La proposition de loi initiée par Noël Tshiani, ancien candidat à la présidentielle de 2018, portant éligibilité des citoyens essentiellement à la nationalité congolaise pour accéder à des plus hautes fonctions comme la présidence de la République, suscite plusieurs divergences au sein de la classe politique.
Les structures de la société civile congolaise, quant à elles, indiquent que cette loi n'a pas lieu d'être et remet en cause l'unité nationale.
Pour la Nouvelle société civile congolaise (NSCC), cette proposition de loi est inopportune puisque la RDC fait face à “plusieurs défis” qu'elle doit d'abord relever.
« A notre humble avis, c'est inopportun. Le moment n'est pas bien choisi. Nous sommes en train de traverser une crise sécuritaire, financière, et de la gouvernance. A cette crise, il ne faut plus rajouter une autre crise liée à l'identité de gens où à des lois qui donnent l'impression d'être discriminatoire. A ce stade, nous estimons que cette loi peut revenir au moment où les choses sont stabilisées et en discuter en âme et conscience. Plonger en ce moment précis n'est pas de nature à consolider les efforts de solidarité, et par contre, c'est une loi qui sème la division alors que le pays est confronté à la direction barbare des Rwandais », a dit Jonas Tshiombela, coordonnateur de la NSCC.
Quant au coordonnateur du panel des experts de la société civile, il y a bien mieux en termes de priorités en ce moment au pays. Cette loi, souligne-t-il, n’apportera rien.
« Pour l'ensemble de la société civile, il faut signaler que la loi Tshani n'a aucune opportunité et n'apportera rien pour la République et pour l'ensemble des Congolais. Il y a beaucoup de défis auxquels on devrait travailler notamment les défis liés à la sécurité, à l'amélioration du social et du processus électoral inclusif et apaisé, à la consolidation de la démocratie, etc. Mais cette loi éloigne les Congolais les uns et les autres. Face aux défis que nous vivons aujourd'hui, on a plus besoin des lois qui peuvent rapprocher les Congolais. Mais si aujourd'hui on a des lois discriminatoires et qui ne convergent pas pour la cohésion nationale, qui vont fragiliser de plus en plus l'unité du pays, il n’y a aucun intérêt de pouvoir soutenir cela », explique Dieudonné Mushagalusha, président du panel des experts de la société civile.
Et d'ajouter ;
« Ceux qui proposent la loi, la proposent pour des raisons politiciennes. On apprend que c'est une loi soutenue par la majorité au pouvoir. Pourquoi elle doit chercher à faire une loi qui éloigne les uns et les autres, alors qu'elle pense avoir bien travaillé et qu'elle peut gagner des élections ? Si cette loi vise un certain nombre de candidats, ça veut dire que la majorité n'est pas sûre d'elle-même c'est-à-dire qu'elle a peur que d'autres personnes puissent gagner des élections (…) ».
La proposition de loi Tshiani dite aussi "congolité " a été alignée sur la liste des matières à examiner au cours de la présente session à l’Assemblée nationale (Mars-Juin 2023). L’Association congolaise pour l’accès à la justice (ACAJ) a, dans un communiqué, dénoncé “cette réforme sur la nationalité” et appelé les députés nationaux à se concentrer sur d’autres matières notamment celles qui visent la restauration de la paix dans plusieurs coins du pays.
« J’appelle vivement les députés à concentrer leurs efforts sur la restauration de la paix notamment dans les provinces de l’Ituri, Nord-Kivu et Mai-Ndombe (territoire de Kwamouth) ; sur la lutte contre le détournement des deniers publics ; sur l'amélioration du bien-être collectif ainsi que sur les préparatifs de l'organisation du cycle électoral de 2023 appelé à être apaisé, juste, démocratique, transparent et inclusif. Chaque leader politique ou social devra s'employer à déraciner la division, dégager les racines des affrontements politiques et, affronter avec courage les injustices fabriquées des années durant en RDC », a dit, dans ce communiqué, Georges Kapiamba, coordonnateur d’ACAJ.
Par ailleurs, ces différentes structures de la société civile appellent les députés à rejeter cette proposition de loi. Et si par malheur, soulignent-elles, cette loi serait adoptée, elles promettent de saisir le chef de l'État pour barrer la route à sa promulgation.
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Grâce Guka