RDC : « comment garantir la transparence du processus électoral avec les innovations de la nouvelle loi électorale ? »

Panel électoral KNL
Ph. ACTUALITE.CD

La nouvelle loi électorale, promulguée le 29 juin dernier, comporte plusieurs innovations, lesquelles peuvent être regroupées en six catégories. Il y a des innovations relatives au  seuil de recevabilité des listes de candidatures ; à la prise en compte de la dimension genre dans la constitution des listes de candidatures ; à la distinction des inéligibilités temporaires de celles définitives ; à la définition d’un régime légal exhaustif pour le vote électronique et semi-électronique ; aux obligations de la CENI, et aux obligations des cours et tribunaux dans le traitement des contentieux électoraux.

Ainsi, “comment garantir la transparence du processus électoral avec les innovations de la nouvelle loi électorale ?”. C’était le thème d’un panel organisé ce mardi 23 août par Kinshasa News Lab dans la salle Congo du Pullman Grand-Hôtel de Kinshasa avec l’appui technique d’Internews, IRI et IFES.

Ce panel, composé de cinq intervenants, a exposé et répondu aux questions de l’assistance composée des délégués des différentes structures de la société civile et des journalistes. Il s’agit des députés nationaux Delly Sessanga et Daniel Mbau, de Cyrille Ebotoko, membre de la commission électorale justice et paix (CEJP), de Gérard Bisambu, membre de l’Assemblée plénière de la CENI ainsi que de Merveille Gozo, membre du Collectif d’action de la société civile (CASC).

L'entame et la clôture de ce panel ont été marquées par les discours respectivement de Karim-Benard Dende, directeur pays d'Internews et Majda El Bied, directrice régionale d'IRI.

Prenant la parole en premier, le député national Daniel Mbau, rapporteur de la commission PAJ de l’Assemblée nationale, s’est appesanti sur les enjeux stratégiques de la réforme ainsi que la déclinaison des innovations structurelles de la nouvelle loi électorale.

Pour M. Mbau, les innovations qu’apporte la nouvelle loi électorale notamment celle en rapport avec le seuil, garantissent la transparence du processus électoral en cours.

« L’enjeu essentiel, c’est le renforcement de la compréhension et la lisibilité du processus électoral dans la perspective de régler l’épineuse problématique de la crise et de la contestation de la légitimité des animateurs. La loi électorale propose de pouvoir construire des réponses adaptées pour pouvoir répondre efficacement à la problématique de la légitimité. La deuxième motivation fondamentale de la loi électorale, c’était de répondre aux problèmes pratiques constatés lors du scrutin de 2018 d’une part et d’autre part construire un système électoral cohérent, démocratique et stable. Cela a été le cas étant donné que  les questions d’opérationnalisation du scrutin ont été réglées à travers cette nouvelle loi électorale (…) », a-t-il indiqué d’entrée de jeu.

Faisant la déclinaison des innovations structurelles de la nouvelle loi électorale, cet élu du Mouvement de libération du Congo (MLC) note que « globalement, il y a deux types d’innovations : innovations apparentes qui apparaissent clairement dans l’exposé des motifs et des innovations non apparentes c’est-à-dire celles qui n’ont pas fait objet de la mention expresse dans l’exposé des motifs ».

« Dire 2023 : élections transparentes, c’est un oxymore »

De son côté, le député national Delly Sessanga, membre du Groupe de 13 personnalités sociopolitiques (G13),  a soulevé un certain nombre d’inquiétudes, légitimes selon lui, en rapport avec le processus électoral en cours. « La transparence est étrangère au processus qu’on s’est donné pour 2023 », note-t-il.

L’élu de Luiza fait également savoir que le G13, initiateur de cette loi électorale, n’a aucune attente particulière en rapport avec ce processus.  

« La transparence a trois piliers : l’indépendance de l’organe de gestion électorale (CENI), l’indépendance de la justice, et le troisième pilier, c’est une loi électorale non pas qu’elle soit de compromission mais plutôt celle qui soit consensuelle et qui résolve les tensions de notre temps, qui puisse atténuer cette réserve de la violence de notre société et qui permette aux institutions d’être libérées et de pouvoir travailler », a-t-il expliqué en substance, avant de développer chacun de piliers. 

Cyrille Ebotoko a abordé la question relative à la traçabilité des opérations de vote et du dépouillement pour les missions d'observation citoyenne.

Il a insisté sur la surveillance non partisane du processus électoral, plaidant ainsi pour le respect du droit des observateurs citoyens à capter un maximum  d’informations clés sur le vote et le dépouillement.

« Ici, on parle d’une mission d’observation électorale citoyenne. Ça signifie qu’il y a un autre type de mission d’observation électorale : des missions internationales. Ici, il s’agit des citoyens congolais, qui observent leur processus, qui participent à la gouvernance électorale de leur propre pays. Du fait du droit à l’information, du droit à liberté d’expression, les observateurs citoyens sont censés rechercher, recevoir et vulgariser les informations sur le processus électoral. Leur présence est très importante », a souligné M. Ebotoko.

A l’en croire, les observateurs participent à la construction de la légitimité des dirigeants.  « C’est pourquoi, il est important que les observateurs citoyens aient le droit, les possibilités (accès) et les capacités à capter un maximum  d’informations clés sur le vote et le dépouillement ».

Merveille Gozo est aussi rapporteuse de la mission d’observation ECC-CENCO. Elle est revenue sur les attentes de la société civile dans le cadre de la nouvelle loi électorale.

Elle fait savoir que la société civile attend beaucoup de ce processus électoral : « (...) Le scrutin de 2023 est celui de tous les enjeux. Les enjeux sécuritaires, premièrement sécuritaires avec la menace dans la partie est du pays avec le M23. Les enjeux de développement. Nous avons besoin de développer le pays et cela passe par la justice électorale, par la justice électorale, la véracité des résultats qui proviendront de la CENI (…) ». 

Concrètement sur ces attentes, Mme Gozo a notamment appelé d’une part à la création d’un dialogue franc et permanent entre la société civile, les institutions de la République, les partis politiques et toutes les autres parties prenantes, de l’autre, à la collaboration entre les partis politiques et la société civile sur l'éducation civique électorale afin, dit-elle, d’éviter des conflits qui peuvent survenir pendant le cycle. « Actuellement, nous remarquons un certain nombre de discours de haine, des discours du régionalisme, qui peuvent porter atteinte même au bon déroulement et à l'apaisement ».

La CENI consciente de son obligation de transparence

Quid de l’implication de la nouvelle loi électorale sur les opérations de la CENI ? La préoccupation a été abordée avec force détail par Gérard Bisambu, membre de la plénière de la centrale électorale.

« La CENI a elle-même aussi fait de son côté l’évaluation du processus électoral de 2018. Elle a aussi analysé le rapport des différentes missions d’observation électorale et même des rapports déposés par certains partis politiques qui ont eu à déployer des témoins. La CENI est arrivée à dégager certaines recommandations pour améliorer le travail cette année. Ça signifie qu’il y a eu effectivement des irrégularités notamment en lien avec la traçabilité des résultats, la lisibilité des résultats, des irrégularités en lien avec la problématique du vote, c’est une grande irrégularité qui a aussi donné lieu à une innovation. Il y a des irrégularités en lien avec le dysfonctionnement institutionnel, des irrégularités en fonction avec l’inclusion électorale (…) », a déclaré M. Bisambu.

Et d’ajouter :

« La CENI est consciente de son obligation de transparence en termes d’ouverture d’informations étant donné que l’information électorale est une information publique qui nécessite d'être ouverte et à la disposition de l’ensemble de citoyens puisque c’est leur droit. Mais cette obligation de la transparence et de la redevabilité ne revient pas seulement à la CENI mais à toutes les parties prenantes parce que la CENI a aussi des formations à recevoir des parties prenantes et vice-versa ».

Suivez l'intégralité de ce panel ici :

partie 1

partie 2

Japhet Toko