Après plusieurs critiques de la société civile et des experts du secteur des hydrocarbures, le gouvernement de la République, dirigé par la Première ministre Judith Suminwa, envisage d'apporter des corrections au processus d'appel d'offres pour 27 blocs pétroliers et 3 blocs gaziers du Lac Kivu.
Lors de la dix-septième réunion du Conseil des ministres, le ministre des Hydrocarbures, Aimé Molendo Sakombi, a présenté une note d'information sollicitant la clôture de ce processus afin de le relancer, tout en évitant les difficultés rencontrées depuis son lancement.
"Il a évoqué la nécessité de clôturer ladite procédure d'appel d'offres en considérant le fait que l'évaluation du processus en cours depuis plus de 26 mois a été caractérisée par plusieurs reports des dates de dépôt et de dépouillement des candidatures pour une procédure qui ne peut dépasser 18 mois. L'arrêt de cette procédure et l'impératif d'en relancer une nouvelle ont l'avantage de permettre au gouvernement de rebondir en évitant les difficultés majeures relevées au regard des préalables à la procédure du déroulement de la procédure, de l'évaluation des candidatures en phase de présélection," rapporte le compte rendu de la réunion tenue vendredi 11 octobre 2024 sous la direction du Président de la République.
Pour mieux relancer ce processus, le ministre des Hydrocarbures a proposé au Conseil des mesures spécifiques.
"Il a égrené les actions urgentes à mener, parmi lesquelles : la signature d'un décret établissant les étapes de la procédure d'appel d'offres restreint pour l'attribution des droits d'hydrocarbures et les délais y relatifs, le redimensionnement des blocs recouvrant les aires protégées afin de tenir compte des contraintes écologiques en concertation avec le ministère de l'Environnement et Développement durable, l'acquisition de nouvelles données techniques pétrolières par des levées géophysiques, notamment le sismique 3D sur des blocs à forte potentialité, en vue de construire une banque de données pétrolières nationale hautement sécurisée, condition sine qua non pour assurer la promotion des blocs pétroliers," ajoute le compte rendu.
Quatre mois plus tôt, la coalition "Le Congo n'est pas à vendre" (CNPAV) avait exprimé ses inquiétudes quant à la manière dont ce processus est conduit par le gouvernement, près de deux ans après son lancement par le Président Félix-Antoine Tshisekedi. Dans un rapport intitulé "Appel d'offres du secteur des hydrocarbures en RDC : risque de dettes plutôt que de recettes," dévoilé le 8 mai 2024, cette organisation de la société civile craignait que ce processus ne conduise à un endettement supplémentaire, au lieu des recettes espérées par le gouvernement.
Devant la presse, CNPAV a rappelé que l'histoire récente du secteur des hydrocarbures en RDC a montré comment l'opacité et le non-respect des procédures d'attribution des blocs pétroliers ont coûté à l'État congolais plus de 910 millions USD en pertes irréversibles. CNPAV a révélé que le processus d'appel d'offres, lancé en juillet 2022 par le Président Tshisekedi, est entaché de faiblesses similaires à celles ayant conduit à ces pertes.
Selon CNPAV, à l'heure où les grandes puissances abandonnent les énergies fossiles, ce processus pourrait ne plus être rentable pour la République Démocratique du Congo. Malgré les critiques et les interpellations des organisations de la société civile environnementale, le processus d'appel d’offres, lancé avec éclat par le Président Tshisekedi, a du mal à attirer des soumissionnaires, les dates de dépôt des candidatures étant reportées de manière répétée et sans explication – le dernier report ayant concerné les blocs du Graben Albertine, repoussés jusqu'en mai 2024.
Clément MUAMBA