Près de deux mois après le déclenchement d'une nouvelle épidémie d'Ebola, les outils pour tenter de contrôler la propagation de la maladie en Ouganda vont être complétés par un essai clinique de vaccins.
Etat des lieuxL'épidémie d'Ebola en Ouganda n'est que la dernière d'un nombre grandissant d'épisodes en Afrique de cette fièvre hémorragique, souvent mortelle, transmise aux humains par des animaux.
Depuis 2000, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a signalé 32 épidémies d'Ebola, la plus violente ayant tué 11.300 personnes en Afrique de l'Ouest de 2013 à 2016. L'Ouganda en a connu plusieurs.
Depuis que le gouvernement a annoncé une épidémie dans le district de Mubende, le 20 septembre, Ebola s'est propagée dans près d'une dizaine de districts, dont la capitale, Kampala.
Elle a causé 55 décès confirmés et 22 probables, selon le dernier bilan de l'OMS. 141 cas confirmés et 22 probables ont été comptabilisés.
Restrictions sanitairesIsolement et traitement des cas, détection et surveillance des contacts (près de 3.900 recensés jusqu'alors) figurent dans la panoplie de mesures.
Le gouvernement a pris des mesures de confinement dans plusieurs districts, mais le président Yoweri Museveni a exclu un confinement national.
Le président a aussi ordonné, mi-octobre, d'arrêter les personnes soupçonnées d'avoir contracté la fièvre hémorragique si elles refusent de s'isoler.
Dans un pays où "la communauté est fatiguée par le Covid" et "un confinement "très strict" mais aussi "méfiante envers le gouvernement", la recherche de cas contacts d'Ebola est, elle, "assez difficile", a déclaré à l'AFP Yap Boum d'Epicenter Africa, une branche de recherche de Médecins sans Frontières.
Une des craintes est que "le système pourrait être dépassé" si les contaminations continuent d'augmenter et s'étendent "à d'autres districts densément peuplés" car l'Ouganda affronte plusieurs "urgences" sanitaires, selon un panorama de l'OMS.
Des mouvements de population et des failles dans la surveillance transfrontalière pourraient amplifier les risques.
Et la gestion passée d'Ebola en Ouganda n'est pas une garantie absolue de maîtrise, comme le montre l'exemple de la République démocratique du Congo, où "neuf épidémies avaient été contrôlées auparavant". Or, "pour la dixième, les lieux d'éclosion, le contexte socio-politique ont fait que, malgré l'expérience, l'épidémie nous a échappé", a relaté Steve Ahuka Mendeke, chef du département de virologie à l'Institut de recherche biomédicale de RDC, lors d'un récent point presse de l'ANRS/Maladies infectieuses.
Certaines pratiques sociales peuvent aussi favoriser la propagation, comme consulter des guérisseurs plutôt que des médecins. Le président ougandais a ainsi ordonné mi-octobre aux guérisseurs de cesser leurs activités.
Des rites funéraires peuvent aussi influer. Des familles, insatisfaites des règles imposées aux obsèques pour éviter la transmission d'Ebola, "exhument le cadavre de proches et l'enterrent ensuite selon leurs pratiques", "une occasion de propager le virus", selon Yap Boum.
TraitementsDes anticorps monoclonaux sont disponibles contre le virus "Zaïre" d'Ebola, mais il n'y a aucun traitement jusqu'alors contre le virus "Soudan", qui sévit en Ouganda.
Un cocktail d'anticorps monoclonaux -qui serait efficace chez des furets et des primates contre ces virus, entre autres- doit encore être testé chez les humains.
Seule possibilité jusqu'alors d'améliorer le taux de survie des malades: des soins de soutien (réhydratation) et un traitement des symptômes, à condition d'agir assez tôt, ont souligné MSF, à l'oeuvre en Ouganda, et des experts de l'ANRS/MIE.
Vaccins
S'il existe deux vaccins validés contre la version "Zaïre" du virus, aucun n'est disponible contre la version "Soudan".
Mais l'OMS a donné son feu vert à la participation à un essai clinique en Ouganda de trois candidats-vaccins contre cette souche d'Ebola, a annoncé mercredi son directeur général.
Les premières doses devraient être expédiées la semaine prochaine. L'essai clinique démarrera avec le premier vaccin livré, les deux autres candidats-vaccins s'y ajouteront un peu plus tard, a précisé l'OMS.
Ce sera un essai de vaccination "en anneau", méthode où sont ciblés des contacts des malades, voire des contacts de contacts.
Si l'épidémie actuelle lui paraît "contrôlable sans vaccins", Michael Ryan, chargé des situations d'urgence à l'OMS, a souligné mercredi que l'expérience d'Ebola en RDC avait démontré qu'il était plus rapide de vaincre le virus grâce aux vaccins, par ailleurs "évidemment utiles sur le long terme".
AFP avec ACTUALITE.CD