RDC : Incendie et violences à 10 jours des élections, le doute s’installe

Photo ACTUALITE.CD/Christine Tshibuyi

Au moins cinq personnes sont mortes depuis le début de la campagne électorale, selon les chiffres de la société civile et de l'opposition et plusieurs autres blessées dans plusieurs villes de la RDC. L'Union européenne, qui a prolongé ses sanctions contre 14 personnalités congolaises, annonce que cette mesure peut (ou ne peut) se corser après la tenue des élections. Entre-temps, l'ONU et certains pays européens appellent à la retenue. A cette violence s'ajoute d'autres événements à 10 jours de la tenue des élections.

L’incendie d’un des entrepôts centraux de la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) à Kinshasa ce jeudi 13 décembre vers 2 heures du matin, cristallise l’attention depuis ce matin. Si la classe politique s’accorde à dire que le feu de l’avenue Forces armées (ex-Haut commandement) n’est pas innocent, pouvoir et opposition se rejettent la responsabilité. Olivier Kamitatu, porte-parole de Moïse Katumbi et cadre de Lamuka, accuse le pouvoir de jouer au Ponce Pilate et de vouloir retarder les élections. Sans donner une conclusion, Henri Mova, vice-Premier ministre, ministre de l'Intérieur et de la Sécurité, fait, pour sa part, une allusion à ceux qui ne veulent pas de l’usage de la machine à voter.

« Vous avez entendu les gens qui ne voulaient de l'une ou l'autre donnée du processus électoral, les uns étaient contre la machine à voter, c'est justement les machines à voter qui ont brûlé mais on ne peut pas risquer des conclusions rapides », a expliqué Henri Mova au micro notamment d’ACTUALITE.CD.

Le vice-Premier ministre et membre de l’équipe de campagne du candidat du Front Commun pour le Congo (FCC) s’était déjà montré très remonté au cours d’une conférence de presse organisée le 3 décembre à Kinshasa.

« On ne peut laisser des troublions qui ont reçu mission depuis Genève d’empêcher la tenue de l’élection venir se fourvoyer avec un tel processus qui a nécessité quand-même de l’investissement pour que le 23 décembre qu’on envoie des casseurs pour empêcher que les Congolais puissent exprimer leur volonté politique », avait-il dit.

Il faisait allusion aux propos tenus par le candidat de Lamuka précédemment. Invité de RFI, Fayulu s’était montré intransigeant par rapport à la question de la machine à voter.

« J’ai dit au peuple congolais : ne permettez pas à quiconque d’organiser des élections avec la machine à voter, parce que c’est illégal ! La fraude est préparée. Nous devons, à partir de ces élections, commencer à établir un Etat des droits (…). Nous demandons à nos électeurs qu’on n’installe même pas la machine à voter dans les bureaux de vote. Que personne ne puisse organiser les élections en utilisant la machine à voter », avait déclaré Fayulu.

Ce qui a fait dire à Mova que Fayulu exécuterait un plan conçu depuis Genève pour empêcher la tenue des scrutins le 23 décembre.

« Si le Monsieur qui a parlé, qui a reçu mission de Genève à empêcher le processus pour que ses commanditaires rentrent dans le processus parce qu’ils estiment qu’ils ont été exclus ad vitam aeternam, si les commanditaires du plan plus global qui ont financé ces différentes rencontres qui ont trouvé un cheval de Troie qu’ils veulent insérer comme un virus dans le processus… Il faut leur dire que la mèche est trop grosse et nous savons et nous allons donc empêcher que les empêcheurs de tenue des élections ne puissent sévir. Tout le monde est avisé, l’Etat veille au grain et la machine politique FCC est suffisamment rodé pour empêcher que ceux qui ont honte de boycotter les élections, qui veulent les boycotter sans les boycotter, donner l’impression qu’ils vont y aller… ces gens n’étaient pas prêts », avait ajouté Mova.

Et, dans ses meetings, Emmanuel Ramazani Shadary appelle la population et particulièrement les jeunes à apporter un appui à la police pour sécuriser les bureaux de vote et particulièrement les machines à voter.

Depuis, la campagne électorale est entrée dans une nouvelle dimension. A 10 jours des élections, Lamuka, requinqué par les foules qu’il draine particulièrement dans l’Est du pays, n’est plus aussi radical sur la question de la machine à voter.

Pierre Lumbi Okongo, directeur de campagne de Martin Fayulu, a annoncé mardi qu’une position définitive de la plateforme Lamuka est attendue incessamment.

« Nous ne sommes pas sans ressources en ce qui concerne la machine à voter. Le moment venu, nous allons lever une option. Ce moment-là n’est pas lointain. Nous vous le dirons. Pour le moment, pour nous, cette machine-là, on n’en veut pas. Elle est illégale. Compte tenu de la gravité de ce qui s’est passé à Lubumbashi et à Kindu, les responsables de Lamuka vont se réunir dans les heures qui suivent pour produire un communiqué qui va prendre une position officielle pour ça », avait-t-il déclaré.

Si la question de la responsabilité de l’incendie de cette nuit reste au cœur de l’actualité, plusieurs autres restent tout autant pendantes :

  • Les élections se tiendront-elles le 23 décembre ? Mova dit oui.
  • Lamuka sera-t-elle considéré comme à l’origine de cet incendie ? Une action en justice sera-t-elle lancée contre Fayulu ? Mova évoque ceux qui ne veulent pas de la machine à voter, mais dit attendre les résultats de l’enquête.
  • Lamuka appellera-t-il ses militants à aller voter avec ou sans la machine à voter ? La réponse ne saurait tarder parce qu’on est à 10 jours du 23 décembre.