Le conclave s’est ouvert ce mercredi 7 mai 2025 au Vatican. Dans le silence solennel de la chapelle Sixtine, 133 cardinaux de moins de 80 ans, venus de 70 pays, se préparent à élire le 267ᵉ pape de l’église catholique. À l’autre bout du monde, à Kinshasa, des prières montent, portées par des voix féminines.
Dans les paroisses de la capitale congolaise, de Notre-Dame de la Sagesse (NODASA) à Saint François de Sales, en passant par Reine des Apôtres, les fidèles ne cachent pas leur espoir pour l’église de demain. Parmi les noms évoqués à Rome, celui du cardinal Fridolin Ambongo, archevêque de Kinshasa, fait vibrer les cœurs.
« Pourquoi pas un pape africain ? », s’interroge Sandrine Mwela de NODASA. Pour elle, le cardinal Ambongo incarne le courage et la lucidité. « Il ose parler pour les sans-voix. Il connaît nos réalités ici au Congo. Ce serait une révolution, un message d’universalité, de justice. Et ça montrerait que Rome peut aussi écouter l’Afrique. ».
Cette même attente d’un changement profond résonne dans la voix de Melissa Kiama, éducatrice de la paroisse Reine des Apôtres qui s’attend à un pape qui n’oublie pas les femmes: « Depuis trop longtemps, la place des femmes dans l’église est limitée. Nous sommes les piliers des paroisses, mais quand il faut décider, on nous demande de nous taire. Le temps de la soumission silencieuse est passé. J’espère un pape qui ouvre des portes. »
Dans les couloirs des églises, sur les bancs des catéchèses ou autour des groupes de prière, les mots reviennent : justice, confiance, réforme. Pour Blandine Nehema, religieuse croisée à Saint François de Sales, l’Église doit sortir de sa zone de confort : « Le monde évolue, les défis sont nombreux. Le pape doit être un homme de prière mais aussi un homme de vision. Il faut répondre avec audace et compassion. Le monde change vite. Il faut du courage pour sortir des vieux schémas, écouter les laïcs, penser une Église plus horizontale. Et dans cette réforme, la voix des femmes doit être entendue. Pas comme une faveur, mais comme une justice. »
« Un pape qui connaît la souffrance de l’Afrique »
Pour Sarah Palata, également de NODASA, l’enjeu dépasse l’élection :
« Ce que je souhaite, ce n’est pas seulement un changement de visage à Rome. Je veux un pape qui comprend la souffrance du peuple. En RDC, nous vivons l’oppression. Nous voulons un pasteur, pas un diplomate. L’église doit oser dire la vérité aux puissants. Trop souvent, elle se tait face à l’injustice. Le pape ne doit pas être neutre. Il doit être du côté des pauvres. Que ce conclave choisisse un homme de Dieu, pas un homme de pouvoir. »
La figure du cardinal Ambongo revient souvent dans les témoignages. Pour Monique Kasake, de la paroisse Saint François de Sales, Si Ambongo est élu, c’est l’Afrique qui entre au cœur de l’Église.
« Il représente un espoir concret : Il a parlé contre la corruption, il a tenu tête au pouvoir. Il ne cherche pas la gloire, il cherche Dieu. Ce serait une fierté pour le Congo, mais surtout un signal fort : que l’église est vraiment universelle. »
Bernadette Masiala, de NODASA, attend quant à elle, un pape à l’image du Christ : « Il faut un pape qui ne nous juge pas, mais qui nous accompagne. Mères seules, étudiantes sans ressources, jeunes sans avenir… Jésus n’excluait personne. L’Église ne peut pas rester figée. »
En ce jour de silence à Rome, où les cardinaux votent à huis clos, les femmes de Kinshasa, elles, élèvent la voix. Elles ne demandent pas une église à leur image, mais une église fidèle à l’Évangile, qui regarde la réalité en face, qui écoute, qui partage le chemin. Le nom du cardinal Ambongo symbolise un rêve, mais au fond, ce n’est pas une question de nationalité : c’est une question d’âme, de mission et de foi.
Nancy Clémence Tshimueneka