RDC : choquer et marquer les esprits à travers les mots, c’est la mission que s’est assignée Do Nsoseme Dora

RDC : choquer et marquer les esprits à travers les mots,  c’est la mission que s’est assignée Do Nsoseme Dora

Slameuse, poétesse, photographe et blogueuse, Do Nsoseme fait partie de ces jeunes femmes qui milite pour le rayonnement des arts en RDC. Au cours d’un entretien accordé à la rédaction femme d’Actualité.cd elle a partagé sa passion pour l’art.

 

Do Nsoseme Dora, vous pratiquez du slam, la poésie, la photographie et vous réalisez des exploits depuis quelques années en RDC. Pouvez-vous nous parler des motivations qui vous ont porté vers c art ?

 

Do Nsoseme : en fait, depuis que j’ai 8 ans, je tiens un journal. J’y mettais un peu de tout. Je racontais mes journées, puis des histoires ainsi que des poèmes. A l’age de 12 ans, j'ai commencé à écrire des chansons. Depuis 2015, je me consacre à la pratique du slam et de la poésie de manière professionnelle. J'avais des choses à dire, je voulais avoir mon temps de parole, j'avais mes écrits et ma voix, alors je me suis lancée, parce que je voulais être écoutée. C’est de là qu’est venue ma motivation.

Vous êtes devenue active dans le slam depuis 2012. Que faisiez-vous avant ?

Do Nsoseme : j'ai eu mon bac(diplôme d’Etat) en 2011. En 2012, quand je me suis lancée, c'était en rejoignant un collectif d'artistes poètes et slameurs "Au pays des poètes" avec qui j'ai fait mes premières scènes. Quelques temps après, je suis allée m’inscrire à l'Académie des beaux arts pour poursuivre mes études en art graphique, option communication visuelle.

 

Dans les grandes activités de droits de l’homme, défense des droits de la femme ou gala de la paix, vous êtes souvent conviée à présenter vos oeuvres.  A quel moment le slam peut-il impacter positivement le quotidien d’un peuple ?

 

Do Nsoseme : à tout moment le slam peut impacter des vies.  Mais cela dépend du message que l'on choisit de transmettre via cet art. Pour ma part j'écris des textes pour promouvoir les droits de l'Homme, parler de la paix etc. J'écris vraiment sur ce qui me touche et dans le but d’apporter une pierre pour la construction d’un monde meilleur.

 

Comment pouvez-vous définir le slam congolais ? Existe-t-il un slam « congolais » et quelles en sont les particularités ?

 

Do Nsoseme : À ce jour, le slam au Congo est pratiqué comme partout ailleurs. Il y a un texte puis la parole, après certains Slameurs accompagnent cela de musique et ça devient du spoken word, mais je ne vois pas trop la différence... S'il y'en a c'est sûrement dans les choix des sonorités, certains choisissent des sonorités issues des différentes tribus congolaises alors que d'autres préfèrent des sonorités classiques ou autres.

De quoi vous « nourrissez-vous » pour rédiger vos slams?

Do Nsoseme : je m'inspire de tout. Ce que je vois, ce que je vis... Cependant, beaucoup de mes textes parlent du Congo, de ma réalité, de mon peuple, de comment les choses se passent ici, je me raconte et je raconte la vie des autres, je me questionne parfois aussi sur ce qu'on m'impose ou pas et puis je suis touchée après quelque chose,  j'écris.

Quels sont les thèmes qui vous séduisent le plus?

Do Nsoseme : le Congo, la situation de la femme ici et ailleurs, l'amour, la vie, les espérances, les rêves. J’écris très souvent autour de cela.

Quels sont les ingrédients incontournables pour être un bon slameur?

Do Nsoseme : je crois qu'il faut écrire et relire ce qu'on a écrit jusqu'à qu'on y trouve une qualité littéraire et après il faut savoir le dire. Cela ne s’acquiert pas du jour au lendemain, je conseille donc à ceux qui veulent se lancer dans le slam d'écouter les autres et aussi de lire. La lecture nous permet d'apprendre des nouvelles choses, d'enrichir notre vocabulaire, et c'est très important de ne pas dire les choses comme tout le monde, c'est en cela que réside la beauté de la poésie, raconter mais de la plus belle des manières des choses simples et pour le slam, il fait savoir les claquer, choquer parfois avec les mots, marquer les esprits avec les mots.

“La nouvelle kinoise”, pourquoi avez-vous ainsi appelé votre blog? 

Do Nsoseme : le mot « Nouvelle » est porteur de plusieurs sens. Sur ce blog, il fait surtout référence au genre littéraire court en prose basé sur un récit de fiction ou à un fait récent d’actualité. Je vais donc partager mes récits avec mes lecteurs parce que j’aime écrire des nouvelles et en donner. J’aime aussi faire de belles annonces, et rapporter ce que j’ai vu ou entendu, à ma façon, avec mon propre regard même si à quelques rares occasions je me permettrai d’être objective, surtout s’il le faut…La vie est faite d'histoire que l'on vit où qu'on nous raconte, n'est-ce pas des nouvelles ?

Pensez-vous formez des jeunes au slam et la poésie ? Avez-vous déjà entrepris un travail dans ce sens ?

Do Nsoseme : oui, je le fais déjà avec le projet "Elongo Pona Art" initié par la Plateforme contemporaine, une structure qui promeut l'art et accompagne les artistes. J'anime des ateliers de slam dans quelques écoles publiques et je suis ouverte à tous, parce que je pense que le slam libère la parole et apprend le respect du temps de parole de l'autre, dans un pays où très peu de gens sont tolérants, le slam peut être une solution pour apprendre la tolérance et le respect de l'opinion de tous.

Selon vous, que faudrait-il faire pour que le slam et la poésie congolais explosent sur la scène international?

Do Nsoseme : en ce qui concerne le slam, je pense qu'il faudrait plus de productions des slameurs mais aussi, plus de producteurs pour accompagner le slam congolais. Il y'a trop peu d'événements slams au Congo et cela n'aide pas cet art à se faire connaître. Pour la poésie, il faudrait également plus de productions, mais aussi un public prêt à acheter, si dans nos écoles et à la maison nous ne donnons pas le goût de la littérature à nos enfants, qui va acheter nos recueils de poèmes, qui va nous lire? Et quand je parle de productions c'est-à-dire aussi des maisons d'édition prêtes à publier des poètes au niveau local, il y'en a quelques unes mais sous quelles conditions ? Il faudrait peut-être aussi que les poètes se regroupent pour booster cet art.

En outre, Do Nsoseme Dora a participé au "Slam our World"  2017 en Belgique, et à l’édition 2018 au Rwanda et sud Kivu. Elle a aussi fait du théâtre avec l'Asbl belge théâtre et réconciliation au sujet de la paix dans la région des grands lacs. Lire Do Nsoseme Dora

Propos recueillis par Prisca Lokale