Le Professeur Kabange Nkongolo, docteur en droit économique de l'Université d'Afrique du Sud, spécialiste des questions liées au droit des investissements étrangers et à la gestion des ressources naturelles, apporte à travers cette tribune un regard différent et distant par rapport à l’actualité chaude et propose une perspective de réflexion et d’action pour les prochaines années.
La République Démocratique du Congo vient de passer trois ans dans l’attente d’un rendez-vous historique dont la concrétisation s’annonce avec la prestation de serment de Monsieur du nouveau Président élu. Il s’agira là du premier transfert pacifique du pouvoir entre un chef de Président sortant et un Président élu. Au-delà des divergences d’opinions exprimées, de l’optimisme et du pessimisme affichés par les uns et les autres, il faut bien se mettre à l’évidence que les élections ne sont pas tout ce qu’il y a de plus essentiel dans la vie d’une nation. Pendant trois ans, le débat de société a été réduit à la seule problématique de l’organisation des élections, avec ou sans machine à voter, dans un contexte émaillé de torpeur, d’opportunisme et d’incertitude. Maintenant que les jeux sont faits, ne serait-il pas nécessaire de rappeler à la conscience de nos compatriotes cette course qui nous met aux prises avec d’autres nations, pour la réalisation des objectifs du développement durable d’ici à l’horizon 2030 et dans laquelle malheureusement, nous venons de perdre trois précieuses années à ergoter sur les vétilles de la question électorale, question qui, en toile de fond, n’est qu’un préalable de stabilité politique dans le processus qui mène au développement durable. Il est donc plus qu’urgent aujourd’hui pour tous les Congolais de rediriger nos regards vers l’avenir et d’unir nos forces et nos intelligences pour bâtir cet édifice d’un vrai développement congolais.
On ne peut y arriver que si l’on comprend que l'ennemi du développement congolais n’est pas l’individu ou la personne qui milite dans la majorité au pouvoir ou dans l’opposition, mais plutôt ces anti-valeurs que sont la corruption, le clientélisme, le favoritisme, etc.. Assurément, il faudra bien plus qu’une législature pour parvenir au développement recherché, néanmoins, les enjeux géostratégiques, économiques et financiers sont tellement complexes dans cet État à la taille d’un continent, qu’il est impératif aujourd’hui que tous les Congolais alignent leurs efforts derrière le nouveau chef de l'État pour arriver à mettre en place un système capable de refouler ces anti-valeurs et mettre ainsi la nation sur la voie du développement. Naturellement, tout le monde ne peut se retrouver dans les instances décisionnelles, mais chacun à sa manière et dans son champ d’actions quotidien peut y apporter sa contribution.
Il va s’en dire aussi que le nouveau chef de l'État devra impérativement s’élever au-dessus de cette tare qu’est le tribalisme, et choisir des hommes et des femmes parmi toutes les ethnies congolaises (près de 450), avec des compétences et suffisamment du caractère pour imposer une nouvelle dynamique au fonctionnement de l’appareil étatique. Ceci passe par la désignation des animateurs à tous les niveaux, autant dans l’Exécutif que dans les instances judiciaires, dans l’armée, les chancelleries, etc..
Certes dans un contexte de cohabitation politique, il faudra bien que ceux de la majorité parlementaire s’inscrivent dans ce partenariat de principes et collaborent, pour autant que tous aspirent réellement à la prospérité de cette nation. Au bout du compte, ce qu’il faut retenir de cette sonnette d’alarme est qu’il y a bien plus que les élections dans la vie d’une nation, la messe étant dite, il est plus que temps d’avancer, les ODD n’attendent pas. !
Christian Kabange Nkongolo, Professeur/Faculté de droit À Université de Kinshasa, enseigne le droit commercial international à la Faculté de droit de l'Université de Kinshasa. Il est en outre membre du réseau de l'Institute for Gobal Law and Policy attaché à Harvard University.