Rwanda : Kigali dénonce un “cinéma politique” après l’appel de Tshisekedi à Kagame

Félix Tshisekedi
Félix Tshisekedi

Le ministre rwandais des affaires étrangères, Olivier Nduhungirehe, a vivement réagi jeudi soir aux propos du président congolais Félix Tshisekedi, qui avait appelé à « faire la paix des braves » avec son homologue Paul Kagame lors du Global Gateway Forum organisé par l’Union européenne à Bruxelles. Le diplomate rwandais a dénoncé « un cinéma politique » et accusé le chef de l’État congolais d’avoir « détourné un forum de coopération pour en faire une tribune d’accusation ».

Selon lui, la rencontre était « une réunion axée sur la coopération, la paix et le consensus », et non un cadre pour évoquer le conflit à l’est de la RDC. « Le président Kagame est intervenu avant le président Tshisekedi pour parler de la coopération entre l’Union européenne et l’Afrique sur des projets concrets », a déclaré M. Nduhungirehe, citant notamment la construction de l’usine de vaccins BioNTech inaugurée à Kigali en décembre 2023 avec le soutien de l’Union européenne.

Le ministre rwandais affirme que Félix Tshisekedi « a profité de cette tribune pour parler de la crise congolaise et adresser un discours agressif destiné à son opinion publique interne ». Il estime que la question de la RDC « est déjà examinée dans d’autres cadres, à Washington et à Doha », et que le forum européen n’était « ni le lieu ni le moment ».

Réagissant aux propos du président congolais, qui a déclaré n’avoir « jamais été belliqueux » envers le Rwanda, Olivier Nduhungirehe a répondu : « C’est faux et archi-faux ». Il accuse Félix Tshisekedi d’avoir, lors de sa campagne de 2023, « menacé de bombarder Kigali à partir de Goma », d’avoir « envoyé des soldats sur le territoire rwandais », et d’avoir recruté « des mercenaires roumains, remplacés aujourd’hui par des mercenaires colombiens ». Le diplomate rwandais reproche également au chef de l’État congolais de « s’être allié aux milices Wazalendo », qu’il accuse de propager des discours de haine contre les Banyamulenge.

Concernant les accords de paix, M. Nduhungirehe affirme que « le président Tshisekedi oublie que la RDC et le Rwanda ont signé un accord de paix à Washington le 27 juin », et que « c’est lui qui le viole ». Il cite « des bombardements menés par les forces congolaises contre les positions de l’AFC/M23 et contre des villages banyamulenge au Sud-Kivu », en violation du cessez-le-feu.

Le chef de la diplomatie rwandaise est également revenu sur le sommet de Luanda de décembre dernier, affirmant avoir passé « près de neuf heures » à négocier avec sa collègue congolaise Thérèse Kayikwamba Wagner. Il accuse Kinshasa d’avoir « refusé catégoriquement toute idée de dialogue direct avec le M23 », avant d’« accepter par la suite des discussions à Doha ».

Olivier Nduhungirehe a enfin reproché à Félix Tshisekedi d’avoir « ordonné à sa délégation à Washington de ne pas signer le cadre régional d’intégration économique », pourtant négocié « mot par mot » entre les parties.

« Le président Tshisekedi ne peut pas venir à Bruxelles, la main sur le cœur, faire semblant de tendre la main au président Kagame alors que c’est lui qui viole les accords existants », a conclu le ministre rwandais. « Ce qu’il a fait, c’est du cinéma politique, avec des mensonges et un cynisme inacceptables au niveau d’un chef d’État. »