Crise dans l’Est de la RDC : l’américain Ronny Jackson critique l’inaction de Kinshasa et la mainmise régionale

Ronny Jackson et Paul Kagame
Ronny Jackson et Paul Kagame

Le membre du Congrès américain Ronny Jackson, en mission en Afrique centrale en tant qu’envoyé spécial de Donald Trump, a déclaré mardi devant une commission du Congrès que l’Est de la République démocratique du Congo est devenu une zone "totalement non gouvernée", où les autorités de Kinshasa n’ont plus les moyens de contrôler la situation.

De retour d’une tournée dans plusieurs pays de la région, dont la RDC et le Rwanda, Ronny Jackson a rencontré les présidents de chacun de ces États. Il dit avoir quitté la région à la fois "encouragé sur certains aspects", mais aussi "découragé sur d’autres".

Il a souligné que les ressources naturelles de la RDC sont considérables, estimées selon lui à "des dizaines de milliers de milliards de dollars", et que le pays "pourrait être l’un des plus riches du monde". Mais il estime que cette richesse reste hors de portée, faute de sécurité.

"L’Est de la RDC est une zone totalement non gouvernée. C’est le ‘wild, wild east’", a-t-il déclaré, affirmant que le gouvernement congolais n’a pas la capacité d’y faire respecter son autorité, et qu’il "devient juste une entité de plus essayant de tirer profit des ressources".

Il accuse l’Ouganda, le Rwanda et le Burundi de tirer profit des minerais de l’Est congolais, affirmant :

"Tout le monde le fait, et il n’y a rien pour les arrêter."

Sur le groupe M23, il affirme que le mouvement agit actuellement "sans réelle opposition", même "sans le soutien actif du Rwanda" :

"Les FARDC ne combattent même pas. Elles fuient ou, dans certains cas, rejoignent le M23."

Ronny Jackson a aussi mis en cause un "problème interne" au Congo, selon lui lié au fait que "beaucoup de membres du M23 ne sont pas reconnus comme citoyens congolais". Il considère que cela remonte à des frontières anciennes, expliquant que des populations historiquement rwandaises ont été assimilées en Ouganda mais pas en RDC.

Il appelle à l’inclusion politique et sociale de ces populations :

"Tous doivent être traités comme citoyens congolais avec tous les droits qui y sont liés."

Il estime que le M23 ne déposera pas les armes spontanément et suggère une forme d’intégration dans les forces armées congolaises, pour en faire, selon ses mots, "des citoyens congolais qui défendent leur pays".

Autre problème identifié : les tensions personnelles entre Félix Tshisekedi et Paul Kagame :

"Ils ne peuvent pas s’entendre. À un moment, il faut mettre les différends personnels de côté."

Il propose que les pays voisins partagent les bénéfices économiques de l’Est congolais, par exemple via le raffinage des minerais dans plusieurs pays :

"Si chacun peut y trouver un intérêt, alors chacun aura une raison de garantir la sécurité."

Il a aussi insisté sur la nécessité d’attirer les investissements étrangers, mais il pointe le climat d’affaire actuel comme un frein majeur.

"J’ai parlé à une entreprise suisse valorisée à 18 milliards de dollars. Elle a reçu une facture fiscale de 80 milliards. Après réclamation, elle a été ramenée à un milliard, ce qui reste des centaines de fois leur bénéfice annuel."

Il dénonce des pratiques telles que la corruption, les pots-de-vin, la manipulation des taux de change et l’arbitraire judiciaire. Il note que "les Chinois peuvent se permettre de payer les pots-de-vin, ce que les entreprises américaines ne peuvent pas faire", ce qui leur donne un avantage.

Enfin, il évoque "des membres du gouvernement congolais et leurs familles qui s’enrichissent énormément", pendant que, dit-il, "la population vit dans des conditions misérables".

Ronny Jackson, président de la sous-commission des services armés à la Chambre des représentants, a réitéré son appel à trouver une solution globale, même s’il admet :

"Je ne sais pas encore quelle est la solution, mais tant qu’on ne règle pas ces problèmes, le reste ne comptera pas."