RDC : réactions des femmes après publication du gouvernement

Félix Tshisekedi Tshilombo a signé l’ordonnance nommant les ministres dans la matinée de ce lundi 26 août 2019. Sur un total de 66 ministères, seuls 12 seront occupés par les femmes. Ce qui représente 17% par rapport au 50 reconnu par la constitution. Femmes politiques et activistes pro-egalités des chances réagissent à la place des femmes dans ce nouveau gouvernement.

“Premièrement, notre satisfaction est de voir le renouvellement des visages des membres du gouvernement. Ce renouvellement à plus de 70 % donne l’espoir qu’il y aura une nouvelle dynamique dans la manière de rendre les services à la population,” confie Anny Modi, directrice exécutive de Afia Mama en poursuivant “Deuxièmement, sur base de la qualité des portefeuilles des ministères accordés aux femmes, nous avons des femmes ministres de l’économie, des affaires étrangères,  de l’environnement, ce sont des ministères clés pour faire fonctionner le pays. Nous pensons que c’est une bonne chose,”  souligne la directrice de Afia Mama.

Si Afia Mama pense au renouvellement de la classe politique, la Dynamique Nationale des femmes candidates de la RDC reconnaît des avancées en termes de représentativité féminine aux postes clés. “Nous saluons la présence remarquable des femmes au sein de ce gouvernement. Les 17% sont quand même un signal fort bien que nous n’ayons pas atteint 50%. Nous reconnaissons ces avancées. Nous remercions le chef de l’Etat Félix Tshisekedi et le premier ministre pour leur attention sur les critérium imposé aux candidats ministrables.”  affirme Carine Kanku, coordinatrice de cette dynamique.

Ivonne Muswamba, du département logistique de la Dynafec plaide pour une évolution de l’image des femmes grâce à ce nouveau gouvernement. “Le quota des femmes a augmenté et nous en sommes fières. Nous attendons le changement parce qu’il y a une pensée selon laquelle les femmes congolaises ne peuvent pas construire une nation, “Muasi atongaka mboka té.”Mais, cette fois-ci, le rendez-vous est donné “la femme va construire le Congo” promet Ivonne Muswamba.

Les déceptions

Néhéma Bikaylwira, présidente de l’Alliance pour le Renouveau du Congo(ARC) qui reconnaît le pas vers la parité, évoque aussi la question des reports dans la publication de cette liste.“J’ai suivi avec attention la publication du gouvernement Ilunga Ilunkamba. Je constate que le nombre de fois où il y avait report, ce n’était pas pour une question de la participation des femmes. Si tel était le cas, on aurait eu 50% de femmes et la mise en application de l’article 14 de la constitution. Nous évoluons à pas de tortue, il y a une petite différence mais, nous n’avons pas encore atteint les 50 % reconnus dans la constitution” déplore Néhéma Bikaylwira.   

Quant à Espérance Kissimbila, il y a de la méritocratie au sein de la classe politique congolaise mais cette dernière ne transparaît pas dans ce nouveau gouvernement. “Quand on parle du gender, on fait allusion au 50-50. Et pour un gouvernement qui a produit 17% des femmes, c’est une déception. Est-ce que dans tous les partis politiques, il n’y avait pas des femmes compétentes pour atteindre au moins 30 %?” s’interroge Espérance, coordinatrice de l’Association pour l’encadrement, la promotion et le développement de la femme et de l’enfant  .

“Notre déception est partielle parce que nous avons voulu briser le plafond, aller au delà de 20% et même jusqu’à au moins 30% des femmes dans le gouvernement. Nous avons encore des défis à relever pour voir les compétences féminines valorisées, considérées et promues dans tous les postes de prise de décisions à tous les niveaux dans le pays” dit Anny Modi de Afia Mama.

Ce qu’elles attendent des femmes nommées au postes clés

Georgette Biebie Songo, femme leader de Lamuka propose aux femmes nommées de collaborer avec la société civile. “A nos soeurs qui sont du Front Commun du Congo -Cap pour le changement, je demande d'apprécier à juste titre l’apport des femmes  de la société civile et celles de l’opposition qui ont contribué d'une manière ou d'une autre pour que ce combat donne aujourd’hui 17% de femmes au Gouvernement.”

 “La femme est un être honnête. Nous savons que les femmes vont mieux  travailler que les hommes. Lorsqu’un poste de responsabilité est confié à la femme, elle y met le courage et l'honnêteté. Nous allons les accompagner et nous attendons des bons résultats” dit Néhéma Bikaylwira de l’ARC.

“J’encourage ces femmes à faire la promotion des autres femmes. Elles devraient penser également à renvoyer l’ascenseur à d’autres femmes. Chercher à relever le niveau intellectuel des femmes dans les milieux reculés du pays. Qu’elles ne soient pas des simples bureaucrates. Qu’elles fassent des descentes sur terrain pour découvrir les problèmes auxquels sont confrontées leurs semblables,” propose Espérance Kissimbila .

“D’abord, nous prônons la méritocratie. Et quand nous regardons le profil de ces femmes, ce sont des femmes compétentes. Nous attendons qu’elles répondent valablement à leurs obligations. Aussi, nous comptons sur elles, qu’elles marquent la différence sans favoritisme, qu’elles ne soient pas corruptibles, qu’elles aient de bons critères de sélection dans la composition de leurs cabinets, ne pas seulement nommer des membres issus de leurs familles biologiques,” insiste Carine Nkaku  de la Dynamique Nationale des femmes candidates de la RDC.

Les défis qui restent à relever

“ Nous allons continuer  à mener une analyse pour comprendre ce qui bloque  au niveau de la promotion des femmes dans les instances de prise de décisions. Nous allons inciter les femmes et  jeunes femmes à adhérer aux partis politiques. Parce que nous avons compris que dans le paysage politique congolais, ce n’est pas toujours les compétences que l’on va rechercher en dehors des partis politiques, il nous revient de quitter un peu la société civile ou d’inciter les jeunes à adhérer au partis politiques parce que c’est là que l’on puise des compétences pour les postes de prise des décisions” a promis Anny Modi.

Pour Néhéma Bikaylwira, “il faudrait constituer une équipe avec la société civile et autres partis politiques pour travailler sur l’augmentation de la représentativité des femmes dans les postes clés.”       

Sylvestre Ilunga Ilunkamba, premier ministre avait précisé dans son discours “ce pourcentage est encore faible, mais il faut le pondérer par l'importance des portefeuilles qui ont été attribués aux femmes."

Prisca Lokale