Lors de la dernière réunion du conseil des ministres vendredi 31 janvier 2025, Félix Tshisekedi, président de la RDC, a demandé au gouvernement d’accélérer les mesures visant la réduction du train de vie des institutions afin de contribuer aux efforts de la guerre qui prévaut dans l’est du pays. Parmi ces mesures, le gouvernement préconise notamment la suspension de la mécanisation des agents publics de l’Etat, sauf les militaires et les policiers, pour une durée de 12 mois.
Cette situation va permettre au gouvernement d’économiser 27 692 460 USD cette année, qui vont être réaffectés dans le secteur de la défense nationale et de la sécurité.
En effet, selon la loi des finances promulguée en décembre 2024 pour l’exercice 2025 et en vigueur depuis le premier janvier de cette année, le gouvernement avait prévu une somme d’environ 3 620 044 999 USD pour les dépenses de personnel ou de rémunération pour l’année en cours. Autrement dit, le gouvernement devrait dépenser 301 670 416.5 USD par mois pour payer le personnel politique et administratif.
Par ailleurs, le total du personnel pris en charge par le gouvernement devrait atteindre 1 503 275 agents, soit 20 500 personnes supplémentaires que l’Etat devrait mécaniser en 2025 par rapport à l’année précédente, avec un salaire mensuel moyen de 200.67 USD par mois pour un agent. Ainsi, la masse salariale globale pour 20 500 nouvelles personnes qui devraient être mécanisées en 2025 se chiffre à 49 364 820 USD, soit 4 113 735 USD par mois.
Pourtant, la mesure de la suspension de nouvelles mécanisations pour 12 mois, telle que préconisée par le conseil des ministres, exempte les militaires et les policiers. Selon la loi des finances, 9000 nouveaux militaires et policiers devraient être mécanisés durant l’exercice 2025. La moyenne de la masse salariale annuelle de ces 9000 militaires et policiers qui ne sont pas concernés par la mesure de suspension de mécanisation s’élève donc à 21 672 360 USD, soit 1 806 030 USD par mois. Si nous soustrayons 21 672 360 USD qui devraient servir à la mécanisation de 9000 militaires et policiers non concernés par la mesure dans les 49 364 820 USD du montant moyen global pour la prise en charge de 20 500 nouveaux agents qui devraient être mécanisés en 2025, le gouvernement devrait économiser 27 692 460 USD cette année, qui devraient contribuer aux efforts de la guerre.
Comme conséquence, 11 500 agents qui attendaient leur mécanisation en 2025 vont encore devoir attendre.
En RDC, la problématique de réduction du train de vie des institutions n’est pas nouvelle. Les organisations de la société civile ont toujours haussé le ton pour dénoncer cette pratique et appeler les autorités à revoir la cherté de la vie des institutions et de leurs animateurs, qui défavorise d’autres secteurs clés, tels que la défense, l’agriculture, l’éducation et la santé.
En 2023, par exemple, Reged a appelé les autorités à redimensionner la taille des cabinets politiques, des institutions et des ministères, ainsi qu’à réduire les écarts de rémunération des agents publics de l’État, qu’ils soient politiques ou administratifs. Cette structure de la société civile avait également exigé la discipline budgétaire. En 2024, la même organisation de la société civile a révélé que la loi des finances en cours pour l’exercice 2025 avait été élaborée sans tenir compte des éléments du plan de développement pour l’amélioration des conditions de vie.
Dans un contrôle budgétaire réalisé sur le premier quinquennat du chef de l’État Félix Tshisekedi, uniquement sur les données de la Cour des comptes, il ressort des dépassements énormes de crédits alloués aux institutions, entraînant des déficits budgétaires à chaque exercice politique. Par ailleurs, entre 2019 et 2023, la Cour des comptes révèle le surpeuplement dans les institutions, des gratifications démesurées, ainsi que des dépenses importantes dans les institutions, notamment à la présidence, dans les institutions parlementaires, au gouvernement et aux cours et tribunaux.
Pour ce qui est des dépenses pour la défense nationale, le Centre de recherches en finances publiques et développement local (CREFDL) a, dans un communiqué le 24 janvier dernier, appelle le gouvernement de la RDC notamment de déposer urgemment un collectif budgétaire au Parlement, en vue de doubler les crédits alloués à la défense nationale.
Ceci permettra, selon cette structure, à l’armée de se réorganiser pour faire face au M23 et à l’armée rwandaise, qui ont pénétré le territoire congolais dont la ville de Goma.
Bruno Nsaka