RDC : pour dépolitiser la CENI, CREEDA propose la réduction des délégués des partis politiques et la suppression de l’étape de l’entérinement de ses membres à l’Assemblée nationale

Maître Symphorien Kapinga, experts en questions électorales à CREEDA

Le Centre de Recherches et d’Etudes sur l’Etat de Droit en Afrique (CREEDA) a publié ce lundi 12 avril, un rapport sur les réformes électorales en vue des élections générales prévues en 2023 en République démocratique du Congo.

Parmi les recommandations, cette organisation propose la dépolitisation de la Commission électorale nationale indépendante (CENI). Ainsi, pour y arriver, l'ONG pense que ladite dépolitisation doit commencer par la réduction du nombre des délégués des partis politiques dans la composition de son bureau.

" Pour ce qui est de la dépolitisation, le présent rapport propose une réduction sensible du nombre de délégués des partis politiques à 4 en raison de 2 pour la Majorité et 2 pour l’Opposition. Les 9 sièges restants devront être attribués de manière paritaire aux Confessions religieuses (1), aux Organisations de la société civile spécialisées en éducation civique et électorale (1), aux organisations féminines (1), aux organisations des jeunes (1), aux associations des personnes vivant avec handicap (1), à la Magistrature (1), aux Barreaux (1), aux organisations syndicales (1) et aux autorités traditionnelles (1) ", peut-on lire dans le rapport présenté par Maître Symphorien Kapinga, experts en questions électorales à CREEDA.

Cette dépolitisation, selon ce rapport, devrait également passer par la suppression de l’étape  de l’entérinement de la désignation des membres de la CENI à l’Assemblée nationale et la transmission des PV de désignation au Président de la République.

" Pour renforcer la dépolitisation de la CENI, ce rapport recommande la suppression de l’étape  de l’entérinement de la désignation des membres de la CENI à l’Assemblée nationale et la transmission des PV de désignation au Président de la République à dater de la séance de désignation par la composante ou la sous-composante. Le contentieux de désignation des membres de la CENI relève de la compétence du Tribunal administratif ", ajoute le rapport.

En ce qui concerne le calendrier de désignation des membres de la CENI, celui-ci court à partir du quatre-vingt-dixième (90ème) jour avant la fin du mandat des membres en fonction.

Au sujet de la réhabilitation de l’Assemblée plénière dans son statut d’organe suprême de la CENI, ce rapport propose la désignation des animateurs de cet organe autres que les membres du Bureau. Ainsi l’Assemblée plénière devra être dirigée par un Président (provenant de l’Opposition politique), d’un Vice-président (…) et d’un rapport (…). Il s’agit d’assurer la transparence et la séparation d’attributions entre l’organe de décision et de contrôle (Assemblée plénière) et l’organe d’exécution (Bureau).

L’idée d’une Administration publique électorale permanente et régie par un statut juridique particulier de droit public est justifiée par la continuité du fonctionnement de la CENI et par la capitalisation des expériences électorales. L’avantage de cette proposition est d’éviter que les agents de la CENI soient recrutés sur la base des critères non objectifs et partisans ou être aux caprices des membres du Bureau. Par-delà la permanence de cette Administration, le rapport insiste aussi sur la nécessité de décentraliser, estimant que sa forte centralisation et la concentration des pouvoirs au niveau national favorisent les cas de fraude. 

Relativement à la responsabilité pénale et au statut des membres de la CENI, cette étude a proposé que le manquement d’ordre disciplinaire, tel que le parjure soit sanctionné par le juge administratif, alors que les autres comportements des membres de la CENI tendant à dénaturer les résultats électoraux devraient, eux, être punis conformément au droit pénal commun ou être érigés en infractions autonomes.  

Pour ce qui est du renforcement de la gestion des finances de la CENI et des principes de son audit, le rapport recommande aux parlementaires de reconnaître aux institutions ou organes classiques de contrôle des finances publiques la compétence d’auditer les comptes de la CENI et de s’abstenir de créer d’autres mécanismes. Il en est de même en ce qui concerne le respect des principes de participation et de redevabilité.

Le Centre de Recherches et d’Etudes sur l’Etat de Droit en Afrique recommande aussi

Au peuple

  • De rester vigilant et de suivre le processus des réformes de la CENI afin de soutenir les propositions qui consolident son indépendance et de s’opposer, par les moyens pacifiques, à celles qui tendent à son inféodation par les acteurs politiques.

Président de la République

  • De veiller à ce que les réformes de la CENI respectent la Constitution et la volonté du peuple d’avoir des élections libres, transparentes, régulières et crédibles organisées par une institution « réellement » indépendante. 

Aux parlementaires 

  • De privilégier l’intérêt général en acceptant la dépolitisation de la CENI par la réduction du nombre des délégués des partis politiques, la suppression de l’entérinement de la désignation des membres de la CENI par l’Assemblée nationale, 

Aux Organisations de la Société Civile

  • De veiller au processus de réforme de la CENI au Parlement afin de sauvegarder les acquis et faire aboutir les propositions consolidant l’indépendance de la CENI.

Auguy Mudiayi