RDC : l'UE s'inquiète du rétrécissement des zones d'actions des humanitaires et déplore la réactivation soudaine des groupes armés

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Jean-Marc Châtaigner, l'ambassadeur de l'UE en RDC

Les travaux du 10e sommet du Mécanisme régional de suivi de l'accord cadre d'Addis-Abeba ont été clôturés jeudi 24 février à Kinshasa. Outre l'accession de Félix Tshisekedi à la tête de cette structure régionale, plusieurs autres résolutions ont été prises en vue de garantir la paix et la stabilité dans la région des grands lacs.

Dans son discours tenu lors de ces assises, Bernard Quintin, envoyé spécial de l'Union européenne pour les grands lacs, qui revenait de l'Est avant le début de ces assises, a dit constater une situation humanitaire et sécuritaire très préoccupante, d’autant plus que la lecture ou l’analyse de cette situation qui recueille un large consensus d’acteurs étatiques et non-étatiques et dans la région ne semble pas partager par toutes les autorités locales.

« Les acteurs humanitaires de premier plan regrettent un rétrécissement de leur zones et capacités d’action tandis que la décomposition de certains groupes est allée de pair avec des représailles contre la population civile. D'autres groupes pourtant démobilisés depuis des mois ou même plusieurs années, se sont soudainement réactivés. Les services de sécurité congolais ne semblent pas toujours suffisamment en mesure de faire face à ces nombreux défis sécuritaires et d’ailleurs nous savons, par expérience, qu’il n’y a pas de solution qui ne soit que militaire ou sécuritaire. Les défis sont immenses en la matière et la RDC sait et doit pouvoir compter sur le soutien de tous ses partenaires bilatéraux et multilatéraux, comme la MONUSCO », a indiqué Bernard Quintin, envoyé spécial de l'Union Européenne pour les grands lacs.

Il estime que la détermination du gouvernement congolais, des pays dans la région et tout l'investissement de l'UE, les efforts pour stabiliser la région n’ont pas encore atteint leur objectif. Ils doivent être accélérés car il y a urgence.

« De notre côté, nous sommes prêts à renforcer notre action, sur base d’une stratégie de stabilisation nationale intégrée, en application de l’Accord et en tenant compte de la nécessité du respect de l’état de droit et de la protection, de la promotion même, des droits humains. Nous devons tous nous engager davantage, tant sur les questions de justice et de sécurité, comme la RSS et le DDRCS, que sur des actions de développement socio-économique et de restauration de la cohésion sociale, qui passent par exemple par une plus grande implication du secteur privé et une plus grande intégration économique régionale, afin de créer des emplois et donner un élan au développement de la région », a fait savoir Bernard Quintin, envoyé spécial de l'Union Européenne pour les grands lacs.

Et de poursuivre :

« L’UE, ses Etats membres et ses partenaires sont engagés pour travailler toujours plus étroitement avec la région, sur base d’une nouvelle approche stratégique de l’UE pour les Grands Lacs, qui pourrait inclure des aspects comme les questions transfrontalières, l’exploitation et le commerce durable des ressources naturelles ainsi que les questions de paix et de sécurité, comme par exemple la prévention de l’extrémisme violent, le renforcement de la justice et la lutte contre l’impunité ».

Pour ce membre de l'union européenne, la conférence du jour est une étape importante qui permettra à son organisation d’avoir une compréhension et une vision encore plus partagée et, ainsi, renforcer là où c’est nécessaire les coopérations et l'approche multilatérale.

« D’autres réunions seront nécessaires et nous sommes preneurs d’un dialogue régulier avec vous sur toutes ces questions. Notre objectif est d’appuyer vos efforts pour parvenir à une paix et une stabilité durable dans la région. Mettre fin une fois pour toutes aux violences quotidiennes subies par les civils, victimes de ce que l’on appelle encore parfois une guerre de basse intensité, un concept dont je suis certain que nous ressentons le caractère presque vulgaire quand on l’oppose à ces personnes dont nous devons ensemble, assurer la sécurité et restaurer la dignité.  Nous le leur devons. Et nous pourrons ainsi, aussi, et toujours ensemble, faire de la région des grands lacs le moteur de développement pour tout le continent africain qu’elle mérite d’être », a-t-il souligné.

En plus de Félix Tshisekedi, six chefs d’Etat ont fait le déplacement de Kinshasa pour participer à ce sommet. Il s’agit de l’Ougandais Yoweri Museveni, de l’Angolais  João Lourenço, du Burundais Evariste Ndayishimiye, du Sud-africain Cyril Ramaphosa, du Congolais Denis Sassou Nguesso et du Centrafricain Faustin-Archange Touadera. D’autres pays dont la Tanzanie, le Kenya, le Soudan et le Rwanda se sont fait représenter par les membres de leurs gouvernements respectifs. Le secrétaire général adjoint de l'ONU chargé du maintien de la paix, Jean-Pierre Lacroix et le président de la commission de l'UA, Moussa Faki, ont également pris part à ce sommet.

L'accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour la RDC et la région avait été signé en février 2013 par 11 pays de la CIRGL (Conférence internationale sur la région des Grands Lacs) sous l'égide de l'ONU, à Addis-Abeba, au lendemain de la prise de la ville de Goma par la rébellion du M23. Il interdit aux Etats notamment de s’ingérer dans les affaires internes des pays voisins et de soutenir les groupes armés pour combattre d’autres Etats.

Clément Muamba