Depuis l’éclatement au grand jour du scandale de l’insolvabilité délibérée dans le chef de quelques gros débiteurs du Fonds de Promotion de l’Industrie (FPI) qui met en cause certains acteurs politiques congolais, deux camps s’affrontent au plus haut niveau de l’Etat au sujet de ce dossier légué à la nouvelle équipe dirigeante de cette entité par Constantin Mbengele : D’une part des « faucons » déterminés à préserver leurs intérêts personnels, peu importe les moyens pour ce faire, et de l’autre, le camp ceux des responsables qui tiennent encore à sauver les Intérêts Nationaux portés par cet établissement public, ou ce qu’il en reste.
A l’évidence, les insolvables ne s’avouent pas vaincus. Ils ne tarissent pas d’imagination pour tourner désormais en dérision la moindre initiative susceptible de redorer le blason du FPI. Pourtant, rien ne devrait logiquement opposer les décideurs congolais dans cette affaire ni même, dans une certaine mesure, ceux des étrangers qui ont choisi notre pays comme seconde patrie y trouvent leur compte : le fonds est d’un apport plus que significatif de ce catalyseur de l’industrialisation indispensable de la RDC dont les uns et les autres ne peuvent se passer. En témoignent ses nombreuses réalisations à travers le pays qui sont souvent noyées dans le flot de ce qu’il faut bien considérer comme des turpitudes politiciennes.
Pour rappel, le FPI est la seule structure créée par l’Etat pour financer le développement industriel de la République Démocratique du Congo. Une action prémonitoire de la part du Gouvernement en ce qu’à l’avènement du FPI voici près de trois décennies, l’on n’était loin de s’imaginer que quelques années plus tard, les Chefs d’Etats et des Gouvernements d’organisations régionales comme le COMESA, les Etats d’Afrique Centrale ou la SADC auxquelles appartient la RDC engageraient instamment leurs membres à recourir notamment à leurs fonds de retraite ou de pension et à se doter d’un fonds dans l’objectif de financer leur développement industriel.
On rappellera à cet égard que l’appartenance de la RDC à la Zone de Libre Echange du COMESA induit l’ouverture de son Marché aux produits de la sous-région. Conséquence : sans un organisme de financement de la production locale à des conditions préférentielles, la compétitivité des produits congolais sera nulle et notre pays se transformerait en un immense déversoir des produits régionaux. A titre illustratif, on peut citer l’implantation à Brazzaville il y a peu de<em> Dangote Cement</em>, une grande cimenterie dont l’ambition déclarée est d’exporter le surplus de sa production notamment vers… la RDC. C’est aussi le cas d’un certain nombre de produits manufacturés <em>made in Ouganda</em> qui sont d’ores et déjà consommés dans la quasi-totalité de la partie Nord-Est du Congo-Kinshasa.
Ceux des décideurs qui se permettent de torpiller le FPI font courir à la RD Congo le risque de devenir à la longue un simple marché de consommation pour la production des nombreux pays africains qui l’entourent et du reste de la planète.
A la différence des autres institutions financières comme les banques commerciales qui dans leurs interventions visent prioritairement le profit et ne participent que de manière marginale au financement des investissements à long terme, le FPI assure la prise en charge des infrastructures et de la recherche appliquée en vue de relancer la production industrielle. Il accorde des subventions, et a mis en place le développement et financement des chaînes des valeurs suivant les orientations des pouvoirs publics, conformément aux priorités définies par le gouvernement, tout en privilégiant l’appui aux jeunes entrepreneurs, au moyen des incubateurs comme les <em>start-up</em>.
La disparition du Fonds de Promotion de l’Industrie est, à cet égard, contraire à l’intérêt national de la RDC. C’est malheureusement ce qui transparaît en filigrane de la stratégie de la transformation pure et simple de cet établissement public en une banque de développement annoncée par le Gouvernement de la République parmi les 28 mesures urgentes de remise sur les rails de l’économie nationale. Pareille mesure serait de nature à anéantir tout essor industriel d’un pays comme la RDC qui devrait, au contraire s’impliquer dans la voie de la promotion des initiatives nationales d’industrialisation pour soutenir son émergence dans un délai prévisible.
Il est certes légitime de mettre le FPI à contribution pour participer à la création d’une banque de développement et des investissements mais il n’est paraît guère avisé pour le gouvernement de se priver de cet outil dont la flexibilité lui permet de réaliser au moindre coût des projets qui le propulsent vers l’émergence ainsi que l’a démontré sa contribution à la naissance de notre compagnie aérienne nationale <em>Congo Airways</em>.
« <em>La création d’une banque requiert plusieurs paramètres notamment d’ordre financier que par ces temps de vaches maigres, l’Etat n’est pas en mesure, sauf miracle, de réaliser, notamment une capitalisation obligatoire 30 millions de dollars </em>» selon les estimations d’un spécialiste en finances publiques contactés par nos rédactions. Le diable loge dans les détails dit-on ! Les lobbyistes qui remuent ciel et terre pour la disparition pure et simple du FPI paraissent sont uniquement mus par des intérêts particuliers de ceux qui, dans la sphère décisionnelle publique, ont dépouillé cet établissement public de la bagatelle de 162.000.000 de dollars US de prêts qu’ils ne veulent – ou ne peuvent - plus rembourser et sans avoir posé la moindre pierre d’un projet industriel visible. Aussi tentent-ils en faisant disparaître le fonds, envoyer leurs créances à la poubelle pour ainsi s’assurer de ne jamais rembourser ces créances qu’ils lui doivent en multipliant des stratagèmes. Les autorités gouvernementales devraient ouvrir l’œil, et le bon, dans ce dossier sulfureux car rien, en l’état actuel de la situation de la RD Congo, ne saurait justifier cette démarche pour qui a à cœur le devenir industriel du pays.
Cette tentative de faire disparaître le FPI (même sous le couvert d’une transformation en banque de développement ou d’investissement) rappelle étrangement une autre survenue sous la deuxième République de Mobutu : celle de l’accaparement sans vergogne des petites et moyennes entreprises des expatriés par les oligarques de l’époque du Parti-Etat. Les conséquences de cette tristement célèbre aventure connue sous l’appellation de « zaïrianisation » a rattrapé notre pays lors de l’atteinte du point d’achèvement de l’initiative PPTE. Lorsque la RD Congo fut sommée par les institutions de Breton Woods de renoncer à une partie du contrat chinois de 9.000.000.000 $ US au motif de contenter les créanciers de notre pays réunis au sein du Club de Paris. Jamais les bénéficiaires de la zaïrianisation, ne serait-ce que par devoir moral, ne se sont excusés auprès des générations actuelles qui ont ainsi fait les frais de ce véritable crime économique commis par les mobutistes.
Aujourd’hui plus que jamais, le Gouvernement de la République et le Parlement ont encore, chacun en ce qui le concerne, la possibilité de faire échec à ce rouleau compresseur lancé contre le Fonds de Promotion de l’Industrie (FPI). Le Gouvernement en renonçant à la fausse idée qu’une banque de développement et d’investissement ne peut être créée que sur les cendres du FPI et le Parlement en examinant les différentes réformes qui lui ont été d’ores et déjà soumises pour (i) la stabilisation de sa ressource ; (ii) la protection de l’institution ; (iii) l’élargissement de l’assiette de perception ; et (iii) l’octroi des moyens de contrainte (à l’instar de ceux dont disposent les régies financières) pour booster le recouvrement des créances du FPI.
Quelques services de l’Etat ont exprimé des appréhensions légitimes en ce qui concerne les quotités qu’ils perçoivent pour leur fonctionnement des fonds alloués à la promotion de l’industrie. Ils devraient raison garder et se garder de ramer avec les créanciers insolvables du FPI car ils sont tous des services publics et que les financement du FPI constituent une ressource pré-affectée qui doit, en tout état de cause, être respectée, en dépit du fait que pour les besoins de son fonctionnement, toute affectation doit être conforme à certaines règles élémentaires et tenir compte des besoins réels desdits services au risque d’amenuiser, voire de paralyser la capacité de financement du FPI. Une affaire à suivre.
Africanews