Le territoire de Rutshuru risque de perdre la qualité de « grenier agricole » de la province du Nord-Kivu si rien n’est fait pour maintenir les activistes rustiques au beau fixe dans cette partie du pays.
ACTUALITE.CD est entré en contact jeudi dernier avec certains paysans de certaines agglomérations dont Kiwanja, Nyiongera, Kinyandoni, Kahunga où se pratique la culture de divers produits vivriers. Constat: depuis le début de la saison culturale B (2017), les rendements des activités champêtres sont faibles dans la raison. A la base, des paysans contactés parlent de la recrudescence de l’insécurité ainsi que la perturbation climatique qui a provoqué une sécheresse « prématurée » anéantissant les semences et les plantes.
Dans la chefferie de Bwito principalement, les violences à caractère ethnique ont éclaté dans plusieurs localités (Nyanzale, Kibirizi, Bwalanda, Kikuku, Kishishe, Bambu, Kashalira…). En effet, des groupes armés (Mai-Mai, Nyatura et FDLR) ont mené plusieurs attaques contre les communautés locales (Nande, Hutu, Hunde, Nyanga…) causant la mort d’une centaine de personnes et l’incendie des centaines d’habitations. Cette situation a provoqué les déplacements massifs des populations ayant été obligées d’abandonner leurs champs.
<b>L'arrêt des activités à la plantation de Nyiongera </b>
L’État congolais dispose d’un énorme domaine agricole dans le territoire de Rutshuru à savoir « La concession de Nyiongera ou encore Plantation de Nyiongera » située à près de six kilomètres de la cité de Kiwanja sur l’axe-routier Kiwanja-Ishasha. Étendue sur une surface de près de 1 000 hectares, la concession de Nyiongera une prison souterraine construite à l’époque belge (détruite pendant la guerre de l’AFDL) et un camp militaire. La plantation agricole avait auparavant comme objectif « la prise en charge nutritionnelle des détenus de toutes les prisons » de la province du Nord-Kivu. Maïs, soja, haricot, sorgho, millet, arachide, riz étaient régulièrement produits dans ce domaine agricole. Au regard de la croissante densité démographique dans la région, les produits vivriers du domaine de Nyiongera étaient destinés plus tard aux populations hors d’établissements pénitentiaires. Cela a permis entre autres, de subvenir aux besoins alimentaires des habitants du territoire de Rutshuru ainsi que ceux d’autres coins de la province voire des pays voisins. Mais depuis l’arrêt des activités sur cet espace, il y aurait bientôt une année, la famine tend de plus en plus à gagner la région.
<b>Quelques indices</b>
D’après un membre de l’association des paysans de Rutshuru, le succès agricole de Nyiongera remonte à la saison culturale A l’année dernière. En cette période là, tous les produits vivriers étaient vendus à vil prix sur le marché. Mais actuellement, 1 Kg de haricots qui coûtait 300 FC (2015-2016) revient à 2 000 FC, 1 sac de maïs de 100 kg qui se vendait à 15$ est passé désormais à 50$. Le poisson tilapia qui coûtait 500 FC s’achète à 2000 FC à cause de l’insécurité causée par l’activisme des groupes armés le long du lac Edouard (Vitshumbi, Nyakakoma, Ishasha…). 1 Kg de viande de bœuf qui revenait à 3000 FC est passé à 6500 FC car les éleveurs éprouvent des attaques et des pillages des troupeaux par des hommes armés. Si rien n’est fait, Rutshuru risque d’être plongé dans une famine généralisée qui aurait évidemment des conséquences également sur d’autres villes du pays.
<b>Patrick Maki </b>
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