Le sous-sol de la République Démocratique du Congo (RDC) est compté parmi les plus riches au monde, au regard de sa géologie et de sa minéralogie. Le pays compte plusieurs sociétés d'exploitation des ressources minières (cobalt, cuivre, coltan, or, diamants). En perspective de favoriser le développement des communautés locales, le gouvernement avait adopté un nouveau code minier en 2018, exigeant aux entreprises minières une contribution à hauteur de 0,3% de leur chiffre d’affaires à une dotation pour le développement des communautés locales. Bien plus, les entreprises devraient élaborer des « cahiers des charges » reprenant leurs engagements vis-à-vis des populations locales, en vue d’une amélioration de leurs conditions de vie, d’une part, et des relations des populations avec les entreprises, de l’autre. Qu'en est-il de la réalité sur le terrain ? ACTUALITE.CD a enquêté sur le cas de Ruashi Mining SAS, une des mines aux capitaux chinois, située à Lubumbashi dans le Haut-Katanga.
Ruashi Mining SAS est une mine chinoise à ciel ouvert de production du cuivre et du cobalt, située dans la commune de Ruash, à Lubumbashi dans la province du Haut-Katanga. 75% de ses actions sont détenues par la société minière basée à Johannesburg Metorex et 25% par la Gécamines. Étalée sur une superficie de 6 hectares, Ruashi Mining SAS compte 1908 employés, dont 1 008 employés congolais, 48 expatriés dont les chinois, les Sud-africains, les Anglais et d'autres nationalités ainsi que 900 entrepreneurs. Elle a une capacité de production de plus ou moins 100 tonnes de cuivre/jour et 10 tonnes de cobalt/jour.
« Nous pouvons produire jusqu'à 120 tonnes de cuivre par jour. Mais compte tenu de la limitation des minerais que nous avons, nous ne produisons qu'autour de 90 à 100 tonnes de cuivre par jour. Ce qui fait 3 000 tonnes de cuivre par mois et 36 tonnes de cuivre par an. Nous produisons jusqu'à 18 et 20 tonnes de cobalt par jour. Mais actuellement les minerais que nous avons sont très pauvres en cobalt. Et nous ne produisons que 10 tonnes de cobalt par jour. Ce qui fait 300 tonnes de cobalt par mois et c'est autour de 3 600 ou 4 000 tonnes par an », explique Patrick Tshisand, directeur de production à Ruashi Mining.
Sa capacité de production exige au minimum 22 mégawatts de courant électrique. « Mais Ruashi Mining fait face à un sérieux problème d'énergie dans la région. Elle utilise le courant de la SNEL, pratiquement instable, et importe également l'énergie de la Zambie. Mais elle a également installé ses propres générateurs », dit-il.
Quid de la redevance minière de 0,3% versée par Ruashi Mining SA ?
Les entreprises minières sont contraintes de contribuer à hauteur de 0,3% de leur chiffre d’affaires à une dotation pour le développement des communautés locales ou « dotation pour le développement communautaire » comme l'exige le code minier. M. Kabwita Kilefu, chef des bureaux de la maison communale de Ruashi, confirme que cette redevance est bel est bien payée.
« Ruashi Mining se trouve dans notre commune. Depuis l'instauration de la redevance minière évoquée dans le code minier, Ruashi Mining l'applique », rassure-t-il.
De cette redevance minière, 50% sont reversés à l’Etat congolais, 25% à la province d’où provient le minerai en question, 10% à un « Fonds minier pour les générations futures » et 15% aux populations locales de la zone productrice, en passant par les entités territoriales décentralisées (sous-entités des provinces).
Grâce à l'argent de la redevance minière de Ruashi Mining SAS, la municipalité arrive à résoudre plusieurs problèmes communautaires.
« Grâce à l'argent de la redevance de Ruashi Mining, nous arrivons à payer les agents de la commune et nous réalisons plusieurs projets à impact visible dans notre commune. Nous avons arrangé des routes et construit des bâtiments au sein de la maison communale. Nous avons également construit des ponts. Il y a également plus de 15 forages d'eau réalisés grâce à la redevance. Pour lutter contre l'insécurité, nous avons acheté une jeep et 4 motos mises à la disposition de la police. Nous avons également acheté un grand camion d'évacuation d'immondices et 5 tricycles pour l'assainissement de notre commune. La redevance minière a un grand impact dans notre commune », explique M. Kabwita Kilefu, chef des bureaux de la maison communale de Ruashi.
Le cahier des charges de la communauté de Ruashi en attente de validation par le gouverneur
Ruashi Mining a déjà élaboré les « cahiers des charges » en consultation avec les communautés locales afin de s'acquitter de ses engagements favorisant le développement des populations locales. Mais ce document compte, à ce jour, au moins deux ans de conservation dans les tiroirs du gouvernorat du Haut-Katanga. Le gouverneur n'a toujours pas apposé sa signature.
Le chef des bureaux de la maison communale de Ruashi estime que la libération du cahier des charges de cette communauté va également appuyer le développement de sa commune.
« Nous avons réalisé notre cahier des charges avec l'entreprise mais il traîne encore au niveau du gouvernorat de province. On attend la validation du gouverneur pour passer à la mise en pratique de ce cahier des charges. L'entreprise est bloquée car ça va faire bientôt deux ans que le gouvernorat de province n'a pas toujours répondu. Ruashi Mining ne sait pas débourser l'argent par manque de validation du cahier des charges », regrette M. Kabwita Kilefu.
La société civile également, à travers la structure « La Maison du Citoyen », une organisation qui réunit l'autorité locale et la communauté, appelle le gouverneur Jacques Kyabula Katwe, à signer ce cahier des charges.
Impact de Ruashi Mining SAS auprès des populations locales
Installée en RDC vers 2006, Ruashi Mining SAS a déjà alloué une somme à la hauteur de 24 millions USD sur les projets socio-communautaires. Elle a alloué cet argent dans le développement des fermes environnantes avec la communauté locale au point de mériter une récompense par Katanga Word en 2010 et 2012 pour ses œuvres dans le domaine du social.
Cette mine à capitaux chinois fournit l'électricité dans la banlieue de la commune de Ruashi grâce à une sous-station qu'elle a dédiée à la communauté de cette contrée. Elle a également placé un réservoir de 800 mètres cubes d'eau au bénéfice de la communauté environnante. La REGIDESO qui devrait faire ce travail est en faillite.
Cette société minière compte plusieurs réalisations dans sa gibecière, bénéfiques à la population de Ruashi. Il y a notamment : la construction de l'école de Katuba (1 500 000 USD), la construction d'une morgue à l'Hôpital de Ruashi (27 000 USD), l'Installation des forages manuels à Ruashi (400 000 USD)...
Ci-dessous la liste de quelques projets sociaux réalisés par Ruashi Mining SAS
Les tracasseries financières
Les agences gouvernementales, l'Office congolais de contrôle (OCC) et le Centre d’expertise, d’évaluation et certification des substances précieuses et semi précieuses (CEEC) ont placé leurs bureaux au sein de Ruashi Mining pour contrôler ses productions permanentes du cuivre et du Cobalt. Ce qui est normal.
En outre, Fidel Kakez, directeur de conformité de Ruashi Mining, dénonce les tracasseries de justice.
« Ruashi Mining souffre des tracasseries et des mauvaises interprétations des textes. Souvent, on nous inflige des amendes et des pénalités pour lesquelles la société ne devrait pas payer. Il y a des missions qui viennent tous les jours sans même nous aviser. On reçoit parfois deux à trois convocations par jour, des mandats de comparution sans fondement », dit-il.
Il dénonce également deux taxes infligées "illégalement" à Ruashi Mining.
« On fait payer à Ruashi Mining la taxe voirie et la taxe sur les concentrés. Ce sont les deux taxes instituées illégalement par la province. Ces taxes ne se retrouvent pas dans la nomenclature encore moins dans toutes les lois. C'est une tracasserie. Il y a les gens de l'urbanisme et de l'économie qui passent ici pour exiger les statistiques et font des menaces. Ruashi Mining fait face à plusieurs difficultés », dénonce Fidèle Kakez.
Plusieurs agents de l'Etat viennent exercer des pressions dans l'optique de rançonner la mine, témoignent d'autres travailleurs de Ruashi Mining.
Traitement des travailleurs
Au sein de Ruashi Mining, aucun constat de maltraitance n'a été signalé. Les travailleurs de cette mine disent être mieux traités.
« Nos salaires sont confortables. Nous avons 3 abonnements des hôpitaux notamment à Don Bosco, Baraka et CMC qui reçoivent nos familles. Chaque travailleur est bénéficiaire de 4 sacs de farine de 100 kg par mois. Il y a également un bonus à chaque fois que nous réalisons une production élevée par rapport au Target prévu. Chaque fin de l'année, les travailleurs bénéficient d'un treizième chèque. Les travailleurs de Ruashi Mining sont mieux traités par rapport à d'autres mines », témoigne Elyse Kalasa, RTE relation et Directrice sociale à Ruashi Mining.
La dernière catégorie des travailleurs touche au moins 600 USD par mois. Des faits approuvés par les syndicats des travailleurs.
Jordan MAYENIKINI