RDC : ce que les Kinois pensent des causes de l'infertilité dans un couple

RDC : Ce que les kinois pensent des causes d’infertilité dans un couple . photo droits tiers

On ne parlera jamais assez d’infertilité, cette question qui traumatise au moins 30 % des couples en Afrique et 11% en RDC. Tous les jours, différents produits sont vendus à Kinshasa pour guérir de cette anomalie. Dans le but d’en connaître les causes, Actualité.cd a interrogé hommes et femmes dans les rues de la capitale. Chacun y va de ses propos.

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) définit l'infertilité comme l’absence de conception après au moins 12 mois de rapports sexuels réguliers sans contraception (lorsqu’un couple essaie d’avoir un enfant, le taux de réussite est de 88 % la première année et 95 % dans les deux ans). 

Conséquences des avortements clandestins, hygiène intime ou mauvais sorts, ce sont là les premières causes d’infertilité, selon certaines femmes. Rose Samba et Merveille Sokila expliquent : “Il y a des femmes qui ont épuisé leurs chances de concevoir suite à des multiples avortements. La matrice ainsi fragilisée ne peut plus supporter le poids d’une nouvelle grossesse,” explique Rose Samba. Pour Merveille, il faudrait aussi penser aux trompes utérines perdues pendant des avortements non-sécurisés. “Quand une femme ne conçoit pas, elle doit avoir fait des avortements clandestins sans suivre des soins complets. Certains centres de santé ne disent jamais aux jeunes femmes qu’après un avortement, elles ont perdu des trompes utérines. Elles découvrent cela plus tard et ne peuvent plus concevoir”, regrette Merveille Sokila.

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Lema Diamonika encadre des femmes et jeunes filles dans son église. Elle considère que l’infertilité peut provenir du phénomène “Ya Mado”. “Certaines jeunes filles utilisent des produits pour élargir leurs bassins ou leurs poitrines. Elles ignorent qu’elles peuvent tomber malade et ne plus concevoir”, dit Lema, avant d’ajouter la négligence dans l’hygiène intime : “une jeune femme doit savoir soigner son corps. L’hygiène intime est très importante pour la santé sexuelle d’une femme. Quand cela n’est pas bien fait, les conséquences surviennent plus tard et peuvent être la cause des problèmes d’infertilité.” 

Contrairement à Rose, Merveille et Lema, Laurianne Akwama pense aux mauvais sorts. “Il est vrai que les infections qui n’ont pas été soignées se transforment souvent en obstacle à la conception pour la femme ou pour l’homme... Mais d’autres causes peuvent également provenir des familles des conjoints. Il peut s’agir d’une jalousie ou d’un mécontentement de la part des oncles et tantes. Si les époux n'interrogent pas leurs familles, ils ne le sauront jamais. Et si des mauvais sorts sont jetés au couple, il aura des difficultés à concevoir”, confie Lauriane Akwama, vendeuse des téléphones portables à l’Université Pédagogique Nationale (UPN). 

Malformations congénitales, conséquences des produits aphrodisiaques, ignorance des examens prénuptiaux sont les grandes causes évoquées par les hommes. Léonard explique pourquoi il considère que les malformations congénitales peuvent constituer un obstacle à la procréation. “Il existe des hommes et des femmes qui sont nés avec une malformation congénitale des organes génitaux. Ces causes sont d’ordre naturel. On peut tout faire, un tel couple éprouvera toujours des difficultés à procréer. Certaines femmes pourront concevoir mais après plusieurs tentatives.”

Yannick Kabasele, gérant d’un magasin au centre-ville, parle des produits aphrodisiaques comme l’une des sources. “A Kinshasa, les jeunes gens se livrent aux stimulants sexuels sans connaître les dommages que cela peut causer à la santé reproductive.  Souvent, on parle d’infertilité de la femme et pourtant, c’est l’homme qui en est la cause.” 

Pour sa part, Ephraïm Bitumbu évoque l’importance des examens prénuptiaux. “Ce qui favorise l’infertilité dans les couples aujourd’hui, c’est l’ignorance des examens prénuptiaux. Les jeunes s’empressent de se marier sans connaître l’état de santé de chacun. Certaines maladies peuvent être soignées si elles sont connues à l’avance. Cela nous éviterait de tomber dans les soucis.” 

Il faudrait aussi noter que l'infertilité est à différencier de la stérilité, qui est définie par l'incapacité totale pour un couple d'obtenir un enfant. En Afrique, des organisations pour la défense des droits des femmes continuent de lutter pour libérer des femmes déclarées infertiles ou stériles des clichés et stéréotypes.

Prisca Lokale