Le 05 mai à Kinshasa, l’ONG Action et solidarité féminine pour la gouvernance (ASFG) a réuni une cinquantaine de femmes et jeunes lors d'une conférence-débat autour du « renforcement de leur leadership politique au processus électoral ».
En effet, lorsque la CENI a lancé le processus électoral en 2022, ASFG dit avoir constaté un engouement des jeunes et des femmes. Après un monitoring réalisé sur terrain, l’ONG a conclu que les deux couches de la société étaient motivées et s’est résolue à les accompagner.
« Pour participer au processus électoral, on peut être observateur, témoin pour le compte d’un parti politique, candidat indépendant ou non (etc). L’analyse nous a permis d’envisager des séances de renforcement des capacités pour former des femmes et des jeunes, sur les questions de gestion de la cité, la bonne gouvernance, le management ainsi que l’analyse critique. La conférence-débat fait partie d’un projet qui va s’étendre sur tous les districts de Kinshasa (Tshangu, Mont-Amba, Funa et Lukunga). Nous allons former 50 jeunes et femmes de chaque district, prêt.e.s à s’impliquer dans le processus électoral. Nous souhaitons étendre ce projet à toutes les provinces de la RDC » a expliqué Innocente Tshilanda, coordonnatrice de l’ASFG.
« Je ne veux pas tomber dans le piège de la corruption électorale »
Cathy Vangu, avocate de profession, a participé à la rencontre. Venue avec l’ambition de se présenter en tant que candidate aux prochaines échéances électorales, les exposés et discussions l'ont encouragés à mieux se former pour ne pas tomber dans « la corruption électorale », un concept évoqué par Roger Thamba, l’un des orateurs.
« Je suis venue à cette rencontre parce que le sujet m’intéresse. Je voulais m’impliquer –en tant que candidate- dans le processus électoral mais j’ignorais comment faire (…) Au sortir de ces échanges, je comprends qu’il faudrait d’abord identifier les obstacles liés à l’engagement de la femme et des jeunes dans le processus électoral. Pour les femmes, le manque de confiance en soi reste le premier obstacle. Le cadre politique peut également constituer un obstacle mais il faut se lever avec courage et braver sa peur. J’avais des hypothèses sur l’engagement politique. Mais cette rencontre m’a permis d’avoir la bonne information. Cette année, je ne suis pas prête. Il ne nous reste que 51 jours selon le calendrier électoral et je refuse d’y aller de cette façon et de tomber dans le piège de la corruption électorale », a-t-elle confié.
L'exposé de Roger Thamba Thamba, assistant à la faculté de droit de l’Université de Kinshasa (UNIKIN) a porté sur l’engagement politique des femmes et des jeunes à l’épreuve de la corruption électorale.
« Au-delà des obstacles traditionnels à la participation politique des femmes et des jeunes (institutionnels, juridiques, socio-économiques, culturels ou psychologiques), il faut ajouter la corruption électorale. C’est le plus dur car la corruption mine notre système de gouvernance. C’est un danger pour la démocratie car celle-ci se fonde sur des valeurs et des principes (transparence et liberté). Si ces principes ne sont pas respectés, on ne saura pas bâtir une société démocratique. De 2006 aux échéances de 2018, nous avons constaté que les actes de corruption existent à tous les niveaux, entre candidat et électeur, entre candidats et agents électoraux, entre partis politiques (élections au second degré). Les femmes qui veulent s’engager en politique sont ainsi butées à cette réalité, les jeunes également car ils sont dépourvus de ressources financières. Si l’on arrive à éradiquer ce fléau, même les citoyens les moins nantis, démunis qui ont des idées pourront participer activement au processus et être élu.e.s. En l’état actuel de notre législation, la loi électorale renferme très peu de dispositions pénales qui répriment les actes de corruption. Il va falloir poursuivre le plaidoyer pour des sanctions».
Parmi les jeunes, Patrice Lemvo a fait un plaidoyer pour que « soit inscrit dans la loi électorale une mesure incitative en faveur des jeunes dans les listes des partis politiques, en référence à la modification apportée à la loi pour exempter au paiement de la caution, les listes qui comprennent au moins 50% de femmes. Car les jeunes sont dépourvus des moyens ».
Par ailleurs, ASFG a également lancé un appel au gouvernement congolais ainsi qu’à tout partenaire qui voudrait accompagner ce projet à s’associer à leurs efforts pour impliquer plus de femmes et des jeunes dans le processus électoral en RDC.
Prisca Lokale