<em>Candidat à la présidentielle de 2006 et actuel ministre de l’énergie, Pierre Anatole Matusila a choisi ACTUALITE.CD pour sa tribune au sujet du Dialogue politique qui a généré l’Accord du 31 décembre 2016.</em>
<strong><em>Tribune.</em></strong>
Les déclarations que l’on enregistre dans l’opinion publique depuis la signature le 31 décembre 2016 du compromis politique dit « global et inclusif » du Centre interdiocésain de Kinshasa sont tout simplement euphoriques sinon anachroniques au regard de la réalité politique de crise que connait notre pays. Car, au-delà de l’effet d’optique promotionnel qui le fait passer pour un dispositif « hors pairs » le crible de la raison fait ressortir une réalité différente qui nous amène à considérer que tout le travail de ce deuxième forum n’aura fondamentalement conduit qu’à une lecture au second degré de l’accord politique de la cité de l’Union Africaine du 18 octobre 2016.
La réalité première et finale c’est que le transbordement méthodologique n’a pas été possible, le travail s’est opéré sur une même base. Le post-Kabilisme gradué s’est imposé à tous comme une variable insurmontable. Car, toute formule ou combinaison de sortie de crise devrait forcément intégrer la Majorité, qui était le « répondant commun ». Cette unité méthodologique nous verse dans un même moule et fait que le résultat final donne un blanc bonnet, bonnet blanc.
« Tout le reste ne tient plus que de la forme et du positionnement politique ».
La question que je me pose est celle-ci : Fallait-il passer nécessairement par le sang des compatriotes pour produire « une copie figurée » que l’on présente aujourd’hui comme un dispositif convenable et insurmontable dans la résolution de cette crise ? Le positionnement politique nous pousserait il jusqu’à sacrifier la vie des hommes et de femmes sur lesquels pourtant nous ambitionnons d’exercer le pouvoir ?
Rationnellement, l’accord de 31 décembre 2016 n’est qu’une copie réaménagée de l’accord du 18 octobre 2016, l’échelle de différence n’est qu’affective ou expressive. On peut rapidement énumérer les éléments de similitude ci-après :
Les sommaires sont identiques. A dire autrement, les matières traitées ont été les mêmes en dépit des tournures employées.
Le post-Kabilisme gradué a été le schéma cardinal dans les deux cas : « Le président en fonction reste en place… » (article 17 point (a) accord cité UA/Point II.2.1 premier tiret CID). Le Rassemblement et alliés ont déserté complètement leur méthode initiale.
Les autres institutions à mandat électif reste en place jusqu’à leur remplacement par des nouveaux animateurs élus (Article 17 point (b) accord cité UA/ Point II.2.2 tiret a,b,c CID).
Le principe de la cohabitation gouvernementale et l’instauration d’un gouvernement d’union nationale (article 17 point (c) accord cité UA/Point III.3.1 CID). La différence ici c’est que la primature est confiée à l’opposition ayant signé l’accord du 18 octobre 2016 dans le premier texte tandis que dans le second la primature est confiée à l’opposition non signataire de l’accord du 18 octobre.
Le principe de la refonte totale du fichier électoral. (article 1er§1 accord cité UA/Point IV.1 CID). Et de décembre 2017 à avril 2018 l’écart temporel pour l’organisation des élections n’est que de 4 mois soit 120 jours. Au Centre interdiocésain il n’a donc été question que de découpler certaines élections.
Mesures de décrispation : impersonnelles dans l’accord du 18 octobre (Art 18 cité UA) et personnification des mesures de décrispation avec les fameux cas emblématiques (point V.1 CID)
Institution du Comité de suivi du Dialogue CSD (article 21 accord cité UA) et du Conseil National de suivi de l’accord CNSA (Point IV.4 sixième tiret CID)
Tout ceci prouve à suffisance que l’accord du 18 octobre 2016 demeure le dispositif clé qui a permis de produire l’intelligence politique dans la gestion de cette crise. Une autre interprétation serait l’expression d’une malhonnêteté criante. Elle a la primeur de poser la gestion institutionnelle comme base de résolution de cette crise et donc de maintenir le contrôle politique du destin de l’Etat face aux périls d’une conflagration annoncée.
Un réaménagement grammatical et formel d’un accord ou compromis initial deviendrait-il une révolution au point de remodeler les équilibres difficilement instaurés ? Il est bien clair que la gestion de cette crise ne peut pas être entreprise dans une logique d’exclusion et la quête de l’inclusivité n’est pas synonyme de reconfiguration de l’espace politique pour défaire un groupe au profit d’un autre alors même que l’offre demeure identique et même qu’il s’agit d’une reproduction des efforts des premiers par les seconds. Cette façon de procéder porterait en elle-même les germes d’une division dont la république n’a pas besoin aujourd’hui. Les acquis du groupe de la cité de l’UA doivent être préservés sans pour autant minimiser la masse critique des nouveaux venus.
Pierre-Anatole Matusila