Procès Chebeya : "Christian Ngoy m'avait dit que le général Numbi n'était pas au courant de ma présence à l'Inspection générale le jour du double assassinat, il lui avait donné l'ordre de me tuer" (Paul Mwilambwe)

Paul Mwilambwe, témoin clé dans le procès Floribert Chebeya
Paul Mwilambwe, témoin clé dans le procès Floribert Chebeya

L’instruction de la cause dans le cadre du procès sur le meurtre de Floribert Chebeya et Fidèle Bazana s’est clôturée depuis le mercredi 17 novembre à la Haute Cour militaire siégeant à la prison militaire de Ndolo. Et les parties devraient venir ce mercredi 8 décembre pour les plaidoiries. Mais la comparution de Paul Mwilambwe, un agent de l'Inspection générale de la police nationale congolaise (PNC) chargé de la sécurité des visiteurs de l'inspection générale du PNC au moment des faits, a donné un autre tournant à la cause. C'est pourquoi la Haute cour a décidé de poursuivre l'instruction.

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Après dix ans d'exil passé entre la Zambie, la Tanzanie, le Sénégal et la Belgique, l'officier Paul Mwilambwe a rapporté comment "son ami", le commandant du bataillon Simba, Christian Ngoy Kenga Kenga avait refusé de le tuer malgré l'instruction du général John Numbi. Selon lui Christian Ngoy Kenga Kenga, son ami de longue date,  lui avait dit que le général John Numbi n’était pas au courant de sa présence à l'inspection Générale de la PNC le jour de l'assassinat de Chebeya et Bazana, et qu’ainsi l’ordre avait été donné  au commandant du bataillon Simba de le tuer. C'est pourquoi Ngoyi lui avait proposé de fuir avec lui à Lubumbashi pour échapper aux menaces du général Numbi.

"Christian Ngoy me disait simplement: “on m'a confié un travail et ce travail va amener très loin. Il me dit que le général John Numbi n'était pas au courant de ta présence et que c’est moi qui lui ai appris de ta présence, il m'a donné l'ordre de te tuer”. Le Général John Numbi m'avait promis après l'exécution, [J'ai entendu dans le procès antérieur qu'on avait promis 40.000$ c'est peu!], on lui avait promis 500.000$, ça, c'est Christian Ngoy qui me le dit, et il m’a dit en pleurant, “Au lieu même de me donner 500.000$, on m'a donné 10.000$”, j’ai vu Christian en train de pleurer. Si Christian avait accepté de me tuer, il n'allait pas me le dire. Il m'a dit que moi je ne peux pas tuer. Il m'a dit : “Je ne peux pas mettre ta vie en danger, moi je te propose que nous puissions partir ensemble, le général John Numbi m'a déjà donné l'ordre de te tuer et j'ai refusé. Tu es un ami de longue date”", a déposé devant la Haute Cour, Paul Mwilambwe

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Le Conseil national de sécurité (CNS), sous la supervision de Pierre Lumbi, alors conseiller spécial en matière de sécurité de Joseph Kabila, avait invité Mwilambwe, toujours selon le témoignage de ce dernier. 

"Après l'assassinat de Chebeya, toute la presse en parle. Le général John Numbi faisait la navette entre chez lui et le chez le Président |[Kabila]. C'est là où il a eu l'information que Mwilambwe sera convoqué au CNS. Le président Kabila avait demandé à Monsieur Pierre Lumbi de convoquer Paul Mwilambwe. Pendant que le Président Kabila a donné l'ordre, il y a quelqu'un de l'entourage du général John Numbi qui a informé ce dernier: “Fais attention, Mwilambwe sera convoqué à l'ANR”. Effectivement si je ne me trompe pas, c'était le 10 juin à 22 h. Je reçois l'appel du sous-lieutenant Kongolo qui était le chef de sécurité du général John Numbi, il m’a dit “Le général a besoin de vous”. Arrivé au Rond-point Mandela, c'est le général lui-même qui appelle mais avec un autre numéro. Je lui dis: “Mon général, je suis presque tout prêt de chez vous”. Il me dit: “ce n'est pas grave”. Il me pose la question: “est-ce que vous avez reçu l'appel du cabinet Conseiller Spécial du chef de l'Etat en matière de sécurité ?”. Je dis: “Non mais plutôt je viens de recevoir l'appel du Major Mukinzi”.  En ce moment là, il était le secrétaire particulier du général Unyone qui était le chef du colonel Mukalay. C'est Mukinzi qui m'a appelé pour me dire : “On a besoin de toi demain à 6h00 au CNS”, ma réponse c'était catégorique : “Je ne viens pas. Moi je ne travaille pas là-bas, je suis un officier de la police. Si le CNS a besoin de moi, on va faire une invitation ou une convocation”", a relaté devant la Haute cour, Paul Mwilambwe.

La comparution de Paul Mwilambwe est soutenue notamment par l’ONG La Voix des sans Voix (VSV) que dirigeait le feu Floribert Chebeya.

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L'affaire est renvoyée pour le Vendredi 10 décembre prochain pour confrontation des différents renseignants et prévenus sur l'affaire. 

Floribert Chebeya avait été convoqué le 1er juin 2010 à l'Inspection générale de la police à Kinshasa pour rencontrer son responsable, le Général John Numbi, selon plusieurs témoignages. Son corps avait été retrouvé le lendemain dans sa voiture, les poignets portant des traces de menottes à Mitendi, périphérie ouest de Kinshasa. Celui de son chauffeur Fidèle Bazana n'a jamais été retrouvé.

Ivan Kasongo