut, mais le premier moyen pour se débarrasser d’Ebola, ce n’est pas tellement les médicaments, la vaccination, mais le premier moyen c’est notre comportement, nous devons adopter un comportement responsable», prévenait le primat.

Plus de 42 jours sans nouveau cas, les habitants se sont risqués avec les vieilles habitudes : se saluer des mains à mains notamment.

« La population a semblé baisser les bras. Les gens commencent à oublier que l’on doit observer les mesures d’hygiènes », s’inquiétait, au micro d’ACTUALITE.CD, Sylvain Kanyamanda, maire de Butembo.

Un problème de confiance persistant dans certains endroits

Un agent de l’OMS a aussi évoqué la persistance d’une crise de confiance de certains habitants vis-à-vis des équipes de riposte.

« Dans certaines cellules de Butembo, certains contacts ne veulent pas se faire identifier, d’autres cachent ou communiquent des mauvais noms pour compliquer le suivi», ont dénoncé les animateurs de la coordination stratégique de la riposte. Depuis la résurgence d’Ebola à Butembo, plus de 150 contacts sont perdus de vue.

La malhonnêteté des prestataires de soins

La coordination a aussi dénoncé le comportement de certains responsables des structures sanitaires qui ne veulent pas coopérer avec les équipes de la riposte, en vue de s’attirer des «patients-clients».

Stratégie de séduction des patients ? Ces prestataires de soins s’abstiennent d’installer, à l’entrée de leurs structures, des kits de lavage de mains.

Car, c’est à partir de ces kits que certains patients qui veulent échapper la surveillance des équipes de riposte se rassurent qu’une structure sanitaire coopère ou pas avec la riposte.

« La population s’arrange à identifier les structures sanitaires qui ne collaborent pas avec la riposte», regrette un membre de la coordination.

Pour gagner l’argent de leurs «patients-clients» qui veulent se soustraire de la surveillance, d’ «autres prestataires de soins vont jusqu’à proposer des consultations à domicile», a dénoncé la coordination stratégique de la riposte de Butembo.

« De fois, quand nos équipes passent dans certaines structures sanitaires, vers 8h, elles ne retrouvent pas des patients, parce que certains prestataires les internent vers 20h et les libèrent vers 6h» pour les faire échapper à la surveillance, a dénoncé un membre de la coordination. Pour lui, cette attitude malhonnête complique l’identification et le suivi des contacts. Elle représente un danger de propagation.

Appel à la coopération

L’épidémie étant de retour à Butembo, la coordination appelle les habitants à la vigilance et à la coopération. Pour le Docteur Atibasay Jean Paul, coordonnateur intérimaire de la riposte à Butembo, cette coopération permettra  aux équipes de riposte d’identifier les contacts liés aux nouveaux cas d’Ebola, et de couper, par conséquent, la chaine de contamination.+

« Des contacts identifiés doivent être assidus au suivi pendant 21 jours», a-t-il conseillé.

Cet expert du ministère de la santé publique a aussi appelé les habitants à dénoncer tous ces prestataires de soins qui ne collaborent pas avec les équipes de riposte et qui vont jusqu’à proposer des soins à domicile. Car, interpelle-t-il, cela présente un danger.

Claude Sengenya