Violences de Djugu : « quand tu essaies d’aller chercher même du manioc dans le champ, ils t’attrapent et te tuent » - Témoignage

ACTUALITE.CD

Prospère est arrivé à Kasenyi, à la frontière avec l’Ouganda, depuis une semaine. Il vient du village appelé Jo, dans le territoire de Djugu (Ituri). Lui et ses quatre enfants ont fui les violences et vivent actuellement dans une église à Kasenyi.

« J’ai fui les violences. Les assaillants sont arrivés dans notre village et ont tout brulé. Ils sont arrivés et ils se sont mis à tuer les gens. Nous avons vu le danger et nous avons fui », explique t-il à ACTUALITE.CD

Il a été témoins de la brutalité des miliciens.

« Quand ils sont arrivés, ils ont commencé directement à tuer les gens et incendier les maisons. Nous sommes arrivés, c’est le groupe de renouveau charismatique qui nous a accueilli ici. Mais beaucoup passent nuit à la belle étoile (…). Je suis infirmier. J’ai fui et ici nous manquons de tout : la nourriture, la communication, etc. », ajoute t-il.

déplacés djugu
Quelques habitants de Djugu, à Djugu-centre

Il évoque également les effets collatéraux des opérations militaires à Wago.

« Quand les FARDC ont lancé les opérations à Wago, beaucoup de miliciens ont fui et ont occupé nos villages. A Muvaramu, le long du Lac, ceux qui s’adonnent à la pêche sont des assaillants. A Jo, il y a des militaires, c’est un plus calme. Quand tu arrives à l’endroit appelé Café, ce n’est même pas possible d’aller au champ. Si tu tentes d’aller chercher du manioc ou du maïs, ils t’attrapent et te tuent. Nous avons peur et nous demandons que les militaires nous aident. Ils sont nombreux à Tara et à Muvaramu, sur toute la colline » », explique Prospère.

Vous pouvez écouter l’entièreté de son témoignage (swahili) ici.

Contexte

Les violences armées ont resurgi en avril dernier dans le territoire de Djugu. L’armée a annoncé dimanche avoir démantelé le groupe armé dirigé par un certain  « Ngudjolo » après les offensives menées depuis le 27 juin pour la conquête du bastion des miliciens situé dans la forêt Wago dans le cadre de l’opération « Zaruba ya Ituri (Ndlr : la tempête de l’Ituri) ». 

Le territoire de Djugu avait déjà été secoué par des violences meurtrières en 2017 et 2018. Plus de 200 civils étaient tués, des villages entiers incendiés et plus de 2000 personnes avaient traversé le lac Albert pour vivre en Ouganda. Des centaines de déplacés internes arrivés à Bunia étaient installés autour de l’hôpital général. Cette année, le HCR a dénombré plus de 300 000 personnes qui ont fui les violences depuis début juin dans les territoires de Djugu et Mahagi. Cette semaine, l'ONU a annoncé le décaissement de quelque 6,5 millions de dollars américains pour répondre à la crise humanitaire dans la province de l'Ituri.