Le député national Delly Sesanga s'est exprimé au sujet du projet de budget 2022 de 10 milliards USD déclaré recevable la semaine dernière à l'Assemblée nationale. Dans une tribune rendue publique dimanche 21 novembre, l'élu de Luiza (Kasaï Central) déplore la montée de l'égoïsme de la classe politique, couplée de la disparition du sens de l'intérêt général dans la politique financière du pays.
Il déplore que la majeure partie du budget 2022 soit consacrée au fonctionnement des institutions au détriment de la justice sociale.
« L’accès aux charges publiques électives ou de nomination est devenu un instrument d’enrichissement rapide et illicite de ceux qui parviennent aux commandes de l’appareil de l’État au détriment de la justice sociale. Le mode opératoire consiste dans la patrimonialisation et la privatisation de l’appareil étatique, désormais asservi aux intérêts particuliers de la classe politique. Malgré l’expérience de la crise de la COVID-19, la politique mise en œuvre dans le budget 2022 est résolument régressive incarnant un État insolent, insouciant et délié de ses obligations fondamentales et qui se complait dans son incapacité à assurer ses missions régaliennes et de promouvoir le bien-être collectif », M. Sesanga.
Il a rappelé que l'enjeu est de sortir le pays de la situation de l’État failli post-conflit : sous-dimensionné et donc mou en interne et, faible à l’extérieur, réduit au statut d’un État-client dans la sous-région.
« Les finances publiques représentent un aiguillon dans la voie de la reconquête et de la préservation de notre indépendance nationale. Il n’y a pas d’État fort sans finances publiques saines et fortes. Pour y parvenir, il faut sortir de la conception de l’État distributeur automatique des privilèges et avantages à des clientèles politiques, pour une conception moderne de l’État : un État modeste mais efficace au service de l’intérêt général et des missions de service public », a-t-il recommandé.
Ancien membre de l’Union sacrée, Delly Sesanga a une fois de plus déploré le fait que l'examen du budget soit intervenu deux mois après son dépôt à l'Assemblée nationale par le gouvernement. Il estime que les questions stratégiques n’y seront pas à nouveau abordées en raison du temps.
« En dépit du dépôt dans les délais, une fois n’est pas coutume - cela mérite d’être souligné au crédit du gouvernement- le projet de loi des finances a été mis au débat plus de deux mois après le dépôt pourtant effectué diligemment par le Premier ministre en date du 14 septembre 2021. A trente jours de la clôture de la session budgétaire, le Bureau de l’Assemblée nationale aura anéanti par sa gestion chronophage l’impact de cet effort gouvernemental. Pour une fois, l’Assemblée nationale aura gâché l’opportunité créée de consacrer ainsi au débat budgétaire la durée légale de 40 jours », s'est indigné Delly Sesanga.
Et de poursuivre :
« La séance marathon du 15 novembre sur le débat général est un arbre qui cache la forêt sur l’absence d’un débat de fond sur les finances publiques telles que les questions d’ordre stratégiques concernant la réelle dimension normative du budget, ainsi que les sanctions contre les gestionnaires publics, le problème des choix de société, la cohérence des politiques fiscales, la qualité et la composition de la dépense publique ainsi que la politique d’affectation des recettes publiques additionnelles. Après la déclaration de recevabilité, seule comptera finalement dans ce processus parlementaire la routine adoption des prévisions budgétaires ; dont on sait, qu’elles feront à peine l’objet de contrôle dans la phase administrative d’exécution ».
Les députés nationaux ont déclaré recevable jeudi 18 novembre dernier, le budget pour l’exercice 2022 évalué à 20 682,6 milliards de Francs congolais (CDF), soit 10 milliards USD dont les recettes doivent être mobilisées. Le budget pose cependant plusieurs problèmes dans sa répartition. Les institutions à elles seules prennent 38%. Plusieurs secteurs de la vie nationale sont marginalisés. Les regards sont tournés vers la commission Ecofin en vue d'obtenir réparation en priorisant des crédits budgétaires dans les secteurs importants.
Clément Muamba