Consolidation de l’appréciation du franc congolais : « Pas d’inquiétude à se faire pour le futur », rassure André Wameso, qui appelle à épargner et consommer en monnaie nationale

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L’appréciation continue du franc congolais (CDF) s’est invitée au débat à l’Assemblée nationale, à la suite d’une question d’actualité initiée par le député John Efambe Ekamba (MLC). Alors que le paysage économique en RDC reste marqué par la hausse de la valeur du franc congolais, sa stabilisation durable suscite des interrogations, certains craignant que cette embellie ne soit que temporaire.

Devant la représentation nationale jeudi 6 novembre 2025, le gouverneur de la Banque Centrale du Congo (BCC), André Wameso, a tenu à rassurer. Il a rappelé la place centrale du franc congolais dans le dispositif légal et réglementaire.

"L’article 1er de la Constitution consacre le franc congolais comme monnaie nationale, et la réglementation de change stipule que les transactions doivent se dénouer en monnaie nationale, sauf accord contraire entre les parties", a-t-il déclaré. 

Une appréciation soutenue par des mesures monétaires 

André Wameso a expliqué que l’appréciation du franc congolais résulte de "l’actualisation du taux de change appliqué au stock de la réserve obligatoire, cristallisée en monnaie nationale", une mesure qui a permis de retirer les excédents de liquidités à l’origine des pressions sur le marché de change. Concernant la stabilité actuelle, il a précisé :

"Cela fait presque trois semaines que le franc congolais est stable autour de 2 200 à 2 300 CDF pour 1 USD. Il n’y a donc pas d’inquiétude à se faire pour le futur. La Banque centrale dispose de tous les instruments nécessaires pour réagir en cas de besoin".

Le gouverneur de la BCC a détaillé le mécanisme ayant conduit à cette stabilité: "En septembre, nous avons procédé à une ponction de 370 milliards de francs congolais. Cela a coïncidé avec la période de l'échéance fiscale, durant laquelle les entreprises recherchent des francs pour s’acquitter de leurs impôts. Ce retrait massif de liquidités a provoqué un excédent de dollars et donc une baisse du taux de change". 

Il a également évoqué l’effet anticipatif des banques, qui ont acheté du franc congolais à un taux avantageux pour réajuster leurs réserves, accentuant encore l’appréciation de la monnaie nationale.

Appel à un changement de comportement économique

S’agissant des perspectives, André Wameso a insisté sur la responsabilité collective dans la consolidation de cette stabilité :

"Ce n’est pas seulement un effort de la Banque centrale, mais aussi du gouvernement et des citoyens. Nous devons épargner et consommer en franc congolais", a recommandé Wameso.

Le gouverneur a regretté que la majorité des congolais préfèrent encore épargner en dollars, alors que le rendement des dépôts à terme (DAT) en franc congolais est bien supérieur

"Le DAT en dollars rapporte entre 4 et 5 %, alors qu’en franc congolais, il peut atteindre 13 %. Mais très peu de Congolais, y compris les députés, épargnent dans la monnaie nationale" a-t-il fait savoir.

Il a annoncé que la BCC travaille sur des mécanismes pour protéger l’épargne en franc congolais, tout en collaborant avec le Fonds monétaire international (FMI) afin d’adapter ces mesures au cadre macroéconomique actuel.

"Nous devons aller vers un système où l’on épargne et prête en franc congolais. Cela renforcera la confiance et réduira la spéculation sur le marché de change", a-t-il souligné.

Une psychanalyse collective face au dollar 

Abordant le rapport culturel au dollar, André Wameso a invité à une « psychanalyse collective » : "Nous avons connu deux traumatismes majeurs : l’hyperinflation et la dépréciation continue de notre monnaie. Depuis 1998, le franc congolais n’a fait que se déprécier, ce qui a ancré dans notre subconscient l’idée qu’il ne peut que baisser". 

Selon lui, cette mentalité a conduit une partie de la population à préférer le dollar, tandis que les fonctionnaires, enseignants, policiers et petits commerçants, rémunérés en franc congolais, subissaient de plein fouet les effets de la dépréciation.

"Cette préférence pour le dollar a créé une forme de bulle dans laquelle certains se croyaient protégés, alors que la majorité vivait les conséquences de la faiblesse du franc congolais", a-t-il regretté.

Une stabilité porteuse d’espoir 

Le gouverneur a conclu en exprimant sa confiance dans la trajectoire actuelle : "Certains restent sceptiques, pensant que cette appréciation ne durera pas. Pourtant, cela fait déjà plus de deux mois, et d’ici décembre, nous aurons presque quatre mois de stabilité. Cette dynamique permettra d’encourager l’épargne et le crédit en monnaie nationale, tout en asséchant les excédents de liquidités sources de spéculation".

Clément MUAMBA