Si le programme est officiellement déclaré, la réalité du terrain est tout autre à Bandundu, chef-lieu de la province du Kwilu. Dans cette ville qui garde encore le nom de l'ancienne province de Bandundu, les femmes enceintes achètent elles-mêmes les médicaments au moment de l'accouchement. La situation est consécutive au manque d’intrants faute d'appui institutionnel déploré par les prestataires de santé depuis quelques mois.
La gratuité de la maternité se heurte aussi au sous-paiement de nombreux intervenants. Certains sont impayés, tandis que dans l'ensemble, tous les prestataires ne perçoivent pas la prime de la gratuité, a indiqué à ACTUALITE.CD une syndicaliste du secteur de la santé.
Lors d'une interview lundi, Huguette Pumbu a dressé un tableau sombre de la situation, avec l'hôpital général de Bandundu comme illustration éloquente.
“Les structures de santé ne reçoivent pas les médicaments nécessaires, exposant les femmes enceintes et les nouveau-nés à des risques graves. La prime de la gratuité n'est pas versée à ceux qui travaillent jour et nuit pour faire fonctionner ce système. La majorité des agents de santé n'ont ni salaire ni prime, alors qu'ils continuent à sauver des vies dans des conditions d'extrême difficulté”, a déclaré cette syndicaliste du secteur de la santé.
Son ras-le-bol, elle l’a exprimé par des interrogations restées sans réponse.
“Peut-on parler de la gratuité quand les femmes doivent acheter les médicaments ? Peut-on parler de gratuité quand les soignants ne sont pas rémunérés, laissés à l'abandon ? Nous disons non à cette injustice”, a-t-elle ajouté.
Les syndicalistes de la santé demandent le paiement intégral et régulier des primes de risque aux prestataires, la prise en charge des salaires des professionnels et l'approvisionnement des hôpitaux en intrants pour la prise en charge des femmes enceintes.
La ville de Bandundu ne compte qu’un seul hôpital général, à côté des hôpitaux secondaires et d’un nombre important d’hôpitaux privés.
La gratuité de la maternité et de la prise en charge des nouveau-nés constituent le premier volet du programme de Couverture santé universelle (CSU). Depuis septembre 2023, cette gratuité a été instaurée à Kinshasa, puis étendue à ce jour dans 13 autres provinces ramenant le total à 14 sur 26 provinces. Au-delà du financement du gouvernement central, ce programme est également appuyé par la Banque Mondiale.
Jonathan Mesa