Football féminin africain : « Représenter la RDC à la CAN féminine 2025 est un honneur indescriptible », Mireille Kanjinga, arbitre internationale congolaise

Foto
Mireille Kanjinga, arbitre internationale

Arbitre internationale congolaise assistante élite A, Mireille Kanjinga représentera la République démocratique du Congo à la Coupe d’Afrique des Nations Féminine 2025. Issue d’un parcours atypique, mêlant pratique sportive dès l’enfance et engagement progressif dans l’arbitrage, elle est aujourd’hui la seule Congolaise sélectionnée par la Confédération africaine de football (CAF) pour cette compétition.

Dans cet entretien, elle revient sur son cheminement, ses débuts comme joueuse, sa reconversion vers l’arbitrage, ainsi que les exigences et enjeux liés à son rôle sur la scène continentale. Elle évoque également la pression liée à la représentation nationale, ses méthodes de préparation, et adresse un message aux jeunes filles intéressées par les métiers du sport, notamment dans des secteurs encore peu féminisés.

Merci de nous accorder de votre temps Madame. Pouvez-vous nous parler brièvement de vous et nous raconter votre parcours en tant qu'arbitre ?

Mireille Kanjinga : Je suis née dans une famille sportive : mon père est maître karatéka 3e dan et ma mère fut handballeuse. Dès le bas âge, notre père nous encadrait en arts martiaux. En parallèle, j’ai aussi pratiqué le football, notamment dans les championnats interscolaires où j’ai remporté plusieurs coupes avec mon équipe. Après quelques années de carrière comme joueuse, notamment au sein de l’équipe de DCMP Bikila, j’ai décidé de me reconvertir. 

C’est en arbitrant des matchs de vétérans que j’ai été repérée par des journalistes, puis présentée au président de la commission des arbitres. Il m’a beaucoup soutenue, m’a offert son propre matériel d’arbitrage et m’a donné goût à cette vocation. J’ai commencé par les matchs de l’entente des jeunes de Lubumbashi, avant de réussir les tests MA à Kinshasa. Ensuite, j’ai suivi un séminaire de la CAF au Maroc, et j’ai pu évoluer jusqu’au niveau élite A.

Qu'est-ce que cette sélection par la CAF pour la CAN Féminine 2025 représente pour vous ?

Mireille Kanjinga : C’est une immense fierté. C’est aussi la reconnaissance de tout le travail, les sacrifices et la persévérance que j’ai investis pendant toutes ces années. Représenter mon pays à ce niveau est un honneur indescriptible.

En tant que seule arbitre congolaise sélectionnée pour un événement d'une telle envergure, quel est le poids de cette représentation nationale sur vos épaules ?

Mireille Kanjinga : C’est une grande responsabilité. Je suis consciente que je porte les couleurs de la RDC, mais aussi l’espoir de nombreuses jeunes filles qui me regardent comme un exemple. Cela me pousse à donner le meilleur de moi-même, avec rigueur et humilité.

Ressentez-vous une pression particulière, et comment la gérez-vous ?

Mireille Kanjinga : Oui, la pression est bien réelle, surtout dans des compétitions aussi importantes. Mais je la transforme en motivation. Grâce à mon expérience et à la préparation mentale, j’arrive à la canaliser pour rester concentrée sur mes missions.

La CAN Féminine est une compétition de haut niveau. Comment vous préparez-vous physiquement et mentalement pour ce tournoi ?

Mireille Kanjinga : Je suis un programme rigoureux d’entraînement physique et je participe à des sessions techniques pour réviser les lois du jeu. Sur le plan mental, je travaille avec des coachs et je médite régulièrement. La discipline est essentielle pour rester performante.

Quels sont vos objectifs personnels pour cette Coupe d'Afrique des Nations, et y a-t-il des aspects spécifiques de l'arbitrage féminin que vous anticipez ?

Mireille Kanjinga : Mon principal objectif est d’être à la hauteur de la confiance placée en moi et de contribuer au bon déroulement du tournoi. J’anticipe une grande intensité physique et émotionnelle, mais je suis prête. L’arbitrage féminin évolue, et c’est motivant de faire partie de ce mouvement.

L'arbitrage de haut niveau vient avec son lot de défis. Quels ont été les plus grandes difficultés rencontrées dans votre carrière jusqu'à présent, et comment avez-vous réussi à les surmonter ?

Mireille Kanjinga : Être une femme dans un milieu majoritairement masculin n’a pas été facile. Il a fallu faire mes preuves, souvent deux fois plus que les autres. Mais avec le soutien de certains encadreurs, ma famille, ma foi et beaucoup de résilience, j’ai réussi à surmonter ces obstacles.

Quel rôle joue le soutien de votre entourage ou de vos institutions dans votre progression ?

Mireille Kanjinga : Il est fondamental. Sans le soutien de ma famille, de mes collègues, des responsables techniques et de certaines institutions, je n’en serais pas là aujourd’hui. Ce soutien me donne la force de continuer, même dans les moments les plus difficiles.

Votre parcours est une source d'inspiration pour beaucoup. Quel message aimeriez-vous adresser aux jeunes filles et femmes de la RDC et d'Afrique qui rêvent de devenir arbitres, et plus généralement à celles qui aspirent à briser les barrières dans des domaines traditionnellement masculins ?

Mireille Kanjinga : Je leur dirais : croyez en vous. Le chemin ne sera pas toujours facile, mais il en vaut la peine. Travaillez dur, restez disciplinées et ne laissez personne vous dire que ce n’est pas possible. Il n’y a pas de métier réservé aux hommes. Nous avons notre place partout, y compris dans l’arbitrage international.

Propos recueillis par Nancy Clémence Tshimueneka