La question de discours de haine en période électorale était au centre d’une conférence ce mercredi 18 juillet à Kinshasa, au Centre Culturel Boboto. Pilotée par le Groupe de média Next Corp dont fait partie ACTUALITÉ.CD, l’activité avait pour but de faire le contour de la situation des discours de haine en RDC en cette période électorale, pour participer à un processus électoral démocratique.
Pour élucider la question, deux intervenants ont échangé avec les participants. D’abord le professeur Bobo Kimuntu puis le Professeur Jean-Claude Matumueni. Le premier, qui s’y connaît en la matière pour y avoir travaillé, a montré quelques résultats des études menées dans la sphère numérique congolaise.
Il résulte cependant que la plupart des messages de haine dans les réseaux sociaux sont politiques.
« C’est politique parce que nous sommes dans un contexte où l’activité politique est au centre de tout. D’abord politique avant de parler culture, santé etc. Il y a plus de partis politiques que d’entreprises », a expliqué le professeur Bobo Kimuntu.
Un autre type de discours est communautaire, il se remarque dans la stigmatisation tribale, religieuse et autres. “Le fait d’être, par exemple, d’une église catholique suppose qu’on est de l’opposition”. La variable de ce message a tendance à cultiver la xénophobie, à rejeter d’autres nationalités, la misogyne, l’homophobe. Les principales victimes de ces discours sont les politiques, principalement sur Twitter, TikTok et Facebook.
Le professeur Jean-Claude Matumueni a soulevé le fait que les discours de haine sont devenus un phénomène quasi permanent en période électorale ou pas. Pour lui, il faut une législation pour leur barrer la route de peur qu’ils produisent des effets à n’importe quel moment.
« Les discours de haine manipulent notre mental, notre esprit pour inculquer en nous, une certaine articulation de valeur par rapport aux autres. Il faut absolument essayer de faire face à travers la législation. Il faut que la loi montre là où il s’agit d’un discours de haine et que des sanctions soient prises en conséquence. Sinon, ces discours vont continuer à proliférer », a-t-il dit.
Et d’ajouter :
« Même si ces discours ne produisent pas des effets tout de suite, il faut toujours les contrecarrer parce qu’ils vont demeurer dans l’esprit des gens et se cristalliser dans le stéréotype, et resurgir à un moment donné si le contexte s’y prête. Si on ne réagit pas, ça devient une sorte d’idéologie dormante qui apparemment ne produit pas d’effets mais un jour, elle peut se réveiller comme un volcan ».
La conférence a connu la participation des membres de la société civile, des politiques, des étudiants, des journalistes.
Discours de haine : les notions élémentaires
L’ONU définit le discours de haine comme tout type de communication, qu’il s’agisse d’expression orale ou écrite ou de comportement, constituant une atteinte ou utilisant un langage péjoratif ou discriminatoire à l’égard d’une personne ou d’un groupe en raison de leur identité, en d’autres termes, de l’appartenance religieuse, de l’origine ethnique, de la nationalité, de la race, de la couleur de peau, de l’ascendance, du genre ou d’autres facteurs constitutifs de l’identité.
Les discours de haine peuvent être véhiculés par toute forme d’expression, notamment des images, des caricatures, des mèmes, des objets, des gestes et symboles et ils peuvent être diffusés hors ligne ou en ligne.
Les discours de haine sont « discriminatoires » (biaisés, fanatiques ou intolérants) ou « péjoratifs » (préjudiciables, méprisants ou dévalorisants) à l’égard d’un individu ou d’un groupe.
Les discours de haine s’attaquent aux « facteurs d’identité » réels ou ressentis d’un individu ou d’un groupe, notamment : « l’appartenance religieuse, l’origine ethnique, la nationalité, la race, la couleur de peau, l’ascendance, le genre » mais aussi des caractéristiques telles que la langue, l’origine économique ou sociale, le handicap, l’état de santé ou l’orientation sexuelle, parmi bien d’autres caractéristiques.
Emmanuel Kuzamba